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Depuis 1995, l’opinion a beaucoup évolué sur la question des retraites

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On le sait, la question des retraites est depuis de nombreuses années, un sujet particulièrement pour les gouvernements successifs. L’arrivée d’Edouard Balladur à la tête du gouvernement a été la première étape de cette longue série de réformes des retraites. Par ordonnances le Premier ministre agissait notamment sur la durée de cotisation pour les salariés du secteur privé, qui passera progressivement de 37,5 à 40 ans entre 1994 et 2004 et créait le système de décotes pour les trimestres de cotisation manquants, ainsi qu’un Fonds de Solidarité Vieillesse. Des ordonnances qui n’ont ému l’opinion.

Acquis social emblématique : la retraite à 60 ans

En 1995, en revanche, les premiers bras de fers vont avoir lieu car le Premier ministre de Jacques Chirac, Alain Juppé, souhaite aligner les régimes des salariés du public sur ceux des salariés du privé. S’en suivent de nombreuses grèves et manifestations et le départ d’Alain Juppé.

 « L’opinion semble alors animée de sentiments contradictoires », explique, chiffres à l’appui l’Ifop[1]. « Bien qu’elle juge massivement la réduction des déficits publics (pris au sens large) comme un enjeu prioritaire (91%), elle n’est en revanche favorable à aucun sacrifice individuel, se montrant notamment assez largement opposée (60%, dont 32% tout à fait opposés) au report de deux ans de l’âge de départ à la retraite. » Seuls 11% des personnes interrogées se déclarent tout à fait favorables opposé au report de deux ans de l’âge de votre départ à la retraite.

En 1999, cette tendance se confirme. Un sondage Ifop[2] révèle que près des trois quarts des Français interrogés (73%) considèrent la réforme des systèmes de retraites comme une urgence pour assurer leur pérennité financière, mais 69% d’entre eux continuent de se montrer hostiles à tout recul de l’âge de départ à la retraite.

Oui, à l’alignement des régimes des fonctionnaires sur ceux des salariés du privé

Dans les années 2000 les Français comprennent qu’il faut réformer le système mais sont beaucoup trop attachés à cet acquis social emblématique qu’est la retraite à 60 ans, qu’ils préfèrent ne pas se projeter dans l’avenir et s’opposer à toute réforme qui irait à l’encontre de leurs intérêts personnels.

« Ce constat contribue à expliquer le choix de François Fillon, alors Ministre des Affaires Sociales, pour une réforme ne plaçant l’épineuse question de la durée de travail de tous les Français qu’au second plan derrière une mesure phare : l’alignement des régimes de retraite des fonctionnaires sur ceux des salariés du privé », commentent les experts de l’Ifop.

Cette décision sera d’ailleurs saluée par l’opinion[3] qui se déclarera à 78% favorables à l’idée d’aligner la durée de cotisation à 40 ans pour tous. « En mettant en avant la remise à plat des différents régimes, les gouvernements qui se sont succédés au cours des années 2000 se seront ainsi employés à contourner l’hostilité de l’opinion à l’augmentation de la durée du travail pour réformer le système de retraites », ajoute l’institut de sondage.

Non, au recul de l’âge légal de départ à la retraite

Vienne ensuite les années 2010, et la très difficile réforme du ministre du Travail de Nicolas Sarkozy, Eric Woerth. Cette fois-ci, il n’a plus le choix, il devra toucher à la durée de cotisation et à l’âge légal de départ à la retraite. Mais l’opinion ne le suit pas alors que l’économie est violemment frappée par la crise économique déclenchée en 2008. En juin 2009 : 62% de personnes interrogées se disent défavorables à un allongement de la durée de cotisation, et 64% opposées au recul de l’âge de départ à la retraite[4].

Mais à force de communication, en particulier sur le le vieillissement de la population et l’aggravation de la situation financière, le gouvernement va parvenir à s’assurer le soutien d’une part non négligeable de Français. Une comparaison entre les sondages Ifop[5] réalisés en juin 2009 et en mai 2010 est assez éclairante sur le sujet : l’approbation de l’ensemble des Français, bien que restant minoritaire, progresse de 8 points sur la question de la durée de cotisation (46% en 2010 contre 38% en 2009) et de 7 points sur de l’âge de départ (43% en 2010 contre 36% en 2009).

La lente acceptation

« La réforme Woerth votée en octobre 2010 comprendra, parmi ses mesures phares, l’augmentation progressive de la durée de cotisation de 41 à 41,5 ans à l’horizon 2020 et, plus emblématique encore, le recul de l’âge légal de départ à la retraite, passant à 62 ans », rappelle l’Ifop.

Une enquête réalisée par l’Ifop pour Dimanche Ouest France, du 31 mai au 1er juin, révèle par ailleurs que désormais près de la moitié des jeunes âgés de moins de 25 ans pensent qu’ils n’arriveront pas à partir à la retraite avant 70 ans. Le chemin aura été long mais il paraît aujourd’hui acquis que dans tous les cas il faudra travailler d’avantage.

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1995-2013 : les Français face à l’avenir de leurs retraites

[1] « Français, quels sacrifices ? ». Sondage Ifop – L’Express – Europe 1, réalisé les 12 e 13 octobre 1995 auprès d’un échantillon de 944 personnes de 18 ans et plus, représentatif de la population, selon la méthode des quotas.

[2] « Réforme des retraites, ce que les Français souhaitent ». Sondage Ifop – Notre Temps, réalisé les 25 et 26 février 1999 auprès d’un échantillon de 952 personnes de 18 ans et plus, représentatif de la population, selon la méthode des quotas.

[3] « Le devenir des retraites : pronostics et attentes ». Sondage Ifop – Dimanche Ouest France, réalisé les 30 et 31 janvier 2003 auprès d’un échantillon de 978 personnes de 18 ans et plus, représentatif de la population, selon la méthode des quotas.

[4] « Les Français et les retraites ». Sondage Ifop – Dimanche Ouest France, réalisé les 25 et 26 juin 2009 auprès d’un échantillon de 961 personnes de 18 ans et plus, représentatif de la population, selon la méthode des quotas

[5] « Les Français et la réforme des retraites ». Sondage Ifop – Dimanche Ouest France, réalisé les 6 et 7 mai 2010 auprès d’un échantillon de 957 personnes de 18 ans et plus, représentatif de la population, selon la méthode des quotas.

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