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Même en plein été, une sortie de récession ne fait pas le printemps…

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Cassandre est en vacances et il est de bon ton, en cette saison, de faire grand bruit de la moindre petite bonne nouvelle. Soit.

Hurrah, hurrah ! Après six trimestres, la zone euro est enfin sortie de récession…

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Les chiffres publiés à Bruxelles par Eurostat, l’agence de statistiques communautaire, laissent apparaître une croissance de +0,3% dans les 17 pays de la zone euro au cours du deuxième trimestre 2013.

Une performance d’autant plus positive – et réjouissante – si l’on considère que les marchés financiers ne misaient pour leur part que sur un solde positif de +0,2% et que ce petit 1/10e qui fait toute la différence est largement dû aux performances inattendues de l’Allemagne et de… la France, +0,7% outre-Rhin et +0,5% dans l’Hexagone. Le très international « Hurrah ! » devient alors un franc et gai « Cocorico ! »

Pierre Moscovici s’efforce de retomber sur ses pieds

Le week-end dernier, la communication du ministre de l’Economie et des Finances s’était un peu emmêlé les pinceaux. Annoncer simultanément la sortie de récession et la baisse des prévisions de croissance n’est pas économiquement stupide mais, en termes de communication, cela devient facilement incompréhensible. Tout le monde n’a pas eu la chance de suivre rue Saint-Guillaume au début des années 90 les cours d’économie politique de deux brillants énarques, « Hollande et Mosco »…

L’annonce d’Eurostat et de l’INSEE, ce mercredi 14 août, a le mérite d’une plus grande clarté. INSEE et Banque de France prévoyaient une croissance de +0,2% au deuxième trimestre 2013, elle est de +0,5%. C’est factuel. Cette hausse – la plus forte depuis les +1,1% du 1er trimestre 2011 – est portée par le rebond inespéré de la consommation intérieure – +0,3% contre -1% au trimestre précédent.

Pour Pierre Moscovici, ce résultat « amplifie les signes encourageants de reprise ». «Ce chiffre, supérieur aux prévisions disponibles, confirme la sortie de récession de l’économie française, que laissaient déjà entrevoir les dernières enquêtes de conjoncture et les chiffres récents de la production industrielle, de la consommation des ménages et du commerce extérieur, il amplifie les signes encourageants de reprise déjà soulignés précédemment», a ajouté le ministre dans un communiqué.

Si Pierre Moscovici a veillé à modérer ses propos, on sent bien que la tentation d’une certaine forme de triomphalisme n’est pas loin et on pressent déjà qu’il lui faudra tenir ses troupes une fois le pays sorti de sa torpeur aoutienne.

La mise en garde du commissaire

La voix de la raison se trouve – pour une fois – à Bruxelles, c’est celle du très finlandais – et très luthérien – commissaire aux affaires économiques, Olli Rehn qui s’est empressé de rappeler qu’il était bien trop tôt pour célébrer, fanfaronner…

« Oui, ces résultats un petit peu plus positifs qu’attendus sont les bienvenus – mais il n’y pas de place pour la moindre complaisance, » a-t-il déclaré. « J’espère qu’il n’y aura pas de déclarations prématurées d’autosatisfaction décrétant que ’la crise est terminée’. Pour ce que nous en savons, il reste encore des obstacles substantiels à dépasser : les chiffres de la croissance restent faibles et les signes de reprise demeurent fragiles. »

En effet, si l’Allemagne et la France ont agréablement surpris, l’économie espagnole s’est encore une fois rétractée – -0,1% sur le deuxième trimestre – et l’Italie a fait encore moins bien à -0,2%. -0,2% aussi, c’est le score des Pays-Bas tandis que le Portugal enregistre, pour sa part, le meilleur résultat à +1,1%.

L’hétérogénéité de la zone euro est plus que jamais problématique et elle exige, au-delà de la croissance, des réformes structurelles de grande ampleur que les pays concernés tardent à mettre en œuvre.

Le défi des réformes

Revenons à nos moutons… Une des raisons pour lesquelles les responsables politiques français auraient tort de manifester le moindre signe de triomphalisme tient au fait que la croissance n’est pas tout.

Pour réaliser des miracles économiques et sociaux, la croissance doit avant tout être durable et forte. +0,5%, cela ne correspond pas à une croissance « durable et forte ». C’est juste une éclaircie…

Une croissance « durable et forte » repose, avant tout, sur des réformes structurelles fortes, sur toutes ces réformes que la France, ses gouvernants successifs, n’ont que trop tardé à mettre en œuvre – et cela pour des raisons principalement politiques, politiciennes…

Combien de temps faudra-t-il donc encore répéter que la perspective d’une croissance durable et forte – et, avec elle, celle d’une baisse du chômage puis, ensuite, de la répartition des fameux « fruits de la croissance » – exigent une adaptation structurelle majeure de l’économie et de la société française – comme européenne ? Le premier indice de la capacité et de la détermination à agir du gouvernement viendra du projet de réforme des retraites qui doit être présenté en conseil des Ministres le 18 septembre.  

Alors François Hollande, son gouvernement et sa majorité ne pourront sans doute plus feindre de prétendre qu’avec la croissance, comme par magie, tous les problèmes de la France seront solutionnés. Si la reprise est là, si elle se confirme, l’exécutif ne pourra plus justifier de ne naviguer qu’à vue et il lui faudra alors faire la preuve qu’il a un plan, des idées, une politique pour le pays et donner du sens à ce « changement » qu’il avait promis pour « maintenant » il y a déjà longtemps.

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