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Au Pakistan, l’éducation des filles est un combat permanent

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Le sort de Malala Yousafzai, cette jeune Pakistanaise que les talibans ont tenté d’assassiner l’année dernière et qui sera peut-être bientôt prix Nobel de la paix, a replacé sous le feu des projecteurs la difficile situation des jeunes filles pakistanaises qui souhaitent bénéficier d’une éducation.

Des chiffres de plus en plus alarmants

Malala Yousafzai, qui vient de sortir une autobiographie, a fait de l’éducation des jeunes filles son combat, dans un pays où l’analphabétisme bat des records.

Selon les chiffres de l’Unicef, entre 2007 et 2011, 61 % des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans étaient alphabétisées. Un chiffre qui correspond au taux de fréquentation des écoles primaires par les filles qui, sur la même époque, est de 62 %.

C’est à la fin de l’école primaire que les jeunes filles désertent en masse les écoles. En effet, le taux de scolarisation des jeunes filles dans le secondaire, selon des chiffres mesurés entre 2008 et 2011 est de 29 %.

Les statistiques officielles publiées par le ministère fédéral de l’Education du Pakistan sont encore plus alarmantes. Selon ce dernier, le taux global d’alphabétisme est de 46 %, tandis que seulement 26 % des filles savent lire et écrire. D’autres sources, citées par l’Unesco dans un rapport de Pakistan Press International, indiquent que le taux global d’alphabétisme est de 26 % et celui des filles et des femmes de 12 %.

L’Islam et la culture pachtoune contre l’éducation des filles

« Il y a 163 000 écoles primaires au Pakistan, dont à peine 40 000 accueillent des filles », écrit Aamir Latif journaliste pour le Pakistan Press International, dans un témoignage publié par l’Unesco.

« De même, sur un total de 14 000 collèges d’enseignement secondaire et de 10 000 lycées, 5 000 et 3 000, respectivement, sont réservés aux filles […]. Il existe environ 250 établissements d’enseignement supérieur pour filles et deux facultés de médecine pour femmes dans le secteur public comprenant 125 districts. Quelque 7 millions de filles de moins de 10 ans vont à l’école primaire, 5,4 millions âgées de 10 à 14 ans vont au collège d’enseignement secondaire et 3 millions vont au lycée. Environ 1,5 million et 0,5 million de filles, respectivement, vont dans des lycées / établissements d’enseignement supérieur et des universités », explique-t-il encore.

Un bilan alarmant pour un pays qui, malgré certains efforts, ne parvient pas à redresser son niveau d’éducation tant les barrières sociales et culturelles sont nombreuses. Qu’il s’agisse de l’islam radical ou de la mentalité pachtoune.

C’est encore en milieu rural que cette situation est la plus grave, là où ces mêmes obstacles culturels sont les plus grands.

Souvent, c’est la religion qui s’oppose directement à l’éducation des jeunes filles. C’est notamment le cas dans les tribus du Nord où la pratique de l’islam – qui concerne 96 % de la population – interdit aux parents d’envoyer leurs filles à l’école.

Dans le Khyber Pakhtunkhwa et au Baluchistan, le taux d’analphabétisme se situerait même entre 3 % et 8 % chez les femmes.

La fuite des écoliers des zones tribales

Depuis la tentative d’assassinat de la jeune Malala Yousafzai, bien des choses ont changé. Dans la région dont elle est native et où elle a été scolarisée, la médiatisation de la jeune fille n’a pas agi en faveur d’une évolution des consciences ou des mœurs, tout au contraire. Les attaques des talibans se sont multipliées et face au danger, les parents désireux de scolariser leurs enfants ont été contraints de faire des choix.

Morgane Pellennec, correspondante au Pakistan pour le quotidien La Croix, témoigne de cet exode scolaire qui a fait le quotidien de nombreuses familles de cette région frontalière de l’Afghanistan.

Près de 400 écoliers vivant dans ces zones tribales auraient quitté leurs familles pour être scolarisés dans la province du Khyber Pakhtunkhwa. La menace islamiste ne faisait pas tout : pour les familles, il fallait aussi échapper au manque d’infrastructures et aux tirs de drones.

Travailler pour nourrir sa famille

Autant que la culture et la religion, c’est le travail qui est parfois responsable du départ précipité des petites Pakistanaises de leurs écoles. En effet, certains enfants sont forcés de quitter les bancs de l’école pour subvenir aux besoins de leur famille.

« Les enfants travaillent bien souvent pour survivre ou permettre à leur famille de survivre », explique ainsi Olivier Soret fondateur de l’ONG Humanium. « Réduire le travail des enfants, c’est aussi créer des alternatives pour que les parents puissent subvenir aux besoins de leurs enfants par eux-mêmes. Si les familles ont un revenu suffisant pour s’occuper de leurs enfants et leur assurer une éducation, ceux-ci vont à l’école et non au travail », explique-t-il encore.

Selon les chiffres de l’Unicef, 17,6 % des enfants pakistanais travailleraient pour faire vivre leur famille.

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