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Le Sénat a rendu son rapport sur le dopage

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La nouvelle était tombée comme une bombe parmi le peloton de l’édition centenaire du Tour de France, qui s’apprêtait à s’élancer depuis la Corse. La commission d’enquête du Sénat sur la lutte anti-dopage devait être rendue publique le 18 juillet dernier, soit le jour de la double ascension de l’Alpe d’Huez, l’étape phare de cette cuvée. Sous la pression des coureurs, représentés par leur syndicat, l’organisation des Cyclistes Professionnels Associés (CPA), les sénateurs avaient finalement répondu favorablement à un report des travaux jusqu’à l’issue de cette Grande Boucle.

Un timing qui dérange

C’est donc le 24 juillet que seront dévoilés les résultats de l’enquête. Mais ce qui intéresse surtout le public dans ces futures révélations se trouvera dans l’annexe, où une liste de coureurs ayant évolué sur les Tours 1998 et 1999 – des éditions entachés par l’affaire Festina et les débuts de l’épisode Lance Armstrong – dénoncerait des cas de dopages. Ce seraient ainsi quarante-quatre échantillons d’urine, analysés à nouveau en 2004 dans un laboratoire de Châtenay-Malabry, qui se trouveraient être positifs à l’EPO. Fin juin, le Français Laurent Jalabert avait été la première victime de ces tests rétroactifs, à la suite de fuites du rapport.

Si ces prélèvements avaient été enregistrés anonymement, la commission sénatoriale a su faire le rapprochement entre les échantillons positifs et les noms figurant sur les PV des coureurs. Dès lors, le syndicat aimerait que ce nom sorti en pâture dans les médias soit le seul exposé, indiquant « ses très vives préoccupations car cette publication engendrerait des conséquences graves et irrémédiables pour les coureurs dont le nom serait cité, en violation de leurs droits fondamentaux. » Dans un communiqué, les sénateurs ont estimé, face aux critiques émises à leur égard, que ce rapport n’avait pas « vocation à créer la polémique ».

Un rapport déjà contesté

Contactée par Le Monde, Marie-Georges Buffet, la ministre des Sports et de la Jeunesse de 1997 à 2002, avait indiqué sa colère vis-à-vis de cette commission qu’elle juge incohérente : « La lutte antidopage, c’est une affaire sérieuse ! […] J’avais compris que la mission souhaitait améliorer la législation en matière de lutte contre le dopage. […] Au lieu de ça, on organise un déballage. Le rapport, dont le contenu doit être très riche, risque d’être éclipsé par son annexe. La question est posée : doit-on mettre tout sur la table et repartir sur le bon pied ? […] Même s’il n’y aura pas de suites judiciaires, ces hommes ont refait leur vie, et peuvent être honnêtes dans leurs fonctions actuelles. De manière générale, la démarche des sénateurs ne rend pas honneur à leurs travaux. »

Le CPA, toujours là pour préserver l’image d’un peloton sali par le temps, doute de la véracité du rapport sénatorial : « une telle liste n’est pas fiable : les tests ont été réalisés il y a de très nombreuses années, sous couvert d’anonymat, à des fins exclusivement scientifiques et non de contrôle anti-dopage ; les conditions de réalisation des tests sont donc différentes de celles appliquées pour un contrôle antidopage, comme le laboratoire qui a réalisé les tests l’a reconnu ».

Pas un procès du cyclisme

Un autre argument est venu apporter du poids sur les suspicions d’exactitude des conclusions : « les tests de l’époque ne portaient que sur un faible nombre des coureurs du Tour de France 1998. Dans ces conditions, en plus de possiblement incriminer des coureurs non dopés, la liste en « blanchirait » d’autres qui pourraient pourtant s’être dopés. Une telle publication serait donc doublement injuste en condamnant injustement certains coureurs tandis que d’autres y échapperaient », déclarait ainsi le syndicat dans son communiqué.

Si cette affaire fait du bruit dans le milieu cycliste, le but du Sénat n’est pas de taper sur ce sport, comme le rappellent bien les différents auditionneurs de la commission, qui ont interrogé plus de quatre-vingt personnalités venues de différents horizons sportifs. Didier Deschamps, le sélectionneur de l’équipe de France de football, a par exemple été entendu. De ces rendez-vous ont émergé une loi sur le sport, dont l’un des volets sera consacré à la lutte contre le dopage.

« On doit prendre le document dans sa globalité sans se focaliser sur l’annexe. Les fuites qui ont accompagné l’info Jalabert posent problèmes car les sénateurs ont réalisé du bon travail. On peut dire que ça va être du lourd », a prévenu l’ancien ministre des Sports Jean-François Lamour. Réponse(s) ce mercredi.

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