A paraître le 1er juillet, la couverture du prochain numéro du magazine américain Time a déjà fait couler beaucoup d’encre. En cause, le portrait d’un moine islamophobe issu de Birmanie, Wirathu, accompagné d’un titre mêlant les mots bouddhisme et terrorisme. Des protestations se sont déclenchées dans le pays, où l’article a été interdit.
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[image:2,s] Le regarde fixé sur l’objectif, Wirathu, un moine habitué des discours islamophobes depuis son monastère de la deuxième ville de Birmanie, Mandalay, est présenté par le Time comme le « visage de la terreur bouddhiste », comme l’indique le magazine américain dans son numéro à paraître le 1er juillet prochain. Le reportage, mené par Hannah Beech, décrit « comment des moines militants incitent à la violence religieuse contre les musulmans en Asie ». Consterné, le gouvernement birman s’est offusqué de la couverture dévoilée par le Time. Le général Thein Sein, à la tête de la République de l’Union du Myanmar depuis 2011, a décidé d’en interdire la vente afin d’« empêcher d’autres conflits raciaux et religieux » qui ont, l’année dernière, coûté la vie à des centaines de personnes et obligé le déplacement de plusieurs centaines de milliers d’autres.
Un mouvement allant à l’encontre du bouddhisme tolérant
En proie à des violences interreligieuses depuis un an, la Birmanie est secouée par le mouvement 969, dont les trois chiffres étaient à l’origine une référence aux trois joyaux du Bouddha, mais qui est aujourd’hui symbole d’une campagne nationaliste et anti-islamique menée par le moine Wirathu, qui est depuis quelques mois l’instigateur d’un discours haineux, allant à l’encontre du visage pacifique que prônent les bouddhistes. Si les conflits ont démarré dans l’ouest du pays, à l’encontre d’une tribu musulmane opprimée, les Rohingyas, ils se sont depuis installés sur tout le territoire.
Dans le reportage du Time, repris par Courrier International, Wirathu (46 ans) affirme que « [Les musulmans] se reproduisent si vite, ils volent nos femmes et les violent. […] Ils aimeraient occuper notre pays mais je ne les laisserai pas. » Un discours virulent que le gouvernement s’est empressé de condamner, afin que les lecteurs du monde entier ne commettent pas d’amalgames à l’encontre de la religion majoritaire birmane : « L’article du magazine Time crée un malentendu sur le bouddhisme qui existe depuis des milliers d’années et constitue la religion de la majorité des citoyens. Il porte atteinte à la confiance mutuelle entre les religions. »
Le gouvernement ne veut pas que l’on confonde ce mouvement avec le bouddhisme majoritaire
Dans le communiqué officiel, relayé par le site Irrawaddy, il rappelle que « l’enseignement du Bouddha est une religion orientée vers la paix. […] Les organisations du sangha [clergé bouddhique] appellent à ne pas utiliser le label [969] dans des lieux et d’une façon qui nuisent à l’image du bouddhisme. […] Le gouvernement s’efforce, avec les dirigeants religieux, les partis politiques, les médias et le peuple, de se libérer de conflits indésirables. »
Si le focus du Time dévoile une partie sombre du bouddhisme que rejettent les pratiquants majoritaires, les avis locaux, bien que divergents avec la politique menée par Wirathu, s’opposent à cette Une, considérant que « la critique du Time magazine est injuste et dommageable pour le bouddhisme. De tels agissements peuvent créer des conflits, et peuvent servir à enrayer notre fragile transition démocratique », s’inquiète par exemple le site d’actualité numéro un du pays Media Eleven.
Ci-dessous, un discours de Wirathu appelant au boycott des musulmans (sous-titres en anglais)