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«Où est passé Amarildo?» contre la violence policière dans les favelas

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Amarildo Dias de Souza est né il y a 47 ans dans ce quartier de la Rocinha, connu comme étant la plus grande favela du monde. Il est le père de 6 enfants et partage avec eux, ainsi qu’avec sa femme, un taudis d’une pièce, survivant avec à peine 300 réais (100 euros) par mois. Depuis qu’il a été coffré par la police militaire de Rio en ce dimanche soir, sa famille a faim.

Le blogueur spécialiste en sécurité, Jorge Antonio Barros, attire l’attention sur la campagne en rappelant que : « S’agissant d’un habitant pauvre d’une favela de Rio, cette histoire a tout pour tomber dans l’oubli. Heureusement, grâce à la vague de protestations, la communauté reste mobilisée ».

Et dans un autre billet il ajoute : « Ce qu’il faut, en fait, c’est rétablir l’état de droit démocratique dans la favela pacifiée. La police doit y agir comme elle le fait dans les quartiers plus chics de la ville, même si à Leblon ça a été un fiasco ».

Des comptes de mouvements sociaux qui luttent contre la violence policière, comme celui des Mères de la place de Mai (référence au « folles de la place de mai » qui réclamaient des nouvelles de leurs enfants disparus pendant la dictature, en Argentine, ndlr) et du Réseau de communautés et de mouvements contre la violence ont assuré, à l’aide d’images et de questions claires, une campagne constante et les manifestations de solidarité provenant de plusieurs villes brésiliennes ont eu une bonne répercussion sur Facebook ces derniers jours.

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Les habitants de la favela du Moinho (le Moulin), à São Paulo, qui subissent les pressions de la spéculation immobilière à São Paulo et qui ont organisé la résistance, ont aussi fait preuve de solidarité.

Sur Facebook se répandent des traductions de la phrase « Où est passé Amarildo » en diverses langues, dans l’espoir d’obtenir un soutien et une pression internationale.

La solidarité est venue de plusieurs pays tels que  l’Uruguay, l’Angleterre, la Palestine, les USA, la France et l’Espagne. Un brésilien qui vit à Berlin, a mis en ligne un mème afin de divulguer la campagne dans ce pays.

« Juste retrouver le corps »

Le 18 juillet, le rappeur MV Bill faisait un commentaire sur son compte Twitter : « Tout en afffirmant qu’il n’a rien à voir avec les trafiquants, la famille d’Amarildo parle déjà de ‘juste retrouver le corps pour un enterrement digne’ ».

En pleine protestation, dans les rues comme sur internet – une campagne de tweets a été organisée dans l’après-midi du 24 juillet sous le mot-clé #CadêOAmarildo et il est entré dans le classement des plus utilisés (les Trending topics) de Twitter -, le gouverneur de l’état de Rio de Janeiro, Sérgio Cabral, a reçu la famille d’Amarildo et a promis « de mobiliser tout le gouvernement » pour le retrouver.

Le 24 juillet, la famille d’Amarildo a été incluse dans le programme de protection des témoins, mesure critiquée par le député de l’état Marcelo Freixo sur son compte Facebook au regard de la longue liste d’attente par laquelle tous les témoins sont obligés de passer en temps normal avant de l’intégrer. La femme d’Amarildo, Elisabeth Gomes da Silva, a déclaré être ressortie « frustrée » de la réunion avec le gouverneur, et qu’aucune solution concrète n’avait été émergé pour retrouver Amarildo.

Un message diffusé pendant les JMJ

Profitant de la présence du Pape François à Rio de Janeiro pour les Journée mondiales de la jeunesse, un groupe d’activistes a projeté un message au Pape sur la façade d’un immeuble du centre-ville. Pendant la visite du Pape dans une favela de Rio, le 25 juillet, le journaliste Bolívar Torres (@bolivartorres) écrivait sur Twitter : « un reporter a dit que le pape ‘avait fait un discours politique fort’. Il ne peut être ni fort, ni politique s’il ne s’exprime pas sur #cadeoamarildo ».

Gianlluca Simi, dans un article pour la revue O Viés, déclare: « Il n’y a aucune nouvelle du lieu où Amarildo pourrait bien se trouver. Son histoire est fréquemment diffusée sur les réseaux sociaux et la pression pour éclaircir cette affaire augmente à travers tout le Brésil. Nous savons, par expérience, que les promesses faites par les autorités n’ont que peu de chances d’être tenues. Cela a cependant peu à voir avec le discrédit des institutions qui agitent le pays en ce moment. Le lien est beaucoup plus grand avec la mentalité qui entoure la disparition d’un noir, pauvre, et habitant dans une favela. Ce sont là des histoires qui, malheureusement, ne nous étonnent déjà plus : la police qui terrorise et l’habitant de la favela (criminel supposé) qui disparaît ».

Ecrit en collaboration avec Raphael Tsavkko Garcia.
Ecrit par Mariana Parra · Traduit par Jean Saint-Dizier 
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