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Au regard du droit, Edward Snowden est-il un lanceur d’alerte?

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JOL Press : Existe-t-il une protection juridique pour les lanceurs d’alerte aux Etats-Unis ?
 
Richard Moberly : Il y a de nombreuses lois aux Etats-Unis qui protègent les « whistleblowers » des pressions et autres menaces, tant dans le secteur public que le privé. Ces lois permettent à une personne qui affirme avoir subi des représailles suite aux révélations qu’elle a faites de procéder à des poursuites devant une agence administrative ou une cour de justice. 

En général, les fonctionnaires bénéficient d’une plus grande protection que les employés du secteur privé. 

 
JOL Press : Est-ce suffisant ?
 
Richard Moberly : Le problème majeur, avec les lois relatives aux lanceurs d’alerte, est que, bien que celles-ci soient nombreuses, elles ne s’appliquent qu’à un type de divulgations ; il y a donc de nombreux vides juridiques. Par exemple, un individu qui révèlerait un danger pour la santé publique ou l’industrie de l’énergie nucléaire se trouverait protégé, mais celui qui mettrait au jour une faute grave commise par l’une des agences de renseignements ne le serait probablement pas.
 
Il n’y a pas de définition arrêtée de « lanceur d’alerte » : pour être protégé, un lanceur d’alerte doit dévoiler le « bon type » d’informations à la « bonne personne ». Un seul faux pas, et il perdra toute possibilité de protection légale. En plus, les lois diffèrent grandement les unes des autres ; elles prévoient des procédures différentes, exigent des preuves différentes, etc. Si bien qu’il est très difficile pour le lanceur d’alerte de savoir à l’avance si la loi qui s’appliquera pour lui va le couvrir après ses divulgations.
 
JOL Press : Edward Snowden est-il un lanceur d’alerte, légalement parlant ?
 
Richard Moberly : Il existe un très fort désaccord sur cette question. Toutefois, la plupart des juristes s’accordent à dire que les dispositifs législatifs de protection américains ne couvrent pas Edward Snowden.
 
Quand il s’agit des agences de surveillance, les lanceurs d’alerte doivent en effet communiquer la faute grave dont ils ont connaissance à un Inspecteur Général de l’agence, et peuvent se plaindre de subir des pressions ou des menaces via une procédure interne. Ils ne peuvent rendre publics leurs plaintes et ne peuvent être protégés par le processus judiciaire qui s’applique aux autres employés américains. 
 
JOL Press : Serait-il possible d’accorder les juridictions internationales pour un statut universel et protégé du lanceur d’alerte ? 
 
Richard Moberly : Déjà qu’aux Etats-Unis il n’y a pas UNE loi homogène qui s’applique à tous les employés du pays, alors, imaginer une définition internationalement admise !… Cela dit, il semble bien qu’il y ait un consensus en train de naître dans le monde pour considérer que les lanceurs d’alerte jouent un rôle vital pour promouvoir la transparence et combattre les comportements dommageables pour l’intérêt de tous.
 
Il y aura dissention dès lors qu’on voudra préciser quel équilibre trouver entre soutien aux lanceurs d’alerte et sécurité. Je pense que chaque pays va arriver à sa propre conclusion – et compromettre, alors, tout effort d’une définition internationale.
 
 
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