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Une Indonésie dont nous sommes fiers

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Un rapport de l’institut Wahid, datant de 2012, relate 278 cas de violation des droits religieux des groupes minoritaires, particulièrement ceux des chrétiens et des groupes considérés comme déviants par la majorité musulmane sunnite, tels que les chiites et les ahmadiyyas (une communauté musulmane, fondée en Inde en 1889 par Ghulam Ahmad), violations perpétrées aussi bien par des acteurs étatiques que civils.

Garantir la liberté religieuse

L’une des raisons principales de cet état des choses est l’échec de l’administration indonésienne à faire respecter les lois qui garantissent la liberté religieuse à chaque citoyen, tel que l’Article 28E de la Constitution indonésienne, qui stipule, «chaque personne est libre de rendre grâce au dieu et de pratiquer la religion de son choix». 

Souvent, les responsables des violences brutales commises à l’encontre des groupes minoritaires ne sont reçoivent pas la juste peine que méritent leurs actions. Dans le cas de la tragédie de Cikeusik à Banten, au cours de laquelle un groupe de résidents locaux a tué trois membres de la communauté ahmadiyya en février 2011, la majorité des coupables n’a servi qu’une peine de prison de quelques mois malgré le sérieux de l’attaque, alors que la plupart des victimes et de leur famille attendent encore réparation. 

La diversité religieuse, un atout

L’Indonésie est bénie par une pluralité de religions et de croyances, un état des choses que nos pères fondateurs ont souhaité maintenir en acceptant laPancasila (la philosophie de l’état indonésien, qui consiste en cinq préceptes moraux) comme la fondement de l’état. La Pancasila intègre, accueille et reconnaît l’existence de valeurs universelles en chaque religion et en chaque foi en Indonésie. C’est, au côté de notre slogan national, Bhinneka Tunggal Ika (l’unité dans la diversité) – le fondement de notre tolérance religieuse.

Tout comme le président Susilo Bambang Yudhoyono la déclaré dans son discours d’état, le 16 août lors de la commémoration du 68ème anniversaire de l’indépendance de l’Indonésie, « l’esprit de Bhinneka Tunggal Ika est nécessaire afin de renforcer la tolérance et de prévenir les confrontations communautaires et la violence. »

Des progrès encourageant laissent entrevoir de l’espoir pour l’Indonésie. L’administration de la ville de Jakarta a refusé de répondre à la pétition demandant la démission de Susan Jasmine Zulkifli et une autre pétition, cette fois en faveur de la chrétienne à la tête d’une section électorale, a été émise. La police est parvenue à stopper les membres du « Islam Defender Front (FPI) » (front de défense de l’islam) qui s’apprêtaient à attaquer une mosquée ahmadiste à Cianjur, Java ouest, le 25 juillet 2012. Et après une période d’inaction du gouvernement, des Indonésiens chiites se préparent, dans le cadre d’un actuel effort de réconciliation entre les chiites et les résidents locaux sunnites de Sampang, à rentrer à la maison à Sampang, Madura (Java est), effort emmené par Abdul A’la Bashir, le recteur de l’institut d’état d’études islamiques Sunan Ampel Surabaya et qui semble bien progresser. 

Comment promouvoir le pluralisme ?

Cependant, en plus d’embrasser l’esprit de notre philosophie et de notre slogan nationaux, nous devons également prendre un certain nombre de mesures importantes afin de défendre et de promouvoir le pluralisme. 

En premier lieu, les lois et les règles discriminatoires en vigueur dans certaines provinces doivent être révisées et révoquées. Comme par exemple la règle du gouverneur de Java est (une règle qui a force de loi) interdisant les activités religieuses considérées comme déviantes et qui punit les personnes violant les normes religieuses et les pratiques définies par la majorité sunnite. 

En deuxième lieu, nous devons nous assurer d’une exécution des lois juste et ouverte. On dénombre beaucoup d’incidents au cours desquels des officiers de sécurité traitent les victimes de violence comme des coupables afin de justifier des évacuations et des déplacements plutôt que de servir légitimement la justice en poursuivant en justice les coupables. 

Et enfin, en troisième lieu, nous devons garantir l’absence de discrimination basée sur la foi dans le service public. Les fonctionnaires ne doivent pas laisser leur croyance religieuse personnelle influencer la façon qu’ils ont de traiter et de servir les citoyens qui ne partageraient pas leur croyance. Comme la loi 43/1999 de l’Ordonnance sur le service civil le déclare, « [l’] appareil d’état doit offrir un service civil professionnel, honnête, juste et équitable.»

Un certain nombre d’organisations ont pris des mesures afin d’aborder ces problèmes, et le gouvernement devrait plus souvent avoir recours à leur assistance.

Au cours des dernières années, Kontras, une organisation qui prend la défense des personnes disparues et des victimes de violences, a donné des cours aux forces de police et a animé des discussions sur les principes de protection de la liberté de religion.

Plusieurs organisations travaillant dans le secteur de la liberté religieuse telles que l’institut Wahid, l’institut Setara, le «Human Rights Working Group» (groupe de travail des droits de l’homme) et la «Indonesian Legal Aid Foundation» (fondation indonésienne d’assistance légale) ont organisé des audiences et des discussions avec le gouvernement et les autorités de sécurité au sujet des discriminations perpétrées à l’encontre des minorités religieuses. 

Il y a encore beaucoup à faire afin de regagner notre dignité en tant que nation embrassant sa diversité et capable de coexistence pacifique. 

* Alamsyah M Dja’far est chercheur à l’institut Wahid à Jakarta, une organisation dédiée à la promotion de la paix et du pluralisme de l’islam, et donne des cours au « Fahmina Institute for Islamic Studies » à Cirebon, Java ouest. Article écrit pour Common Ground News Service (CGNews).

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