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Les BRICS peuvent-ils prendre le pouvoir du G20?

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A Saint –Pétersbourg, ils sont arrivés avec des cahiers de doléances bien chargés, ceux qu’on appelle les BRICS n’ont que faire du conflit syrien ou de l’Affaire Snowden, qui concentrera l’attention des Etats-Unis, de la France ou encore du Royaume-Uni ou de l’Allemagne. Leur problème à eux, c’est la crise économique mondiale dont ils commencent sérieusement à souffrir.

Les BRICS veulent résonner les Etats-Unis

En effet, la rencontre des membres du G20 s’annonce tendue tant les monnaies de ces pays suivent une courbe descendante depuis le début de l’année. Alors que la roupie indienne a perdu un quart de sa valeur depuis le début de l’année, le réal brésilien a chuté de 15% tandis que le rouble russe a perdu 10% de sa valeur.

A l’origine de cette chute, les projets de la banque centrale américaine. Cette dernière se prépare en effet à réduire son soutien à l’économie mondiale incitant les investisseurs à revenir vers les Etats-Unis.

Face à la crise économique mondiale, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont montré leur force et leur résistance pendant ces dernières années. Mais aujourd’hui, la politique américaine provoque leur affaiblissement et ce G20 sera l’occasion pour les pays émergents de mettre les Etats-Unis en face de leur politique monétaire dangereuse.

C’est ainsi que l’Afrique du Sud a demandé, quelques jours avant l’ouverture de cette réunion, « une meilleure reconnaissance du fait que nous vivons dans un monde interconnecté » et a également mis en garde contre des décisions « basées sur les seuls intérêts nationaux qui peuvent avoir des conséquences graves sur les autres nations ».

Brésil, Russie, Inde et Chine sont regroupés en 2001 par un économiste de la banque d’investissement Goldman Sachs, Jim O’Neill, pour montrer que l’économie de ces quatre pays allait se développer rapidement, poussant les économies étrangères à investir. Dix ans plus tard, lors du troisième sommet des BRIC, l’acronyme devient BRICS avec l’ajout officiel de l’Afrique du Sud.

Au G20, le G7 décide

Mais au sein du G20, réunion annuelle de la puissance mondiale, c’est en fait le G7 qui dirige. Le club des pays les plus industrialisés de la planète a toujours le pouvoir entre ses mains et peine à l’ouvrir à ses partenaires de mondialisation.

Cette conclusion, le chercheur Leonardo Martinez-Diaz l’a faite il y a quelques années, en sélectionnant quelques sujets régulièrement abordés lors de ces réunions, tels que la libéralisation, les échanges et les mouvements de capitaux, la dette des pays du Sud etc.

Sur tous ces sujets, le G20 a régulièrement rendu public des communiqués révélant la prise de position des pays membres. Selon les résultats de l’enquête de Leonardo Martinez-Diaz, la grande majorité des communiqués du G20 ne reflètent que la position des pays du G7.

Plus important encore, lorsque l’avis des pays riches prévaut dans les négociations, cet avis et les décisions qui en découlent imposent aux pays émergents de lourds coûts d’adaptation, pourtant, lorsque le contraire se produit et que les pays émergents l’emportent, ces décisions ne touchent que peu aux intérêts économiques des pays riches.

Futures victimes de la crise ?

Les BRICS aurait donc une influence plus que limitée au sein du club des 20 plus riches du monde. Et pourtant, la crise économique mondiale n’est pas néfaste pour tous et si les BRICS commencent à pâtir de la crise des pays riches, ils ont également profité de ce déclin des grandes puissances.

Lors de la crise de 2008, les pays émergents sont largement venus au secours des Etats-Unis, de l’Europe ou encore du Japon dont les économies tremblaient.

Après une rapide récession et une aussi rapide reprise, les BRICS se sont trouvés en ordre de marche pour sauver l’économie mondiale. Et si ces mêmes économies craignaient que les systèmes financiers de ces pays émergents ne tiennent pas face au marasme mondial, ces derniers ont pourtant montré qu’ils savaient se montrer prudents et leurs réserves financières ont prouvé au monde qu’une économie émergente est une économie solide.

Toutefois, les experts restent encore, eux aussi, sur la véritable santé des BRICS. « L’histoire économique nous enseigne que la crise suivante vient en général de la région où applaudissements et autosatisfaction étaient le plus bruyants la fois précédente », explique ainsi Antoine van Agtmael, fondateur et ancien président de Ashmore Emm et auteur de The Emerging Markets Country pour le magazine Slate Afrique. « Si cela s’avère une nouvelle fois, le prochain choc économique viendra fort probablement des BRICS ».

La domination des BRICS n’est pas au programme

Mais en attendant cette chute, les BRICS prennent l’avantage et selon de nombreux observateurs, la Chine en tête devrait bientôt dépasser les Etats-Unis et devenir la première puissance mondiale.

D’après la Banque mondiale, c’est entre 2020 et 2030 que devrait se produire ce changement radical à la tête de l’économie mondiale.

Les BRICS sont de grands pays. A eux tous, ils constituent 40% de la population mondiale, 25% des territoires et environ 20% du PIB mondial. Ils contrôlent 43% des réserves de change mondiales et cette part ne cesse d’augmenter.

Leur place au G20 découlera naturellement de ce rôle de plus en plus puissant que les pays émergents jouent sur la planète. Et pourtant, certains mettent en perspective cette position de plus en plus centrale sur la planète de ces pays qui, il y a à peine quelques années, ne résonnaient qu’avec pauvreté.

« C’est vrai, les BRICS vont rester la principale source de croissance dans le monde de demain, comme c’est le cas aujourd’hui », explique ainsi Antoine van Agtmael pour Slate Afrique. « Ensemble, ils vont dominer l’économie mondiale au cours du siècle, comme l’Europe et les Etats-Unis en leur temps ».

Cependant, si Antoine van Agtmael voit la fin de la suprématie américaine ou occidentale, il estime également que la domination des BRICS n’est pas encore au programme.

« Ce qui est sûr en revanche, explique-t-il, c’est que la nette démarcation entre pays développés et ‘arriérés’ appartient au passé. Les multinationales occidentales cherchent à grandir au sein des BRICS, puisque la croissance est en panne dans leur marché intérieur. En parallèle, les grandes entreprises chinoises et indiennes s’épanouissent sur d’autres marchés émergents ou en Occident. Le sort économique des pays développés est donc plus que jamais lié à celui des pays en développement », conclut finalement Antoine van Agtmael.

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