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Pakistan: retour au pays à contre-courant

En raison de ce que le Département d’Etat américain estime être une véritable menace, le consulat des Etats-Unis de Lahore demeure encore fermé toute cette semaine. Etant donnée la relation problématique entre les Etats-Unis et le Pakistan, le Pakistan peut paraître, au premier abord, une destination indésirable pour des citoyens américains qui souhaitent émigrer.
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En effet, où que Sonia et Ammar Rizki se rendent, ils font face à la même question. « Pourquoi êtes-vous revenus au Pakistan ? » Que ce soit chez le médecin, à l’école, au supermarché, tous veulent savoir pourquoi deux jeunes Américains/Pakistanais avec un excellent travail, une maison au centre de Chicago et deux jeunes enfants ont choisi de retourner habiter dans la tempête qu’est le pays actuellement.

Incompréhensions

« Tout le monde pense que nous avons perdu nos postes, que nous n’avons pas réussi, que nous étions victimes de discrimination ou que nous allons prendre part à une entreprise familiale en pleine expansion », explique Ammar.

« Tout cela est faux. Nous sommes rentrées pour une seule raison – pour être plus proche de nos familles respectives. Pourquoi est-ce tellement difficile à accepter ? 

Peut-être parce que les personnes qui ont l’occasion de quitter le Pakistan plient bagage sans jamais regarder en arrière. Les troubles politiques, la violence ethnique, les enlèvements, les vols et l’instabilité du pouvoir n’aident en rien à la situation. Mais, la possibilité pour nos enfants de comprendre l’héritage de notre famille justifie le déménagement. »

Préparations

Le couple – une trentaine d’années – s’était préparé mentalement à un style de vie radicalement différent de ce qu’il était au Pakistan ou au cours des quinze dernières années passées à Chicago.

Ils se sont installés avec leur famille à Karachi, une ville réputée pour sa violence et ses crimes. « Je suis conscient que je ne peux pas aller à la banque quand je le souhaite ou encore conserver mon Smartphone », explique Ammar. « Je dois rester discret et ne pas attirer de l’attention, que ce soit à la maison ou dans la ville ».

Malgré les dangers à Karachi, cette jeune famille savoure le temps passé avec la famille proche et plus éloignée, ainsi que le sentiment d’appartenance, particulièrement pendant le mois du ramadan. Cette année, ils n’ont pas eu besoin de prendre de jour de congé pour l’Aïd al-Fitr et ont immortalisé le moment où les trois générations se sont rendues à la prière.

Un autre aspect positif de leur retour a été la proximité entre leurs enfants et leurs cousins – ce qui aurait été plus difficile trente années en arrière. Le langage n’est pas un obstacle, ils aiment la même nourriture et apprécient les mêmes divertissements. En revanche, lorsque les Rizki étaient enfants, dans les années 1970 et 1980, ils avaient très peu en commun avec leurs cousins américains. Ils espèrent que leurs enfants se souviendront de leur enfance au Pakistan et du temps passé avec leurs grands-parents au quotidien, contrairement aux brèves visites tous les deux ans.

Sans comparaisons

Lorsqu’on leur demande de comparer leur vie à Karachi et celle à Chicago, les Riski ont raison de dire que la comparaison n’est pas possible.

« On ne peut pas comparer un pays qui n’a que 60 années d’histoire avec un pays qui en a plus de 400 », affirme Ammar. « Mais j’ai de l’espoir. Le système judiciaire se renforce, nous avons des médias plus libres et le pays tente de se frayer un chemin dans la démocratie. »

Ils espèrent vivement que le nouveau gouvernement donnera un élan à l’économie et réduira le chômage. Ils espèrent également que milieu industrialiste du premier ministre Nawaz Sharif sera un bon présage pour l’économie. Les Rizki estiment que des politiques en faveur de l’investissement permettront d’améliorer le climat économique, qui, à son tour, réduira automatiquement le terrorisme, le crime et la pauvreté.

Tous deux sont confiants en une classe moyenne croissante et en un emplacement stratégique (voisins de géants tels que l’Inde ou la Chine). De plus, une génération plus jeune et mieux instruite équivaut à un avenir plein d’espoir.

« Il s’agit décidément d’une vie différente, mais que nous avons choisie en toute conscience », affirme Sonia. « Parfois, lorsque nous entendons des tirs dans la rue ou lorsque les écoles ferment à cause d’une grève, nous pensons à rentrer aux Etats-Unis. Mais lorsque, chaque soir, nous buvons notre thé au calme avec notre famille, nous savons précisément pourquoi nous sommes ici ».

* Kiran Ansari écrit pour le Chicago Tribune, le Daily Herald, le Halal Consumer et le Azizah Magazine. Elle vit avec son mari et ses deux enfants dans la banlieue de Chicago. Article écrit pour Common Ground News Service (CGNews).

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