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Les Vieilles Charrues: le festival de rock de «7 à 77 ans»

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Les Vieilles Charrues, festival breton défricheur de talents

Créé par une bande de copains dans les années 90, le festival des Vieilles Charrues est devenu en l’espace de vingt ans le plus gros festival de France en termes de fréquentation. Environ 250 000 festivaliers se rendent chaque été dans la prairie de Kerampuilh de Carhaix, dans le Finistère, pour applaudir des artistes de renom mais aussi des jeunes talents, comme le veut la politique de la manifestation. 

JOL Press : Le festival des Vieilles Charrues est aujourd’hui l’un des plus importants de France. Comment tout a commencé ? 
 

Jérôme Tréhorel : L’histoire du festival est peu banale… Tout commence à Carhaix, en zone rurale, au beau milieu de la Bretagne dans les années 90.

Une bande de copains, étudiants à Brest, soucieux de redynamiser leur territoire décident d’organiser, en 1992, une sorte de grand banquet avec des jeux entre amis. De bouche à oreille, environ 500 personnes participent à ce rassemblement festif et joyeux. L’année suivante, ils réitèrent l’aventure avec deux fois plus de monde, ainsi de suite…

Au bout de quelques années, les organisateurs ont décidé de transformer cet évènement en un festival à proprement parler. D’années en années, la fréquentation du festival double. En 1997, le festival qui se déroulait jusque là dans le centre-ville, déménage sur la prairie de Kerampuilh de Carhaix, un amphithéâtre naturel, faute d’espace. Les grands noms de la chanson comme Iggy Pop, Charles Trénet ou encore Mc Solaar ont alors commencé à s’y produire.

JOL Press : Quels sont les évènements les plus marquants dans l’histoire du festival ?
 

Jérôme Tréhorel : Il y en a plusieurs. En 1995, les organisateurs ont programmé James Brown à Carhaix… ce qui est tout de même assez exceptionnel ! Cela a propulsé le Festival des Vieilles Charrues qui avait jusque-là une aura surtout départementale et régionale. Cela été le premier coup de maître du festival.  

Autre année marquante, l’édition de 2001 où l’on a accueilli sur la même édition Noir Désir et Manu Chao. Cela reste dans les annales, et dans le top 5 des meilleurs concerts des Vieilles Charrues : quelque 150 000 personnes ont assisté au concert !

Dix ans plus tard, en 2011, le festival célébrait ses 20 ans. Cette année-là, nous avons vendu les 212 000 billets en l’espace de trois jours. Du jamais-vu dans l’histoire des Vieilles Charrues, et de n’importe quel autre festival d’ailleurs.

JOL Press : Quelle place accordez-vous aux jeunes talents ? 
 

Jérôme Tréhorel : Nous sommes très impliqués dans ce système d’accompagnement. Nous voulons faire découvrir les artistes de demain. Mais pour que ce système fonctionne, nous ne pouvons pas nous permettre de faire venir 50 000 personnes avec uniquement des découvertes musicales. Il faut qu’il y ait des têtes d’affiches, c’est dans l’ADN des Vieilles Charrues. Puisque le festival ne vit que sur les entrées des festivaliers, les têtes d’affiche sont indispensables! Cette année, nous avons par exemple la chance d’accueillir Elton John, – M -, le vendredi. Ce qui nous permet ensuite de faire monter sur scène des groupes comme Juvéniles ou BRNS, moins connus. 

Grâce au projet des Jeunes Charrues, nous organisons également une dizaine de tremplins entre l’hiver et le printemps en Bretagne, qui permettra à dix groupes de se produire sur la scène des Jeunes Charrues, où un jury de professionnels élira le lauréat de l’année. Cerise sur le gâteau pour le vainqueur qui pourra intègrer la programmation officielle du festival. 

JOL Press : Quel est le modèle économique du festival ?
 

Jérôme Tréhorel : Il s’agit d’un modèle particulier. Il n’y a pas de subventions. On vit à 80% grâce aux festivaliers. Sur ces 80%, il y a 60% de recettes billetteries, 20% de recettes annexes (restauration…), et 20% qui proviennent partenaires privés ou les mécènes. Lorsqu’il y a moins de monde, le budget décroche… Le but du jeu est donc d’essayer d’équilibrer pour continuer l’aventure l’année suivante. 

JOL Press : Plus qu’un festival, en quoi les Vieilles Charrues s’inscrivent dans un projet de de valorisation du territoire ?
 

Jérôme Tréhorel : Effectivement, plus qu’un festival, c’est vraiment un projet de développement du territoire. Les Charrues est un festival qui est fait avec les gens. Nous sommes une équipe de 12 salariés permanents. Cette équipe s’agrandit à partir du mois de janvier-février pour rassembler une centaine de personnes au mois de juin. Pendant la durée du festival, 5000 personnes sont embauchées pour travailler.

Le vrai esprit des Vieilles Charrues, se sont les bénévoles. Il y a pratiquement 6000 bénévoles – des gens du coin – qui viennent donner un coup de main. C’est tout un territoire qui se mobilise. Nous faisons en sorte de travailler au maximum avec les entreprises de la région, pour faire travailler l’ensemble du territoire pendant l’été. C’est tout cet état d’esprit, cette osmose qui fait les Charrues.

JOL Press : Pour quel public est réservé ce festival ?
 

Jérôme Tréhorel : Nous avons la chance d’avoir un public très sympa, généreux avec les artistes – et je ne dis pas ça uniquement parce que j’y travaille. Je l’ai constaté en termes d’audience, sur d’autres concerts et d’autres évènements. Le public de ce festival porte les artistes. Le public est large et varié : de 7 à 77 ans, principalement du grand ouest.

Chaque année, nous essayons de jouer avec les festivaliers en instaurant une thématique scpécifique à l’édition. En 2012, le thème portait les supers héros. Cette année, le fil rouge ce sont les Gaulois, avec les grands banquets et les villages bretons. Le principe est d’impliquer le festivalier, il n’est pas que spectateur mais également acteur du festival.

JOL Press: Les Vieilles Charrues, un festival écoresponsable ?
 

Jérôme Tréhorel : Nous menons de nombreuses actions depuis plusieurs années mais nous ne communiquons pas sur le sujet car cela nous paraissait plus naturel, qu’un angle de communication comme ça peut le cas un peu partout aujourd’hui. Nous travaillons sur la gestion des déchets en embauchant chaque année 350 nettoyeurs qui se chargent du tri et du recyclage. Nous avons également mis en place il y a quelques années le système des gobelets consignables et réutilisables. Nous sommes allés encore plus loin avec l’association parallèle « Eco charrue », en investissant dans une grande machine à laver conçue spécialement pour les gobelets.

Il y a également beaucoup d’actions autour de la prévention des risques pour les festivaliers : qu’il s’agisse des risques auditifs, des risques liés à l’alcool ou  liés au MST. Des associations viennent pendant le festival pour faire de la sensibilisation et de la distribution de préservatifs et de bouchons pour les oreilles… Nous travaillons également avec des institutions de la Région et du département pour développer des dispositifs de transport en commun : les festivaliers peuvent ainsi venir de toute la Bretagne en train, en bus ou en navette. 

JOL Press : Avec la crise constatez-vous une baisse d’affluence des festivaliers ?
 

Jérôme Tréhorel : Il y a un ralentissement dans l’évolution des ventes depuis quelques années. Les habitudes de consommation du public ont changé. En raison du contexte économique, les gens se décident au dernier moment pour aller à un spectacle. Je pense que la météo n’aide pas non plus…

Propos recueillis par Louise Michel D.

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