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Jean-Yves Ollivier dénonce les sanctions internationales

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A l’occasion de la sortie du film sur sa vie, Plot for Peace, récemment récompensé au festival du film de Galway, l’homme d’affaires Jean-Yves Ollivier a accordé une interview à Paris Match, où il revient sur son histoire et dévoile les coulisses de la diplomatie parallèle. S’il aborde ses relations avec Chirac, ou son rôle dans la chute de l’Apartheid, celui qu’on surnommait Monsieur Jacques profite surtout de cet entretien pour dénoncer les sanctions internationales, qu’il juge contre-productives.
 
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Dans Plot for Peace, on découvre le destin de Jean-Yves Ollivier, homme d’affaires français particulièrement implanté en Afrique australe, qui a participé à la libération de Nelson Mandela en organisant différentes rencontres diplomatiques secrètes. Ce film documentaire, réalisé par Carlo Agullo et financé par l’ONG culturelle African Oral History Archive, relate cette période de l’histoire sud-africaine, en s’appuyant sur les témoignages des personnalités influentes de l’époque, comme Winnie Mandela et sur des images d’archives inédites. Cette semaine, Paris Match a interviewé ce personnage énigmatique. Retour sur un entretien sans concession. 

De la Françafrique à Jacques Chirac

Jean-Yves Ollivier critique vivement le rapport malsain entre la France et l’Afrique, mais il estime toutefois que la France-Afrique est morte. « Si tant est qu’elle ait existé, elle aura duré le temps de ceux que la France avait fait nommer au moment des indépendances », précise-t-il.
 
Il regrette surtout le manque d’ambition de la France dans ses rapports économiques à l’Afrique, où la condescendance de l’aide au développement européenne a remplacé la coopération économique. 
 
Pour démontrer cette  frilosité française pour investir, le businessman fait la comparaison avec la Chine : « La France a parlé pendant vingt ans de construire une route entre Pointe-Noire et Brazzaville, axe essentiel pour le Congo, sans jamais être capable de la financer. Les Chinois sont arrivés et en deux ans, c’était fait. Ils vont droit au but: vous voulez une route? Très bien, ce sera tant, payable sur vingt ans ou l’équivalent en pétrole à livrer selon tel ou tel échéancier. L’Europe peut dépenser 5 millions de dollars en études de faisabilité pour un projet qui en vaut 2 millions. »
 
Jean-Yves Ollivier revient également sur ses rapports avec l’ancien président de la république, Jacques Chirac, dont il  a longtemps été considéré comme un membre de son clan. S’il admet avoir «  servi parfois de messager à Chirac », il assure n’avoir « jamais été mandaté par lui ni parlé en son nom ». 
 
D’ailleurs, lorsqu’il décrit ses relations avec l’ancien président, on sent bien que ces dernières ne sont pas au beau fixe : « Je me suis définitivement brouillé avec lui lorsqu’il a lâché Michel Roussin dans l’affaire des emplois fictifs de la Mairie de Paris. J’estimais qu’il aurait dû secourir celui qui l’avait servi. Je le lui ai dit, et j’ai claqué la porte: Vous ne me reverrez jamais. Ensuite, j’ai été interdit de réception dans les ambassades de France » explique-t-il au sujet de celui qu’il considère comme un « gestionnaire de [son] propre avenir ».

Quand les sanctions internationales confortent les régimes les plus nocifs

Autre combat de ce spécialiste des relations internationales et de la diplomatie : la critique des sanctions internationales, qui isolent, selon lui, les populations des pays concernés et ne permettent pas aux dirigeants de bénéficier de l’ouverture sur le monde qui leur permettrait de prendre conscience de leurs abus. Pour expliquer son point de vue sur ce sujet, Jean-Yves Ollivier, qui ne cache pas avoir développé une partie de son business en passant outre les embargos internationaux lancés contre les régimes politiques, s’appuie sur deux exemple : celui du Zimbabwe et celui d’Israël. 
 
« A Beyrouth où il était encore réfugié, Arafat, qui savait ce que je faisais en Afrique du Sud, m’a dit à l’époque: “Le monde ne se rend pas compte que, en répondant à nos demandes de sanctions contre Israël, il nous a aidé à nous piéger. Le commerce et les affaires sont des vecteurs remarquables pour éliminer les tensions. Isoler un pays, c’est l’enfermer dans une voie sans issue…” Quand on interdit à la famille de Mugabe de voyager, on l’empêche d’entendre les critiques, donc de changer. Finalement, on l’encercle avec sa pensée et on lui permet de passer du statut d’oppresseur à celui de victime. »
 
Ainsi, les sanctions internationales et les embargos contre les régimes aux comportements douteux sont à l’origine de trois effets pervers : ils confortent l’autorité des dirigeants, qui utilisent ces sanctions dans leurs propagande pour monter au peuple que l’ennemi vient de l’extérieur ; ils isolent les populations, qui ne peuvent plus disposer d’une fenêtre salutaire sur le monde (on connait le rôle de l’internet et du soutien occidental dans la révolution du jasmin tunisienne) ; ils isolent également les dictateurs et autres chefs d’état autoritaires, qui n’ont plus de recul sur leur comportement et qui se confortent dans leurs attitudes.
 
Comme on dit souvent, le mieux est l’ennemi du bien…
 
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