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Affaire Léonarda: quelle mauvaise blague, monsieur le Président

Si, on veut bien persister à le croire, le ridicule ne tue pas, il peut être fatal politiquement – à plus ou moins haute dose. Ridiculisé, François Hollande l’a été au cours de ces derniers jours par la presse européenne en particulier pour – on s’en doute – sa gestion de l’affaire Léonarda, une gestion calamiteuse.

Calamiteuse sur le fond que cette offre présidentielle d’un retour en France de la seule jeune Kosovare sans sa famille, calamiteuse sur la forme que cette intervention mal cadrée – dans tous les sens du terme – depuis l’Élysée samedi en milieu de journée. Tout a été dit, est-ce bien utile d’en rajouter…

L’insoutenable légèreté de l’inerte

Ménager la chèvre et le chou, rechercher le plus petit dénominateur commun entre des positions opposées et tenter de bâtir dessus les plus vastes coalitions, François Hollande a longtemps montré qu’il savait faire. C’est ainsi qu’il a dirigé, plus de dix ans, le Parti socialiste et a su établir, discrètement, les conditions de son succès aux primaires citoyennes de 2011. On ne dirige pas un pays comme un parti et, aujourd’hui, le seul talent dont semble être en mesure de faire preuve le président de la République est un autre talent, tout aussi rare, celui de prendre des décisions et de les saper en même temps.

Peu importe qu’il dégringole dans les sondages au point de battre tous les records d’impopularité, peu importe que – selon les rumeurs – certains, pas forcément éloignés de la tête de l’État, puissent commencer à se poser la question de la capacité de François Hollande à aller au bout de son mandat sans tenter un coup politique – du type dissolution-cohabitation – qui pourrait ouvrir la voie à une réélection façon Mitterrand ‘88, et plus encore Chirac ‘02…

Peu importe ces discussions de cour – ou de basse-cour plutôt – car il y a plus grave. Quand, pendant un week-end entier, la presse internationale se gausse de l’incompétence, de la maladresse, de l’affaiblissement du chef de l’État français, c’est la France, la France toute entière, qui en pâtit. Et le responsable est coupable.

Responsable et coupable

François Hollande est coupable de s’être emberlificoté, une fois de plus, dans une tentative, vouée par définition à l’échec, de satisfaire les deux lignes qui, prétendument, cohabiteraient au sein du gouvernement et de la majorité, l’une humaniste et l’autre moins, l’une bien-pensante et l’autre moins, l’une attachée au respect stricte de la loi et l’autre laxiste…

François Hollande est coupable de s’être laissé entrainer dans un « Waterloo » de communication. Mais à qui donc le président de la République doit-il de s’être trouvé en position de voir, sur tous les écrans de télévision, une jeune Kosovare remettre en cause ses choix et refuser son offre ? Si c’est au même – ou à la même – que celui-ci doit aussi l’enregistrement de sa prestation télévisée, espérons qu’une ou des têtes tombent…

Mais, par-dessus tout, François Hollande est coupable d’avoir affaibli – ridiculisé – la position de la France à quelques jours d’un Sommet européen précisément consacré à la question essentielle de la gestion de l’afflux – en apparence de plus en plus incontrôlable – de immigrés clandestins aux confins de l’Europe. On imagine ce qu’auront en tête ses interlocuteurs européens lorsque François Hollande présentera la position de la France.

La NSA n’y suffira pas

Stratégie bien connue… Face à la bourde – a fortiori diplomatique -, rien de tel que de tenter d’ouvrir un contre-feu. Dans un premier temps, certains ont tenté de faire porter la responsabilité aux chaînes d’information – en particulier, celles en continue – qui avaient dépêché des équipes pour recueillir en live la réaction de Léonarda aux propos présidentiels. Certes, on peut douter de la validité du choix éditorial qui consiste anticiper un duplex de Mitrovica en ces circonstances, on peut dénoncer le sensationnalisme d’un choix qui consiste à placer sur le même plan – ou presque – la parole présidentielle et celle d’une mineure étrangère. Mais l’Élysée n’aurait eu qu’à arrêter une ligne qui ne permettait aucune réaction, une ligne de fermeté, le seul rappel qui vale, celui de la loi – et les efforts de nos confrères eurent été vains.

Deux jours après, la France tente de redorer son blason sur la scène internationale en annonçant une plainte dans l’affaire des écoutes par la NSA. Le mal diplomatique est fait et ce ne sont pas quelques cris d’orfraie qui donneront l’impression qu’il y a un pilote, un pilote breveté dans l’avion France.

Qu’en pense Mademoiselle Léonarda, Monsieur le président de la République ?

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