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Quel intérêt pour le Brésil d’organiser ces grands événements sportifs?

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Locomotive de l’Amérique du Sud, le Brésil trouve sa force dans l’exportation, notamment vers la Chine. Riche en matières premières, le pays auriverde voit même le Fonds Monétaire International (FMI) lui vouer un avenir brillant. Alors qu’il avait rétrocédé le pays d’un rang l’année passée dans son classement des puissances économiques mondiales, le FMI devrait lui accorder à nouveau la 6e place, juste devant le Royaume-Uni. Leurs prédictions vont d’ailleurs bien au-delà, puisque l’institution voit le PIB brésilien surpasser celui français à l’aube 2016, soit à l’issue du deuxième événement d’ampleur que sont les Jeux Olympiques, qu’accueillera la ville de Rio.

Un pays en pleine émergence

Si l’émergence du Brésil ne fait aucun doute, comme le confirme Bastien Drut : « lors des dix dernières années, la croissance moyenne annuelle a été proche de 4%, soit bien plus que dans les pays développés. Le niveau de vie moyen des brésiliens s’est élevé sur la deuxième moitié des années 2000 […] [tandis que] le taux de chômage a baissé continument [sur la même période] : d’un niveau supérieur à 12% en 2003, il est passé à 5,7% de la population active aujourd’hui », les inégalités persistent, dans une économie à double vitesse, « 16 millions de Brésiliens [vivant] avec 70 reals (environ 25 euros) ou moins par mois. »

Une population mise à la marge de la progression sociétale et qui ne perçoit pas forcément d’un bon œil les investissements mis en place, car comme le souligne notre docteur en économie, « les grands événements sont très largement financés par l’Etat et donc par les contribuables ». Une pilule difficile à avaler, d’autant plus lorsque l’avancement des grands travaux réduit le pays en un vaste chantier qui ne prend pas fin.

L’impact des méga-événements surestimé

Des sommes investies abyssales, qui permettront toutefois d’accélérer des dossiers de construction de réseaux modernes de transport et de communication, en plus des équipements sportifs. C’est également l’occasion de rénover les zones touristiques emblématiques, afin d’accueillir dans les meilleurs conditions des visiteurs qui pourront stimuler localement l’économie (même si les touristes habituels choisiront une autre destination pour éviter l’embouteillage). Mais si durant le mois de compétition les afflux sont nombreux, les résultats  à long terme sont moins clairs.

Crédités d’une visibilité exceptionnelle et mobilisant les populations en masse, ces méga-événements sportifs permettent aux pays hôtes de se soumettre à de profondes mutations. Organisées conjointement par des organisations internationales non-gouvernementales et les pouvoirs en place, ces événements auraient, si l’on en croit notre expert, un impact espéré qui serait surestimé : « La recherche universitaire est assez unanime sur le fait que l’organisation de méga-événements sportifs n’engendre pas de boom économique dans un pays et, au contraire, coûte cher aux contribuables. Il ne sera a priori pas rentable pour le Brésil d’accueillir la Coupe du Monde 2014. »

Prise de position sur l’échiquier diplomatique

Des paroles toutefois nuancées par le fait que le Brésil organise coup sur coup deux manifestations : « L’organisation des Jeux Olympiques ne rendra pas ces investissements plus rentables mais pourrait permettre au Brésil de mutualiser certains coûts (routes, hôtels). » Des effets néfastes qui seraient donc atténuer. C’est toujours ça de gagner. Une phase de préparation qui dope donc l’économie locale durant une période donnée, mais qui asphyxie les contribuables sur une vision plus large.

Si économiquement l’intérêt est loin d’être positif, en revanche sur le plan diplomatique les retombées sont plus enthousiasmantes : « Comme pour tous les grands événements sportifs, l’organisation confère un certain prestige au pouvoir politique. C’est exactement ce qu’il se passe au Brésil avec les gouvernements de Lula puis Dilma Rousseff. » Depuis toujours, le sport a permis d’affirmer un statut de nation puissante. C’est un véritable outil politique qui permet de se légitimer sur l’échiquier international et d’offrir une certaine reconnaissance. Cet aspect peut toutefois être à double tranchant si l’organisation est un échec. Au Brésil désormais d’assumer sa nouvelle position.

Propos recueillis par Nicolas Conter pour JOL Press

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