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Les entrepreneurs de gauche sont-ils schizophrènes?

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Oui, on peut être un employé aux revenus modestes et voter à droite ; oui, on peut être un entrepreneur à succès ou en échec et voter à gauche. 

Reste à comprendre pour les citoyens de quelle gauche on parle, et pour la gauche de quel projet de société on rêve. Dans le fond, c’est plus la question essentielle de la confiance que chacun place dans le politique et dans sa capacité à affronter les problèmes. 

Mais en France aujourd’hui le politique ne sait pas traiter l’économique, il agite les bras, puis les baisse, à droite comme à gauche. Comme un volatile.

Extraits de La gauche a mal à son entreprise d’Olivier Mathiot (Plon – septembre 2013)

Pierre Bergé, Matthieu Pigasse, Serge Weinberg, Pierre Pringuet, Guillaume Pepy, Stéphane Richard, Jean Peyrelevade ou Louis Gallois… Des grands patrons qui n’ont pas hésité à associer leur nom à la gauche. On constate souvent que les électeurs de gauche sont des fils d’électeurs de gauche. Il est difficile de voter différemment de ses parents. Mais on sait bien que la tendance naturelle, le confort et la bedaine aidant, on décompte plus de basculements de la gauche vers la droite que l’inverse.

Rappelez-vous cette boutade de George Orwell : « Si l’on n’est pas communiste à vingt ans, c’est qu’on n’a pas de cœur. Si on l’est encore à quarante, c’est qu’on n’a pas de tête » !

La question qui nous est posée par les idéologues réfractaires de la gauche canal historique raisonne et résonne de manière glaciale : l’entrepreneuriat est-il une valeur de gauche, si l’on considère le caractère essentiellement individualiste de l’aventure entrepreneuriale ?

Pour autant, depuis l’élection de François Hollande, on a entendu plusieurs voix de « patrons de gauche » qui ont cherché l’oreille du gouvernement et qui ont publiquement exprimé des opinions d’autant plus courageuses qu’ils devaient se déclarer comme électeurs de gauche et briser le secret des urnes afin que leurs « voix » portent plus loin. Je me permets d’en citer trois dont les idées m’ont en partie guidé, et qui sont de véritables entrepreneurs, de la trempe de ceux qui ont pris des risques. […]

[image:2,s]En réalité, si le clivage devait se faire sur la fortune comme unique critère de distinction entre la droite et la gauche, le raisonnement par l’absurde conduirait à penser que l’accroissement de la paupérisation en France devrait immanquablement conduire à un raz-de-marée pour la gauche. Pourtant l’alternance est tout de même assez bien respectée depuis plusieurs décennies.

Il ne s’agit donc pas de définir le vote comme un acte communautaire de défense des intérêts de sa propre catégorie contre ceux des catégories concurrentes, mais bien de défendre une ambition : un bulletin de vote pour une idée de la société, une vision du « vivre ensemble ». Cela m’apparaît tellement évident que le fait qu’on me pose la question si souvent m’interroge gravement sur le déclin de la France.

Encore très récemment, en mai 2013, alors que j’étais invité à réagir sur l’intervention d’Arnaud Montebourg bloquant la vente de Dailymotion par Orange à Yahoo, six mois après la fronde des Pigeons, je me suis vu taxer d’« arrivisme » sur les réseaux sociaux. Un des tweets les plus créatifs, émanant d’un militant du Front de gauche, était celui-ci : « Les pigeons, ça vient manger dans ta main quand c’est à terre, puis ça te chie dessus une fois envolé. » C’est pour vous, mesdames et messieurs de cette gauche d’avant, que j’ai voulu écrire ce livre, pour vous inviter à réviser le manuel de la petite entreprise.

Donc, oui, on peut être un employé aux revenus modestes et voter à droite, comme, oui, on peut être un entrepreneur à succès ou en échec et voter à gauche.

Reste à comprendre pour les citoyens de quelle gauche on parle ; et pour la gauche de quel projet de société on rêve. Dans le fond, c’est plus la question essentielle de la confiance que chacun place dans le politique et dans sa capacité à affronter les problèmes.

Mais, en France, le politique aujourd’hui ne sait pas traiter l’économique, il agite les bras, puis les baisse, à droite comme à gauche. Comme un volatile…

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Olivier Mathiot est co-fondateur de PriceMinister, désormais filiale française du groupe japonais Rakuten, et un des porte-parole du mouvement des « Pigeons ». Il est également un business angel et co-rédacteur du Manifeste des entrepreneurs pour un appel à concertation immédiate  qui a recueilli plus de 3 000 signatures adressées à François Hollande.

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