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Morgan Tsvangirai, cet adversaire acharné qui veut la tête de Mugabe

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Cette troisième tentative devra être la bonne, Morgan Tsvangirai s’en est fait la promesse. Le Premier ministre zimbabwéen poursuit sa campagne présidentielle avec l’énergie de celui qui ne peut plus perdre.

« Je n’ai aucun doute que la victoire sera la nôtre »

Devant ses partisans, réunis au cœur de la capitale du Zimbabwe, l’opposant historique du président Mugabe, comme pour conjurer le sort a déclaré être sûr de sa victoire, lundi 29 juillet.

« Je n’ai aucun doute que la victoire sera nôtre », a-t-il lancé devant environ 30 000 de sympathisants. « Je veux que le président Mugabe profite de sa retraite dans la paix et le confort de sa région d’origine. […] Nous le traiterons comme notre ancien chef d’Etat, un ancien auprès de qui nous irons chercher conseil en cas de difficultés », a-t-il encore lancé à l’adresse du président âgé de 89 ans, au pouvoir depuis 33 ans.

Depuis le début de sa campagne, Morgan Tsvangirai a largement utilisé cette stratégie pour contrer son adversaire toujours vainqueur. Ce combat électoral est celui de la jeunesse contre la vieillesse, de l’avenir contre le passé.

« C’est un choix entre un passé sombre et un avenir meilleur, entre la régression et la relance, entre l’autoritarisme et la gouvernance démocratique », a affirmé le Premier ministre. « Le choix n’est pas seulement politique, c’est un choix générationnel. Les problèmes d’aujourd’hui ne peuvent pas être réglés avec les gens d’hier ! »

Troisième tentative électorale

Cette élection sera-t-elle la bonne et permettra-t-elle au Zimbabwe de renouer avec la démocratie en mettant un terme au long règne de Robert Mugabe ?

C’est le pari fou de Morgan Tsvangirai, cet homme de 61 ans parti de rien et parvenu à réunir toute l’opposition au président derrière une seule bannière, celle du Mouvement pour le changement démocratique (MDC).

Morgan Tsvangirai est né le 10 mars 1952 à Gutu, à l’est de la Rhodésie du Sud. Fils de maçon, il est l’aîné d’une famille de neuf enfants. Il travaille comme ouvrier dans une usine de textiles après avoir mené de brèves études.

Il devient ensuite mineur pour une compagnie d’extraction de nickel, se marie et durant toutes ces années de travail, il se tient donc à l’écart de la révolte contre le régime de Ian Smith.

C’est alors qu’après ces années de travail, Morgan Tsvangirai s’engage dans le syndicalisme et devient chef de section du syndicat Associate Mine Workers Union. Responsable de la National Mine Workers Union, il devient ensuite secrétaire général du Congrès des syndicalistes zimbabwéens (Zimbabwe Congress of Trade Unions ».

Nous sommes alors en 1988, Morgan Tsvangirai a 36 ans et ses ennuis avec le régime de Robert Mugabe commencent désormais.

Entrée fracassante en politique

L’année suivante, le responsable syndical est accusé d’être un espion à la solde de l’Afrique du Sud et sera emprisonné durant six semaines.

Il lui faudra encore dix ans pour se hisser à la tête de l’opposition zimbabwéenne. En 1998, c’est lui qui est à l’origine d’une grève d’une ampleur inédite contre le régime qui prévoit d’allouer une retraite supplémentaire aux vétérans de la guerre d’indépendance en prélevant plus d’impôts sur les citoyens.

L’année suivante, il crée le Mouvement pour le changement démocratique. Dès la fondation de ce mouvement, Morgan Tsvangirai réussit à réunir tous les mouvements d’opposition très dispersés jusqu’ici, les chômeurs, les jeunes, les fermiers blancs, les riches industriels.

La lutte politique est entamée et Robert Mugabe affronte désormais son premier ennemi de taille.

Accablé par le régime et par son parti

En février 2000, Morgan Tsvangirai mène sa première campagne contre le référendum portant sur la réforme de la constitution. Première campagne et première victoire ce qui symbolise également un premier échec pour le président Mugabe.

Cette même année, des élections législatives sont organisées et le parti de Tsvangirai remporte 57 sièges à l’assemblée. C’est la seconde défaite politique de Robert Mugabe dont le parti, le ZANU-PF, remporte 62 sièges.

2002 marque le premier duel Mugabe/Tsvangirai. Cette année, l’opposant en chef se présente à l’élection présidentielle contre le président sortant. Selon de nombreux observateurs, le scrutin est largement marqué par de vastes fraudes. Néanmoins, Morgan Tsvangirai réussit l’exploit de ne perdre qu’avec 43% des voix, laissant Mugabe gagner avec 57% des voix contre 90% d’habitude.

Les années qui suivent sont difficiles pour Tsvangirai qui subit les foudres récurrentes du régime. En 2003, il est accusé de haute trahison  pour avoir « conspiré pour renverser le chef de l’Etat ».  En 2005, face à une défaite électorale, son parti commence à lui reprocher son manque d’acharnement contre le président en place et son légalisme face aux stratégies frauduleuses de Mugabe.

Dernière course pour Mugabe

En 2008, Morgan Tsvangirai se confronte de nouveau au président à l’occasion de leur seconde élection présidentielle. Robert Mugabe est alors âgé de 84 ans et son pouvoir est de plus en plus contesté, notamment en raison de l’état économique catastrophique du pays.

Preuve de cette lassitude du peuple zimbabwéen, Tsvangirai arrive en tête du premier tour de l’élection. Mais en raison des violences que subissent les partisans du MDC, Morgan Tsvangirai décide de se retirer avant la second tour.

« Nous, le MDC, nous ne pouvons pas leur demander de voter le 27 juin en sachant que voter pourrait leur coûter la vie. Nous avons décidé que nous ne participerons plus à cette simulation de processus électoral, violente et illégitime. Nous ne jouerons pas le jeu de Mugabe », avait-il déclaré en annonçant sa décision.

Seul candidat au deuxième tour, et malgré l’illégalité du scrutin, Mugabe est proclamé président pour un nouveau mandat, mais face à la pression internationale, il est forcé d’intégrer son rival dans un gouvernement d’union nationale.

Après deux défaites, Morgan Tsvangirai croit désormais en sa victoire. A 89 ans, Robert Mugabe devra désormais songer à la retraite. A la fin de ce nouveau mandat, le président historique du Zimbabwe aurait 95 ans.

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