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Trappes, Stockholm, Londres: retour sur les origines des violences urbaines

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Trappes, une arrestation polémique qui secoue la ville

Après un week end de tensions, on espère le retour au calme à Trappes. Cette ville des Yvelines a été secouée par des affrontements entre les habitants et les forces de l’ordre après une arrestation qui a dégénéré, jeudi 18 juillet.  Bilan de ces trois jours de violences : six jeunes interpellés, des poubelles brûlées, du mobilier urbain détruit, un adolescent grièvement blessé à l’œil et quatre policiers légèrement blessés.

Facteur déclencheur de ces violences : le contrôle d’identité d’une femme portant le voile intégral sur la voie publique – une pratique interdite par la loi depuis 2011 – qui a mal tourné. Le mari, converti à l’islam, s’est interposé et aurait agressé un policier puis tenté de l’étrangler pendant le contrôle de son épouse. Placé en garde à vue à Trappes, il a été remis en liberté, samedi 20 juillet, et placé sous contrôle judiciaire avant d’être convoqué prochainement devant un tribunal. Mais cette version des faits est contesté par Marwan Muhammad , le porte-parole du Comité contre l’islamophobie en France (CCIF), rapporte Libération. Se fondant sur le témoignage du couple et de plusieurs témoins, il affirme qu’ils auraient été victimes de violences de la part des policiers. 

Cette arrestation polémique a provoqué une vague de violences dans cette ville de 30 000 habitants, qui s’est étendue dans la nuit de samedi à dimanche 21 juillet aux communes limitrophes d’Elancourt et Guyancourt. Ces heurts sont révélateurs d’un malaise social dans cette banlieue ouest de Paris, comme dans la plupart des quartiers où le chômage et les inégalités sociales sont élevés et la cohabitation des différentes communautés difficile. 

La «crise des banlieues» en 2005

Les images véhiculées à la télévision depuis jeudi 18 juillet ne sont pas sans rappeler celles diffusées au quatre coins du monde lors de la « crise des banlieues » en France, il y a six ans maintenant. Le jeudi 27 octobre 2005, trois adolescents de Clichy-sous-Bois se cachent  dans un transformateur EDF pour échapper à la police. Deux d’entre eux, Zyed Benna et Bouna Traoré meurent électrocutés. Le troisième, Muhittin Altun, grièvement blessé, s’en sort. Cet évènement provoque la fureur des jeunes qui affrontent les forces de police.  

Pendant plus de trois semaines, la région parisienne, puis la France entière s’embrasent.  L’état d’urgence est déclaré. Incendies, jets de pierres, véhicules incendiés, gymnases, écoles, et magasins détruits…le bilan est loud. Depuis ce phénomène d’ampleur nationale, des plans ont été développés pour mieux intégrer ces zones urbaines sensibles, des quartiers défavorisés où les jeunes se sentent souvent exclus de la société.

Stockholm, théâtre de plusieurs nuits d’émeutes en mai 2013

Souvent érigées comme l’exemple à suivre en terme de modèle social, la Suède et la ville de Stockholm, en particulier, n’ont pourtant pas été épargnées par les violences urbaines. En mai dernier, la capitale suédoise a été le théâtre de plusieurs nuits d’émeutes durant lesquelles une centaine de voitures ont été incendiées, des écoles, des commissariats et des centres culturels endommagés, et une trentaine de personnes interpellées. 

A l’origine de ces émeutes : la mort d’un homme de 69 ans, tué par la police alors qu’il brandissait une machette le 13 mai dernier à Husby, une banlieue défavorisée située dans le nord de la capitale suédoise, où vit une importante population immigrée.  Mais au-delà de ce fait divers, c’est la  ségrégation sociale et spatiale qui serait à l’origine de ces violences urbaines, selon Bo Malmberg, professeur au département de géographie humaine à l’Université de Stockholm. Selon lui, le problème repose sur la hausse des inégalités dans ces quartiers immigrés : « Le taux de pauvreté en Suède a augmenté rapidement depuis 2005, notamment en raison de la politique du gouvernement. Et les banlieues sont parmi les plus touchées » expliquait-il à JOL Press« Les personnes avec un revenu élevé ont bénéficié d’une baisse du taux d’imposition sur le revenu, de l’abolition de taxes foncières (taxes sur les valeurs maison) et de subventions en espèces pour les services à domicile (nettoyage, etc). Les personnes avec de faibles revenus ont, au contraire, subi une réduction des prestations et ont été frappés par une augmentation du taux de chômage » poursuit le professeur.

Situation explosive ? La tension était en tout cas palpable dans ces quartiers défavorisés. Déjà en 2010, une centaine de jeunes avaient attaqué un commissariat à Rinkeby, autre quartier pauvre de Stockholm.  

Violences urbaines au Royaume-Uni en août 2011

En 2011, la capitale britannique et plusieurs autres villes anglaises ont été secouées par une série d’émeutes après la mort Mark Duggan, un homme de 29 ans, soupçonné d’être un dealer de cocaïne. Ce père de quatre enfants d’origine antillaise,  a été abattu dans une fusillade avec la police dans le quartier de Tottenham, banlieue multiethnique et défavorisée de la capitale britannique.

Là encore, même scenario : du 6 au 10 août 2011, les émeutiers mettent le feu aux voitures de police, aux bus et à plusieurs bâtiments. Les pillages ont ensuite débordé dans d’autres quartiers de Londres, puis d’autres grandes villes industrielles de Grande-Bretagne telles que Birmingham, Liverpool, Manchester et Bristol. Face à l’ampleur de la crise, le Premier ministre David Cameron ainsi que la ministre de l’intérieur Theresa May, le maire de Londres, Boris Johnson, mettent fin à leurs vacances et organisent une réunion de crise. Pour les habitants ces troubles traduisent un profond malaise social, mais les politiques et la police préfèrent mettre en avant  la « défaillance des parents » pour justifier cette « violence gratuite ».

Le quartier de Tottenham, dont le chômage est l’un des plus élevés de la capitale britannique avait déjà été le théâtre de violents troubles en 1985, après une descente des forces de l’ordre chez des habitants, causant la mort d’une femme de 49 ans à la santé fragile. 

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