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Ecomouv’, cette société qui empêche toute suppression de l’écotaxe

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Mardi 29 octobre, Jean-Marc Ayrault annonçait « la suspension de la mise en œuvre de l’écotaxe », dans un contexte de colère du monde agricole. « L’écotaxe doit être corrigée, mais elle doit être mise œuvre, car elle est nécessaire », ajoutait-il aussi vite. La suppression, demandée par les syndicats d’exploitants agricoles, n’est pas envisagée. Le gouvernement ne le peut pas.

« Le contrat qui a été signé par Madame Kosciusko-Morizet (alors ministre de l’Écologie, ndlr), par Monsieur Baroin (ministre de l’Économie), par Madame Pécresse (ministre du Budget) à une société qui s’appelle Ecomouv’, si on devait le délier, ça coûterait 800 millions d’euros, voilà ce qu’on nous a laissé et voilà pourquoi on ne pas revenir en arrière », a déclaré Stéphane Le Foll, lundi 28 octobre, sur i>Télé.

Quel contrat ?

Le 20 octobre 2011, la société Ecomouv’ signait avec le ministère de l’Écologie et des Transports et le ministère du Budget un « contrat de partenariat relatif à la mise en place de la taxe poids lourds ». À l’époque, Autostrade per l’Italia, société d’autoroutes italienne actionnaire d’Ecomouv’ à hauteur de 70 %, estimait à 2,8 milliards d’euros la valeur de ce contrat d’une durée de 13 ans et 3 mois. Pour avoir un ordre d’idée, un portique kilométrique coûterait à lui seul entre 500 000 et 1 million d’euros pièce. Or ce sont 173 de ces structures métalliques qui doivent être installées sur les routes nationales non payantes et les départementales qui contournent les axes payants.

Le reste du capital de la société Ecomouv’ est détenu par des groupes français : Thales (11 %), SNCF (10 %), SFR (6 %) et Steria (3 %). L’opérateur SFR doit permettre de connecter les équipements embarqués à bord des poids lourds. Selon Bercy, cité par Les Echos, le contrat signé ne prévoit pas de pénalités en cas de suspension. En revanche, la suppression pure et simple de la taxe coûterait à l’Etat un milliard d’euros sur un an, dont 800 millions à payer immédiatement, selon le ministère de l’Agriculture. Cette somme correspond à ce qui a déjà été dépensé par cette société pour le développement, l’exploitation et la maintenance du système de perception et de contrôle de l’écotaxe.

Quel manque à gagner pour l’Etat ?

« J’ai décidé la suspension de la mise en œuvre de l’écotaxe pour nous donner le temps nécessaire d’un dialogue au niveau national et régional », a expliqué Jean-Marc Ayrault. « Suspension n’est pas suppression, et ce dialogue aura pour objectif d’améliorer les dispositions propres aux filières agricole et agroalimentaire, mais aussi celle relative aux régions les plus périphériques, et, bien entendu, la Bretagne. » Si l’Etat ne devra pas payer de pénalité pour avoir suspendu l’entrée en vigueur de l’écotaxe, cette décision devrait lui coûter environ 100 millions d’euros de manque à gagner par mois. 

Les recettes de la taxe collectées sur le réseau routier national seront, dans le détail, affectées à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et celles collectées sur les réseaux locaux, déduction faite des coûts de gestion, iront aux collectivités territoriales gestionnaires des voies taxées.

« Il y a un énorme problème démocratique dans la manière dont le gouvernement a cru pouvoir signer une clause de résiliation avec cette société de 800 millions d’euros », a estimé Marine Le Pen, sur France Inter, mardi 29 octobre. Selon Le Figaro, Ecomouv’ estimerait ses propres recettes à près de 2,8 milliards d’euros sur les onze années et demie de la durée d’exploitation et de maintenance du dispositif, et les investissements à 650 millions d’euros.

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