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Gens du voyage et municipalités: réciprocité de droits et de devoirs

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« J’appelle les maires de France à la révolte, quelque part, et à utiliser le mode d’emploi qui est le mien », déclarait, dimanche 7 juillet, Christian Estrosi, député UMP des Alpes-Maritimes et maire de Nice, alors invité du « Grand Rendez-vous » Europe 1- iTélé-Le Parisien-Aujourd’hui en France. « Nous disposons de moyens qui nous permettent de le faire. » Aussi a-t-il exhorté les maires de France à « ne pas céder ». « Le pire des exemples dans cette affaire, c’est de céder. Je n’ai lâché sur rien », a-t-il assuré. Mais de quoi parlait-t-il exactement ?

Que doivent faire les municipalités ?

Selon le maire de Nice, des gens du voyage se seraient installés illégalement sur un terrain de rugby  à Nice et auraient déclaré qu’ils y resteraient trois semaines. Christian Estrosi  leur aurait alors proposé dans l’après-midi les 50 emplacements de l’aire d’accueil communale, mais la communauté lui auait signifié vouloir rester unie.

« Les choses sont très claires, il y a une loi qui dit qu’il faut avoir des terrains d’accueil avec une certaine capacité, j’en ai pour Nice », a-t-il dit expliqué. La loi du 5 juillet 2000, dite loi Besson du nom du secrétaire d’Etat au logement de l’époque, Louis Besson, oblige en effet  les communes de plus de 5000 habitants à mettre à la disposition des gens du voyage des aires d’accueil.

La loi demande à chaque département de déterminer où seront implantées les aires d’accueil, et les communes doivent s’y conformer. Celles de plus de 5000 habitants, mais aussi d’autres, plus petites, qui figurent dans le schéma départemental. La loi oblige aussi les communes à disposer d’emplacements plus importants, « susceptibles d’être occupés temporairement à l’occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels ». Or il semblerait que dans les Alpes-Maritimes, cette dernière disposition ne soit pas appliquée.

En octobre 2012, un rapport de la Cour des comptes épinglait 246 communes qui n’avaient pas mis à la disposition des gens du voyage des aires d’accueil.

Quels sont les droits du maire ?

En contrepartie, les municipalités qui se plient à la règle peuvent demander au préfet l’expulsion des campements illégaux dans la commune : « Dès lors qu’une commune remplit les obligations qui lui incombent (…), son maire ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d’accueil aménagées le stationnement sur le territoire » de résidences mobiles, précise la loi. Mais cette « mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques ».

La loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage définit les gens du voyage comme des personnes « dont l’habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles ». L’expression « gens du voyage » ne désigne pas pour autant une population aux valeurs ou à l’origine communes. C’est un statut administratif créé en 1969 et modifié à la marge en 2012 par le Conseil constitutionnel.

Quels sont les droits des gens du voyage ?

Pour que ces nomades puissent circuler librement et s’installer dans les aires d’accueil mises en place par la municipalité ils doivent avoir un livret de circulation ou présenter leur titre de séjour et leur carte de travailleur ou de commerçant étranger.

Le livret de circulation est délivré aux « personnes n’ayant ni domicile ni résidence fixe de plus de six mois dans un État membre de l’Union européenne » et voulant exercer une activité ambulante, comme les forains. Dans ce cas le livret n’est pas soumis à un visa, et le délai de validité se prolonge tous les cinq ans. Le livret peut aussi être délivré aux personnes de plus de 16 ans habitant « de façon permanente dans un véhicule, une remorque ou tout autre abri mobile ». Mais ce livret-là est soumis à un visa, et doit être renouvelé tous les ans.

Les gens du voyage ont l’obligation de se déclarer à une commune de rattachement ; cette commune doit disposer d’un quota maximum de 3% de gens du voyage. Si cette commune dépasse le quota, ils doivent en choisir une autre. 

Que dit cette circulaire de Manuel Valls que dénonce Christian Estrosi ?

Christian Estrosi a par ailleurs dénoncé la circulaire Valls du 26 août 2012 qui empêcherait, selon lui, l’expulsion des gens du voyage. En réalité, cette circulaire concernerait « seulement les campements illicites et notamment les campements de Roms et ne porte pas sur la situation des gens du voyage », a expliqué le ministre de l’Intérieur.

« Plutôt que de s’invectiver, plutôt que de courir après les propos nauséabonds de (Jean-Marie) Le Pen (sur les Roms) la semaine dernière, il faut revenir à la raison et faire en sorte que nous trouvions des solutions », a ajouté Manuel Valls lors d’un point de presse en marge du forum TAC (Technology against crime), consacré à la sécurité et aux nouvelles technologies à Lyon.

Enfin, pour bien comprendre la différence entre les gens du voyage et les Roms, les premiers ont la nationalité française et sont en possession d’un titre de circulation, les seconds sont « des étrangers, ressortissants de l’Union européenne », qui viennent principalement de Roumanie et de Bulgarie.

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