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Législatives en Australie: Rupert Murdoch veut la peau de Kevin Rudd

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« Kick this mob out » ou « Virez toute cette bande » – C’est le « Sortez les sortants » paru en Une du Sydney Daily Telegraph. Un message limpide – sans surprise – qui ne laisse aucun doute quant aux préférences de Rupert Murdoch à l’occasion du scrutin législatif du 7 septembre en Australie.  

L’éditorial invitant les Australiens à tourner la page et à renvoyer le travailliste Kevin Rudd à l’Histoire est un exemple classique du goût de Rupert Murdoch pour l’assassinat politique. Pas la moindre tentative de masquer ses intentions, c’est franc, direct, belliqueux. Et cela illustre, une fois de plus, l’étrange collusion entre les intérêts politiques et commerciaux du magnat et de son gigantesque groupe médiatique, News Corp.   

« Faiseur de Premier ministre » en chef

Rupert Murdoch a pratiqué cet art – qui n’est pas donné à tous les magnats de la presse – sur trois continents – l’Océanie, l’Europe et l’Amérique. S’il ne l’emporte pas à tous les coups – le Bill Clinton de 1996 et le Barack Obama de 2012 – peuvent en témoigner, il compte de bien belles prises à son tableau tant en Australie qu’au Royaume-Uni.

Outre-Manche, Tony Blair, duquel il s’est rapproché dès 1994, à peine ce dernier élu jeune leader de l’opposition travailliste, lui doit son élection – et la défaite de John Major – en 1997 et ses réélections en 2001 et 2005. Ces liaisons dangereuses ont été à double tranchant et ont suscité, au temps du Blairisme triomphant, bien des débats sur l’indépendance de la presse. A l’inverse, Gordon Brown lui doit, sans doute aussi, son passage éphémère au 10 Downing Street, la presse populaire « murdochienne » lui préférant clairement David Cameron – un autre jeune talent – en 2010…

Une stratégie rodée

Kevin Rudd et ses collègues travaillistes peuvent s’attendre à cinq semaines d’assauts continus, dans le ton du premier éditorial du Sydney Daily Telegraph.

Pour cela, Rupert Murdoch a même importé de New York une de ses plus fines gâchettes, l’Australien Col Allan. Depuis l’arrivée de ce dernier, l’ensemble des médias de News Corps ont renforcé leurs attaques sur les travaillistes sortants.

Les motivations de Rupert Murdoch ne sauraient être strictement politiques. News Corp aurait au moins deux intérêts commerciaux à l’éviction de Kevin Rudd : le National Broadband Network (NBN) du gouvernement serait une menace pour Foxtel, télévision par câble monopolistique que News Corp détient avec Telstra, et les travaillistes pourraient tenter d’introduire une régulation plus stricte des médias – dont pâtirait l’empire Murdoch.

Des travaillistes malmenés dans les sondages

Avant ou sans Rupert Murdoch, les travaillistes ne sont pas à la fête dans les sondages. L’éviction de Julia Gillard par Kevin Rudd en juin  a laissé des traces, tant dans l’opinion que dans le parti. Mais la question est de savoir si le scrutin sera une victoire pour Tony Abbott, le leader conservateur, ou seulement pour Rupert Murdoch.

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