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Attaque des shebab à Nairobi: un survivant raconte ce qu’il a vécu

[image:1,l]Satpal Singh a livré ce témoignage aux reporters de la BBC.

«Les gens tombaient sur le sol»

J’étais au centre commercial pour une réunion d’affaires – nous étions à l’étage à côté du café Java, près de l’endroit où les enfants participaient à un concours de cuisine. Vers 12h25 environ,  nous avons entendu de nombreux coups de feu et des bruits d’explosion en bas, près de l’entrée principale. J’ai cherché à savoir ce qui se passait.

J’ai vu des gens courir dans tous les sens, des coups de feu retentissaient partout, les gens tombaient sur le sol. (…). J’ai couru en bas et j’ai rejoint le premier étage : c’est là que je suis tombé sur un policier armé, près d’un pilier. Je lui ai dit que nous allions descendre pour voir ce que nous pouvions faire.

Face à face

Sur le chemin,  j’ai vu un homme somalien qui courait vers moi, depuis les escaliers. Il a tiré deux coups de feu dans ma direction. Il était vêtu d’une chemise blanche, il avait un énorme sac accroché sur son épaule droite et il ne portait pas de masque, j’ai donc été confronté à lui, face-à-face.

Je ne sais pas comment il a fait pour me rater. Son arme ressemblait à un gros fusil, un AK-47, je suppose.

«Ils tiraient sur n’importe qui»

Je pense qu’ils tiraient sur n’importe qui, sur ceux qui croisaient leur route ou qui essayaient de venir en aide aux personnes tombées par terre.

Quand il a tiré le premier coup j’ai juste esquivé rapidement. Il a tiré le second coup et il m’a manqué. Alors, j’ai couru vers le premier étage pour rejoindre le policier, pour que nous puissions retourner en bas et faire face à ce monsieur.

Quand je suis arrivé au premier étage, impossible de trouver le policier,  il était retourné à l’étage supérieur. Je me suis précipité là-haut, et j’ai poussé tout le monde dans le magasin Books First, là où se trouve la salle de cinéma. J’ai demandé à l’agent de sécurité de baisser les volets.

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Réfugiés sur le toit

Nous avons entendu les coups de feu se rapprocher : nous avons donc poussé les gens jusqu’au guichet du cinéma, et avons dit à chacun de se baisser.

Deux personnes sont arrivées et ont commencé à tirer dans toutes les directions. Ils avaient des bandanas attachés sur la tête qui nous empêchaient de voir correctement leurs visages, mais nous avons vu qu’ils portaient des sacs.

Nous avons demandé aux employés du cinéma s’il y avait des sorties de secours que nous pourrions utiliser. Ils nous ont menés à la salle de cinéma pour nous montrer où se trouvaient les fameuses sorties : nous les avons empruntées puis nous sommes allés sur la terrasse située sur le toit. Nous avons bloqué la porte avec des bouteilles de gaz et des briques, car il était impossible de fermer la porte de l’extérieur. 

Des femmes enceintes et des enfants

Je pense que [il y avait] plus de 40 personnes sur le toit – un policier qui avait enlevé sa chemise, pour des raisons de sécurité-,  des femmes enceintes, des enfants, et des gens de différents horizons.

Après 45 minutes environ, nous [avons regardé vers le] parking où l’émission de cuisine se déroulait. Les enfants avaient été tués, et nous avons aperçu des gens vers le café Java regroupés autour de la sécurité.

Nous avons donc décidé d’emprunter la sortie de secours sur le toit-terrasse menant au café Java. Sur le chemin, on pouvait entendre des coups de feu et des détonations. Dès que nous sommes arrivés à la cave nous avons commencé à pousser rapidement les gens à travers la porte menant dans la rue.

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Des victimes blessées par balles

(…) Une fois dehors, j’ai rencontré un ancien soldat britannique qui m’a dit qu’il y avait encore des gens pris au piège au dernier étage, là d’où nous venions. L’homme m’a dit qu’il avait fermé les yeux de quatre personnes qui ne bougeaient plus… ils étaient morts. Mais il y avait aussi des blessés qui avaient besoin d’aide.  

Les policiers étaient armés et possédaient des gilets pare-balles: nous [leur avons demandé] de venir avec nous à l’étage supérieur afin de secourir ces personnes en danger. Ils ne nous ont pas aidé, donc nous avons décidé d’aller là-bas à nouveau, par nous-mêmes.

Sur place, nous avons découvert des victimes avec des blessures par balles – ce qui explique le sang sur mes chaussures. Nous les avons transportés sur nos épaules jusqu’à ce que nous puissions regagner la sortie. C’est ainsi que nous avons pu sauver les femmes et les enfants blessés.

Que s’est-il passé dans mon esprit?  L’important à ce moment était de sauver les gens et de faire ce que je pouvais pour d’autres Kenyans.

A ce moment, vous êtes dans un tel état que vous ne vous souciez pas de ce qui vous arrive, mais vous voulez sortir de là, vous voulez contrôler la situation, vous voulez faire ce qu’il faut pour sauver les gens. A ce moment là , vous vous abandonnez à Dieu pour qu’il vous encourage, vous protège, vous guide et vous montre la voie à suivre.

>>Lu sur le site de la BBC

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