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La taxe de l’EBE: un nouvel objet de discorde entre l’exécutif et le patronat

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Non inscrite à l’agenda officiel du Premier ministre, la rencontre entre Jean-Marc Ayrault et le président du Medef, Pierre Gattaz du lundi 14 octobre à Matignon, a permis aux deux interlocuteurs de se dire, de manière franche et directe, les choses. Alors que Pierre Gattaz réclamait un rendez-vous avec le Président, François Hollande la semaine dernière, il a dû se contenter d’une discussion officieuse avec le Premier ministre. 

Le mouvement patronal est consterné par l’improvisation fiscale du gouvernement. « Comment peut-on travailler avec eux alors qu’ils sont aussi imprévisibles ? » assène le siège du Medef. Quant à l’exécutif, il semble excéder par le président du Medef qui souffle à la fois le chaud et le froid.

La créativité fiscale du gouvernement

Tout a commencé le 2 septembre dernier, lorsque Bercy a proposé de manière inédite, une baisse de deux points du taux de l’impôt sur les sociétés aux entrepreneurs, rapporte le Journal de Dimanche. Seulement cela implique la création d’un nouvel impôt, et le gouvernement en a donc proposé un nouveau sur l’excédent brut d’exploitation. Et alors que les négociations commençaient entre le ministère du budget et le patronat, Pierre Gattaz y a mis brutalement un frein en expliquant qu’il n’était pas question d’assister à une nouvelle augmentation fiscale.

Après l’avoir inscrit dans le projet de loi de finances, le gouvernement a finalement reculé juste avant le lancement des débats à l’Assemblée, et a remplacé l’EBE par une surtaxe temporaire de l’impôt sur les sociétés, ne comptant pas renoncer aux 2,5 milliards d’euros de recettes générés par la taxe EBE. Au final, l’inverse de ce qui était recherché au départ par l’exécutif.

La querelle entre le gouvernement socialiste et le patronat connait également d’autres précédents. La politique fiscale du gouvernement manque de lisibilité et de cohérence pour le Medef. Alors que d’un côté l’exécutif multiplie les projets de taxe – contribution des entreprises à la réformes des retraites, écotaxe pour les poids lourds, hausse du forfait social(…) – et remet en cause le statut des auto-entrepreneurs, de l’autre, il donne l’impression d’entendre les arguments du patronat. Par ailleurs, ses dernières tergiversations sur le travail dominical n’ont pas permis d’établir une ligne claire.  

Des cartons jaunes culottés des entrepreneurs

Les patrons réunis par le Medef et la CGPME à Lyon mardi dernier, ont brandi des cartons jaunes symboliques à l’encontre de François Hollande. Ce ras-le-bol exprimé est certainement un peu surjoué. Après la reculade de l’exécutif sur l’EBE, les organisations patronales imaginent  qu’elles pourront obtenir d’autres concessions de la part du gouvernement.

L’exécutif a peu gouté à ces cartons jaunes, alors même qu’il réduit de vingt milliards d’euros le coût du travail avec la mise en place du Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Une première dans l’histoire de la Ve République, assumée par un gouvernement socialiste.

Les humeurs de Pierre Gattaz irrite également l’exécutif : « Que Gattaz soit un opposant n’est pas un problème. Qu’il ne soit pas stable, l’est ». Selon l’Opinion, le Premier ministre souligne se battre « tous les jours contre le défaitisme, contre l’esprit ambiant de démobilisation »« On ne peut pas battre l’esprit du déclin, la montée du Front national, et l’impression de déclassement si on n’est pas capable de montrer que la France à la capacité de réussir » ajoute-t-il. 

Xavier Niel, un entrepreneur à contre-courant

Le patron de Free, Xavier Niel, a livré un tout autre jugement, le vendredi 11 octobre, à Sciences Po. « La France, c’est un paradis fiscal », s’est-il exclamé, indiquant que la perception des entrepreneurs de la fiscalité française était « délirante ». « Ce n’est pas l’image que vous en avez, mais l’environnement fiscal réel est favorable à la création d’entreprise », a souligné la 10e fortune de France.

« On est dans un pays fantastique, un mélange entre la folie latine, et la rigueur anglo-saxonne. Ce n’est pas la peine de prendre l’avion. On peut faire quelque chose en entreprenant, ici, à Paris », a-t-il conclu.

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