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Au New Jersey, le siège vacant du sénateur démocrate Frank Lautenberg, décédé en juin dernier, doit conduire à des élections sénatoriales anticipées : dans un mois, le républicain Steve Lonegan affrontera le démocrate Cory Booker dans cet État-clé de l’Est américain.
Et Cory Booker, maire de Newark depuis 2006, devrait sans surprise remporter le siège de cet État à la botte des sénateurs démocrates depuis plus de trente ans.
Un parcours exemplaire
Issu d’un milieu aisé, fils de cadres d’IBM – parmi les premiers cadres noirs de la firme américaine – Cory Booker a tout de l’homme politique ambitieux qui a réussi avec brio à gravir les échelons. Diplômé en sciences politiques à l’Université Stanford en 1991 et titulaire d’un master en sociologie l’année suivante, il part à Oxford suivre des cours de droit, puis à la prestigieuse université de Yale.
Il s’engage alors dans la vie associative et politique et remporte de manière inattendue un siège au conseil municipal de Newark en 1998. Afin d’attirer l’attention des autorités publiques sur les problèmes de drogue et de violence, Cory Booker entame une grève de la faim pendant dix jours et vit quelque temps dans une tente puis dans un camping-car à proximité des zones « chaudes » du trafic de drogue de la ville.
Étoile montante
En 2002, le jeune conseiller municipal se lance dans la course à la mairie. Mais face à Sharpe James, deuxième maire afro-américain de la ville, en place depuis plus de quinze ans, Cory Booker ne parvient pas à remporter l’élection, malgré un score de 47 %. Selon ses détracteurs, il n’était « pas assez noir » pour comprendre la ville… Quatre ans plus tard, il finit par remporter les élections, avec 72 % des voix et est réélu en 2010 à la tête de la ville pour un deuxième mandat.
Le charismatique maire de Newark jouit d’une popularité suffisante pour s’imposer probablement cette année comme futur sénateur du New Jersey. Il peut déjà compter sur le large soutien des Américains – il a plus d’1,4 millions de followers sur Twitter – et sur un cercle d’amis qui défie toute concurrence : Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, qui a reversé 100 millions de dollars pour les écoles du New Jersey, et la très médiatique Oprah Winfrey, qui n’a pas hésité à qualifier Cory Booker de « rock star ».
Le maire, ce héros
Sous le feu des projecteurs, le maire de Newark a su multiplier les actions héroïques. En 2012, il sauve une femme des flammes, refusant d’attendre les pompiers pour pénétrer dans la maison. « Je suis un voisin qui a fait ce que la plupart des voisins auraient fait, c’est-à-dire passer à l’action », déclare-t-il aux journalistes.
Il enchaîne les bonnes actions, ouvre sa maison à une douzaine de sinistrés de l’ouragan Sandy, et déclare sur Twitter qu’il va vivre, pendant une semaine, comme un Américain pauvre avec 4 dollars par jour pour se nourrir. Il souhaite ainsi contrer les critiques – émanant essentiellement de républicains – qui traitaient de « parasites » les bénéficiaires de bons d’alimentation.
Des actions qui ont amené l’animateur et humoriste Jon Stewart à le rebaptiser « super-héros de Newark », et l’actrice et animatrice Ellen DeGeneres à lui offrir un costume… de super-héros.
L’héritier d’Obama ?
Le profil et le parcours de Cory Booker n’ont pas tardé à interpeller nombre d’observateurs qui voient en lui le digne héritier de Barack Obama. À 44 ans, il ressemble sur plus d’un point au 44e président des États-Unis – et ce n’est pas qu’une question de chiffres. Plus qu’une histoire de couleur de peau, son goût pour le droit, sa grande popularité, son charisme indéniable et son parcours politique permettent la comparaison.
Il peut même compter sur le soutien de Barack Obama lui-même, qui n’a pas hésité à l’encenser lors de sa victoire aux primaires démocrates en août dernier : « Cory Booker a consacré sa vie à donner de l’espoir et des possibilités aux collectivités, là où il n’y en avait que trop peu », a déclaré le président américain dans un communiqué.
« Que ce soit comme étudiant travaillant à East Palo Alto [il s’occupait alors des jeunes en difficulté] ou en tant que maire de la plus grande ville du New Jersey, Cory a maintes fois relevé des défis difficiles, s’est battu pour la classe moyenne et ceux qui travaillent à le rejoindre, et a forgé des coalitions qui œuvrent pour le progrès – et c’est l’esprit qu’il va apporter avec lui à Washington. »
Les lignes de démarcation
Pourtant, Cory Booker, qui serait le quatrième sénateur noir élu s’il remportait les élections, a déclaré qu’il « ne voudrait jamais être le prochain Barack Obama », rapporte le site Politico. Il aurait même catégoriquement répondu « non » à la question de savoir s’il se voyait, un jour, à la Maison Blanche. Ajoutant – non sans malice ? – qu’il se voyait cependant bien « dans une maison peinte en blanc. »
Et à un journaliste qui tentait une fois de plus la comparaison avec le président américian, le maire de Newark a tout simplement répondu : « Obama est marié à une femme extraordinaire et a deux enfants. Moi, j’ai des plantes mortes et des champignons qui poussent dans mon frigo. »
Malgré ses nombreux points communs avec le président, Cory Booker avoue ses divergences. Dans une récente interview, il a ainsi déclaré que les acteurs « coupables » de la crise financière de 2008 devaient « absolument » aller en prison, alors que l’administration Obama n’a pas encore arrêté les hauts dirigeants de Wall Street. Il soutient également l’utilisation de la marijuana à des fins médicales, quand le président hésite encore sur sa légalisation. Cory Booker a également indiqué qu’il était « profondément sceptique » quant à l’engagement militaire des États-Unis en Syrie.
En attendant, il reste un mois au maire de Newark pour continuer à faire bonne figure lors des élections sénatoriales du New Jersey, qui se tiendront le 16 octobre prochain.