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Jean-Christophe Lagarde, entre indépendance et isolement

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Le centre n’est pas mort mais on ne l’entend plus. Si en 2007, le bon score de François Bayrou avait donné aux centristes l’illusion d’une possible autonomie de leur famille politique, très vite le manque de positionnement du Modem conduisait à son échec cuisant en 2012.

Quelques mois plus tard, Jean-Louis Borloo fondait l’Union des démocrates et indépendants, composée du Parti radical, du Nouveau Centre, et de l’Alliance centriste. Agrégeant autour d’elle les déçus du sarkozysme et du choix de François Bayrou d’appeler à voter pour François Hollande, l’UDI réunit aujourd’hui une trentaine de députés. Parmi eux, Jean-Christophe Lagarde, secrétaire général  du parti, mérite qu’on s’intéresse à son parcours.

Tout commence à Drancy

Né à Châtellerault (Vienne) le 24 octobre 1967, Jean-Christophe Lagarde vit trois ans à Montreuil, avant que sa famille ne s’installe à Drancy en 1970. Fils d’un père est informaticien et d’une mère secrétaire, rien ne le disposait à une carrière politique.

Pourtant il choisit de militer dès l’âge de 20 ans pour la campagne de Raymond Barre : « J’ai senti tout de suite que je ne voulais pas me contenter d’être spectateur : je ne voulais pas donner des leçons à la terre entière sans jamais rien faire pour que les choses changent », explique-t-il au Nouvel économiste. Alors pourquoi Raymond Barre ?  Parce que « lui, au moins, ne dorait pas la pilule aux Français».

En 1989, il est élu conseiller municipal de Drancy sur la liste d’union RPR/UDF et l’année suivante, il adhère au Centre des démocrates sociaux et devient président des Jeunes Démocrates Sociaux de Seine-Saint-Denis.

Une route vers la mairie

Jean-Christophe Lagarde n’a qu’une idée : devenir maire de Drancy, un bastion communiste de la ceinture Rouge de la région parisienne. « On me prenait pour un dingue, mais je ne crois pas au déterminisme politique et il m’importait de rester là où j’ai grandi » raconte-t-il.

Et c’est avec une passion acharnée qu’il va mener son combat pour Drancy : tête de liste de l’union de l’opposition aux élections municipales de 1995 à Drancy, il met pour la première fois de l’histoire locale en ballotage le maire sortant Maurice Nilès, figure historique du Parti communiste français, grand résistant, ancien député et maire de la ville depuis trente-six ans. Ce dernier est cependant réélu dans une triangulaire avec le FN au second tour.

Mais le 11 mars 2001, Jean-Christophe Lagarde remporte dès le premier tour les élections municipales de la ville de Drancy avec 50,84 % des voix, après 66 ans de gestion communiste. Ce sera sa plus grande victoire.

Un député ni de gauche, ni de droite…

La défaite de la gauche à la présidentielle, puis aux législatives de 2002, l’amène tout naturellement à l’Assemblée nationale, où il sera réélu en 2007 et 2012. Cependant, pas question de se positionner à droite ou à gauche : « Lorsque Mitterrand est arrivé à l’Elysée en 1981, j’avais quatorze ans, et je me souviens avoir été le seul, dans la cour de récréation, à douter du programme politique sur lequel il avait été élu ! »

Mais Jacques Chirac n’a pas non plus réussi à le convaincre : « Chirac m’a toujours paru outrancier, je déteste autant les excès de la droite que la bonne conscience que se donne la gauche, vous savez, cette façon qu’a la gauche de porter toujours son cœur en bandoulière. »

Député de la cinquième circonscription de la Seine-Saint-Denis, il devient en 2006 le plus jeune vice-président de l’Assemblée nationale. Prenant sans concession position sur un grand nombre de débats de société, il cherche toujours à marquer son indépendance : il sera l’un des rares députés UDF à prôner le « non » au traité européen en 2005, se prononcer en faveur de la légalisation du cannabis ou contre la loi sur les signes religieux dans les écoles publiques.

Difficile positionnement du centre

Comme de nombreux centriste, Jean-Christophe Lagarde peine à se faire entendre des Français car sa ligne n’est pas assez claire. Porte-parole de François Bayrou lors de la campagne présidentielle de 2007, il affirme ses divergences avec celui-ci lorsqu’il esquisse un rapprochement avec Ségolène Royal. « Je pensais qu’il y avait une chance de bouleverser le jeu politique établi et l’opposition Droite-Gauche classique, à mon sens illusoire et artificielle », expliquera-t-il plus tard. Il refuse, pour autant, d’appeler à voter pour Nicolas Sarkozy.

Quelques mois plus tard, il annonce son adhésion au groupe Nouveau Centre composé d’anciens parlementaires UDF qui avaient soutenu Nicolas Sarkozy entre les deux tours des présidentielles. Et en 2012 il rejoint l’UDI.

« Au Centre, ce qui fait défaut, c’est la définition de ce combat. La question du leader, c’est celle du journaliste. L’affaire du politique, c’est le projet ». Sera-t-il à même de le définir ce projet ? S’il y parvient, alors, il pourra espérer incarner ce centre qui avait permis à Valéry Giscard d’Estaing d’accéder au pouvoir en 1974.

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