Vincent Peillon, ministre de l’Education Nationale, a présenté, lundi 9 septembre, les 15 articles de la «Charte de la laïcité», qui sera désormais placardée dans toutes les écoles maternelles, primaires, collèges et lycées publics de France. Pas d’exception pour les établissements d’Alsace-Moselle, pourtant ces trois départements – Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle – échappent au régime de la loi de séparation des Églises de l’État du 9 décembre 1905 et restent soumis au régime du Concordat de 1801 qui reconnait les cultes catholique, luthérien, réformé et israélite.
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Affichée dans tous les établissements scolaires publics de France, y compris dans ceux d’Alsace-Moselle, la «Charte de la laïcité», présentée par le ministre de l’Education Nationale, Vincent Peillon, le lundi 9 septembre, énonce les principes généraux de la Constitution, de la Déclaration des droits de l’Homme et de la loi de 1905, dite de « séparation des Eglises et de l’Etat », qui régissent les relations entre les religions et la République.
A première vue, son application en Alsace-Moselle semble quelque peu antithétique ; les trois départements concernés, rattachés à l’Allemagne de 1870 à 1919, restent en effet soumis au Concordat signé en 1801 entre Napoléon Bonaparte et Pie VII, un Concordat en vertu duquel les cultes catholique, luthérien, réformé et israélite sont reconnus et organisés par la puissance publique.
En 1905, l’Alsace-Moselle était allemande et a donc échappé à l’entrée en vigueur des dispositions de la loi de séparation des Églises et de l’État. De retour dans le giron national, les autorités locales et nationales ont convenu de préserver cette exception. En février dernier, le Conseil Constitutionnel a même validé cette exception la jugeant comme une tradition républicaine observée par tous les gouvernements depuis 1919.
Cours de religion donnés à l’école
Sous ce régime, les quatre religions reconnues y sont enseignées à l’école primaire et au collège ; il est néanmoins possible d’en être dispensé sur demande écrite formulée par les parents. Prôner la laïcité et interdire aux élèves d’invoquer une conviction religieuse pour contester une question au programme, dans des établissements scolaires où on y enseigne la religion, peut alors sembler contradictoire.
L’exception va plus loin… Aujourd’hui, seules les universités de Metz et de Strasbourg délivrent des diplômes de théologie. Aux niveaux inférieurs, ce sont des prêtres, pasteurs et rabbins, fonctionnaires du département et payés sur la base de salaires des professeurs des écoles qui assurent les enseignements religieux. Là encore, demander au personnel scolaire de ne pas manifester leurs convictions religieuses, quand certains de leurs collègues sont des religieux ordonnés, parait incompatible avec le régime spécial du département.
Une charte à double tranchant pour les musulmans d’Alsace-Moselle
Bien que l’Islam ne soit pas reconnu par le Concordat – réservé au catholicisme, au protestantisme et au judaïsme – les Musulmans d’Alsace-Moselle bénéficient d’avantages certains comparativement aux autres départements français. Le droit local permet en effet le financement de certains projets par la collectivité s’ils sont considérés d’intérêt général. Malgré les propos de Vincent Peillon qui ne souhaitait pas que la laïcité à l’école tourne à « l’obsession de l’Islam », cette charte vise clairement les problèmes entrainés par la religion musulmane, et pourrait alors réveiller des tensions communautaristes, plutôt réduites, jusque-là, en Alsace-Moselle.
A l’inverse, cette charte de la laïcité pourrait également réduire la fracture communautaire qui oppose les quatre religions reconnues aux autres cultes, et aux athées.