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Des camions écoles pour scolariser les Roms migrants

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JOL Press : Quelle est la mission de l’antenne scolaire mobile ?
 

Julien Rabenez : L’association Aset-93 s’est fixé comme objectif la scolarisation des enfants dits tziganes, terme qui regroupe les Roms migrants issus des pays européens, comme la Bulgarie et la Roumanie, mais également la population française des gens du voyage. 

Les antennes scolaires mobiles ne représentent qu’une partie des activités de l’association, puisqu’il y a également un travail de médiation ainsi que des cours dispensés dans des classes ordinaires. Ces camions mobiles appartiennent au ministère de l’Education nationale et ont été créés, à l’origine, pour les gens du voyage, qui avaient des difficultés d’accès à l’école en raison de leur mode de vie itinérant. Ces antennes se sont depuis adaptées aux difficultés des Roms migrants, du fait de l’instabilité de leur lieu de vie, étant donné qu’ils occupent illégalement des terrains et se font expulser. Les écoles mobiles permettent de compenser un peu cette mobilité.

JOL Press : Ces antennes scolaires mobiles sont-elles un tremplin vers des classes classiques ?
 

Julien Rabenez : C’est effectivement notre objectif. Aset 93 ne s’inscrit pas dans la durée. Nous sommes surtout un dispositif passerelle pour faire le lien avec l’école ordinaire. Les enfants sont répartis sur trois classes dans le camion école : une classe maternelle, une primaire et une collège. Je m’occupe de l’antenne scolaire mobile du primaire avec des enfants de 6 à 10 ans. Nous faisons l’apprentissage de la lecture, de l’écriture, de la numération, etc. Ce système fonctionne. Pour preuve : depuis le début de l’année sur un terrain où j’avais une bonne dizaine d’enfants, déjà deux ou trois enfants des gens du voyage ont été scolarisés dans des classes ordinaires et d’autres sont sur liste d’attente.

JOL Press : Ce type d’école marginale est-il développé en France ?
 

Julien Rabenez : Il existe une trentaine d’antennes scolaires mobiles en France. Ces classes sont vraiment des outils pour favoriser la scolarité normale des gens du voyage et des Roms migrants. Il ne s’agit pas de classes à part, de classes ghettos où l’on fait de la ségragation. 

JOL Press :  Comment s’organisent les classes ?
 

Julien Rabenez : Les cours sont tous aux normes de l’Education nationale. Nous suivons le programme basique avec des évaluations. Mais nous devons nous adapter aux élèves. Du fait de leur mobilité, il y a un grand retard. Les gens du voyage s’inscrivent peu dans notre scolarisation ordinaire. La plupart des Roms migrants ont quant à eux été scolarisés dans leurs pays d’origine, mais ils enregistrent tout de même des lacunes en raison de leurs difficultés à s’installer sur le territoire français. Nous essayons de pallier ce retard avec nos outils. Grâce au petit effectif – 10 élèves par classe – nous pouvons faire de la différenciation et nous adapter au niveau de chacun. 

JOL Press: Où est-ce que les camions de l’Aset 93 dispensent les cours ?
 

Julien Rabenez : Nous nous implantons sur certains secteurs du département de Seine Saint-Denis en fonction de la période de l’année, en sachant que les gens du voyage sont plutôt présents du mois d’octobre au mois de mai. Les Roms migrants sont en revanche présents tout au long de l’année et occupent quant à eux uniquement des implantations illégales. Nous faisons donc classe sur des terrains de transition, à Bobigny, à la Courneuve, ou encore à Aubervilliers où des espaces désignés par les communes sont tolérés.

JOL Press : Combien d’enfants encadrez-vous ?
 

Julien Rabenez : La préfecture a recensé environ 7 000 personnes migrantes, roumaines et bulgares, sur le département de la Seine Saint-Denis l’année dernière. Un récent récensement, datant du mois de septembre a relevé 3 000 personnes, dont un tiers d’enfants. Nous ne pouvons pas suivre les 1 000 enfants : nous essayons de faire du qualitatif et de construire une scolarité avec les familles.  

JOL Press : Les antennes scolaires mobiles sont agréées par l’Education nationale. Etait-ce vraiment son rôle de soutenir ces structures ?
 

Julien Rabenez : Oui, je pense que c’est à l’Education nationale de prendre en charge le problème de la scolarité. L’école est obligatoire, c’est un droit. Il faut donc donner la possibilité à tous les enfants d’y accéder. Et lorsqu’il y a des difficultés, il faut s’adapter en inventant des outils, comme l’antenne scolaire mobile. C’est un outil parmi d’autres, il n’est pas exclusif. Au départ, ces classes mobiles ont été établies dans le privé, initiées par des frères chrétiens. C’est une démarche altruiste au départ : puisque tous les enfants n’ont pas la possibilité d’aller en classe, pourquoi l’école ne pourrait-elle venir à eux ? L’école est un devoir, mais c’est aussi un droit. 

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