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Le débat ravivé autour du travail dominical et nocturne

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Quelques jours après que Sephora ait été condamnée à fermer après 21 heures un magasin, le rideau sera désormais également baissé chez les enseignes Castorama et Leroy Merlin dans quinze magasins d’Ile-de-France le dimanche.

Bricorama qui n’avait pas reçu d’autorisation pour ouvrir le dimanche a attaqué en justice les deux autres enseignes concurrentes estimant souffrir « d’un dommage imminent constitué par la perte de chiffres d’affaires et la perte de clientèle (…) au profit de ses concurrents Leroy Merlin et Castorama ». Le tribunal de commerce de Bobigny lui a donné raison estimant que les deux autres magasins de bricolage étaient « ouverts en violation flagrante de l’interdiction » du code du travail sur le travail dominical, et que Bricorama souffrait ainsi d’une « rupture d’égalité ».

Les salariés s’opposent aux syndicats sur le travail dominical

Ces décisions de justice ne font pas que des heureux : tandis que les syndicats se félicitent de ces victoires, une partie des salariés s’opposent à ces décisions et défendent le droit de travailler le dimanche, ou durant la nuit, en raison des avantages financiers et de la flexibilité horaire que cela procure. « C’est un coup de poignard » donné par les syndicats, dénonce l’une des vendeuses de Sephora, Inesco Sampiecro à l’AFP. Les salariés de Sephora ont alors décidé d’assigner en justice le syndicat qui a fait interdire le travail de nuit, et ceux de Leroy Merlin ont manifesté ce vendredi pour réclamer au préfet une décision annuelle permettant de travailler le dimanche.  

Depuis plusieurs années, les syndicats montent en effet au créneau contre les enseignes qui ouvrent le dimanche – journée de repos hebdomadaire commune. Le secrétaire général de la CGT Commerce Paris, Karl Ghazy, interrogé sur RTL le 26 septembre, a notamment avancé qu’il était « complètement illusoire de faire croire aux Français que si demain tous les magasins sont ouverts le dimanche, les autres gens ne travailleront pas. Il faudra bien faire tourner les crèches, les transports, les services de nettoyage… ». Il considère également que le travail de nuit est dangereux pour la santé « il raccourcit la durée de vie moyenne de trois à quatre ans ».

« Quadruple peine pour le pays », voici comment a réagi le patron du Medef, Pierre Gattaz face aux récentes décisions de justice. Il a jugé sur RMC ce vendredi 27 septembre, qu’elles pénalisaient les consommateurs, les salariés, les entreprises et l’emploi.

La loi actuelle sur le travail dominical « une vraie usine à gaz »

Le repos dominical est obligatoire depuis une loi du 13 juillet 1906. Et alors que le XXIe siècle a apporté moult changements dans nos rythmes de vie qui justifieraient au moins un tranchement clair sur le sujet, les législateurs français ont préféré lui concédé son lot d’exceptions, au point que personne ne s’y retrouve.

La loi UMP dite Mallié, en 2009, a finalement autorisé les commerces à ouvrir le dimanche, mais sous certaines conditions – zone touristique, périmètres de consommation exceptionnels, commerces alimentaires jusqu’à 13 heures…

Les enseignes de bricolage souhaiteraient notamment ouvrir le dimanche dans les mêmes conditions que les secteurs de l’ameublement et du jardinage. De plus, face à la concurrence du commerce en ligne, elles réclament un rééquilibre du marché.  Quant aux syndicats, ils reprochent à l’actuelle législation « d’augmenter les distorsions de concurrence », « d’être une vraie usine à gaz » – Karl Ghazy CGT. Par conséquent, qu’elle soit jugée trop restrictive par les patrons et les salariés, ou trop dérogatoire par les syndicats, la loi mécontente à peu près tout le monde.

Des politiques partagés sur le sujet

Nathalie Kosciusko-Morizet, en pleine campagne électorale pour les municipales de Paris en 2014, a qualifié le travail dominical de « manne économique » pour Paris, dans une interview accordée à Metronews. La candidate UMP ne souhaite pas pour autant « généraliser » le travail du dimance, mais envisage plutôt de « l’étendre ». Selon elle, il permettrait de créer 10 000 emplois supplémentaires. « Rendez-vous compte que les tour-opérateurs organisent l’exode des touristes le dimanche à Londres pour qu’ils fassent leur shopping ! ». Le député UDI de l’Eure, Hervé Morin, interrogé sur i-Télé le vendredi 27 septembre, a également estimé qu’il fallait à l’heure d’Internet, permettre à ceux qui le souhaitent de travailler le dimanche.

Du côté du Parti Socialiste, les avis sont plus partagés. Plusieurs députés se sont déclarés pour, comme le président de l’Assemblée Nationale, Claude Bartolone, et le président du groupe, Bruno Le Roux. En revanche, le ministre du Travail, Michel Sapin avait d’ores et déjà, le 23 mai dernier sur RTL, annoncé « refuser de grignoter par petits morceaux le repos dominical ».

Quant au gouvernement, il a indiqué à plusieurs reprises qu’il ne modifierait pas la législation sur le travail dominical.

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