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La vraie fausse liste d’exilés fiscaux politiques de Pierre Condamin Gerbier

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On se pince à lire l’article de Mediapart paru mercredi 21 août tentant désespérément de se justifier en expliquant que Pierre Condamin Gerbier n’avait jamais promis de « liste » de 15 hommes politiques français accusés par lui de posséder des avoirs en Suisse, et de facto, de se rendre coupables d’évasion fiscale.

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Dans un long papier, Mediapart, à l’origine de l’affaire, se justifie « car de « liste », Pierre Condamin-Gerbier n’a en vérité jamais parlé ! Voici ce qu’il déclarait le 3 juillet devant les députés de la commission Cahuzac : « En vingt ans d’expérience, j’ai été le témoin direct ou indirect d’un certain nombre de dossiers. J’aime peu la terminologie de liste car s’il s’agit de sortir une feuille A4 avec quinze noms dessus, cela ne vaut que le papier sur lequel c’est imprimé ». Cette “liste” n’est rien d’autre qu’une bulle médiatique, qui explose aujourd’hui à la face de ceux qui l’ont créée. »

Une liste ? Quelle liste ?

Ah bon ? Ce seraient donc les médias qui seraient coupables d’avoir imaginé une liste qui n’existe pas et dont Pierre Condamin Gerbier ne se serait jamais vanté d’être en possession ? Pourtant à reprendre ses interviews dans la presse, avant d’être incarcéré à son retour en Suisse mi-août, « pour avoir trahi le secret bancaire suisse » dixit Médiapart, mais bien en fait pour vol de documents et divulgation d’informations confidentielles chez ses anciens employeurs, « PCG » ne chipotait pas avec les mots.

Dans une interview au JDD, le 16 juin dernier, Pierre Condamin Gerbier semblait bien la posséder, cette liste : « Je peux simplement dire aujourd’hui qu’il y a dans cette liste de très grands noms de la politique française, des gens que l’on est habitué à voir sur les écrans de télévision. Il s’agit de personnages beaucoup plus familiers du grand public que ne l’était Jérôme Cahuzac…  J’ai été entendu une fois dans le dossier Cahuzac, où j’ai expliqué des pratiques en général. Pour l’instant, je n’ai pas encore décidé de la façon dont je rendrai publique cette liste. J’attends que des conditions soient réunies, notamment en termes de protection et de sécurité pour ma famille. Je n’ai rien à gagner dans cette histoire. Au contraire. »

Même chose à la Tribune de Genève, quelques jours plus tard, le 22 juin « Quand on avance des choses, il faut des éléments de preuve. Il y a une telle sophistication du fait de la multiplication de structures et des mouvements financiers que donner des bribes ne sert à rien. Sur les 15 noms qui figurent sur la liste, il y en a pour qui il y a déjà suffisamment d’éléments exploitables. Pour d’autres, j’attends encore des choses ».

Le lendemain, le 23 juin, au « Matin Dimanche », PCG en rajoutait une couche : « Ma liste d’élus français, je la dévoilerai lorsque je me sentirai en sécurité et que les filières judiciaires par lesquelles je les ferai passer seront sûres. (…) Je n’ai jamais croisé ni eu écho d’un compte de Jérôme Cahuzac chez Reyl. La liste de noms que j’espère pouvoir produire devant la justice française n’a aucun lien avec ce cas particulier. Il a à voir avec un système d’évasion fiscale qu’on me demande de décrire. Et des noms, en vingt ans de carrière, je peux en révéler, preuves à l’appui. »Le Matin Dimanche, 23/06/2013

Circulez, y’a rien à voir

Aujourd’hui, son avocat s’agite dans la presse, expliquant dans une longue interview à l’Agefi suisse (après avoir accusé l’Agefi d’être lié à son ancien employeur, la banque Reyl, car elle serait un gros annonceur du journal) que« cette liste n’a jamais existé » parlant de « moyen de pression maladroit » et relatant justement des pressions dont il aurait fait l’objet à l’époque. Curieux ! Faire état de l’existence d’une « liste » pour faire taire les pressions est assez cocasse. On dirait plutôt que la liste a fait « Pschitt » justement parce que des… pressions se sont manifestées mais après l’annonce de l’existence d’une telle liste…

Car il ne fait aucun doute que parmi les hommes politiques, les capitaines d’industrie et même les « simples citoyens » français  pourvus d’un minimum de patrimoine et d’une once de jugeote, plus d’un se rend coupable d’évasion fiscale en le sachant, et en ayant mauvaise conscience, mais probablement bien plus souvent, en se considérant dans son bon droit.

Après, tout est une question de proportion : les 650 000 euros  (connus) de Cahuzac représentent un 3 pièces à Paris dans le 18e arrondissement. Mais si certains politiques français jouent double jeu, et planquent des millions en Suisse ou ailleurs en ayant bonne conscience, c’est un autre problème.

N’est ce pas Pierre Moscovici qui parlait mardi 20 août, sur Europe 1, de « matraquage fiscal », le reconnaissant formellement et annonçant son « ralentissement » en 2014  et l’inversion de la tendance en 2015 ? Il n’y aurait pas d’évasion fiscale sans matraquage du même nom. CQFD.

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