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Banques françaises: rating maintenu malgré la purée de pois

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Standard & Poor’s a mis les pieds dans le plat. Le 8 novembre dernier, l’agence a annoncé la dégradation de la note souveraine de la France – de AA+ à AA – mais, contre toute attente, elle n’a pas touché au rating des banques françaises.
 
Et pour cause, « le gouvernement français continuera de soutenir ses banques systémiques en cas de crise financière » a avancé S&P avec son flegme habituel. Si l’épargnant peut se frotter les mains, cette conclusion n’a rien de rassurant pour le contribuable hexagonal.
 
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Car le numéro un mondial de la notation, a confirmé ce que tout le monde savait déjà…
 
Primo, une nouvelle crise financière n’est pas exclue et secundo, rien n’a changé dans les relations entre les banques et les Etats. Si, crise il y a, c’est le gouvernement qui mettra, une fois encore, la main à la poche. Autrement dit, tout l’arsenal réglementaire mis en place pour éviter le chantage au « too big to fail », reste pour l’instant inopérant.

Rien à craindre… avant 6 mois ou un an

Qu’on se rassure,  à très court terme, il n’y aurait  pas péril en la demeure. Les banques françaises ont l’air en bonne santé. « Elles continuent à afficher des performances correctes, bien en ligne avec les exigences de solidité, des provisions pour risques en baisse et des performances conformes aux prévisions » explique l’ancien directeur général du Crédit Agricole, Georges Pauget, reconverti en consultant au sein de sa société Economie Finances & Stratégie.
 
Rien à craindre donc, à horizon de 6 mois à un an, d’autant que la grande inspection des actifs bancaires par la BCE n’augurerait pasde  mauvaises surprises chez les françaises.  Ce qui reste évidemment à prouver.

Le nettoyage des bilans est terminé

Les analystes qui ont appuyé le redressement des cours de Bourse de BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole SA ou Natixis, en 2013, partagent en tout cas cet avis. Les établissements français ont quasiment terminé leur nettoyage de bilan, la banque de détail tient le choc.
 
Et surtout, on n’ose à peine le dire, les banques financent moins l’économie.
 
Elles ont repris de plus belles leurs activités de financement des activités de marché beaucoup plus lucratives, d’autant que  la baisse des taux de la BCE est une aubaine. Elle aura un nouvel impact positif sur le coût de leurs ressources et donc sur leurs marges.

Une stratégie de rétrécissement

Pourtant si le prochain feu est au vert, à l’horizon, c’est la purée de pois. Et l’iceberg n’est pas loin. D’abord parce qu’il ne faut pas être un expert pour comprendre que, tôt ou tard, la santé des banques françaises restera en partie liée à celle de l’économie de l’Hexagone. Or en France, il n’y a guère que le ministre des Finances, Pierre Moscovici pour se dire persuadé du redressement durable de la conjoncture.
 
Pour s’en sortir, les banques se placent donc discrètement dans une stratégie de rétrécissement. Moins de crédit, moins d’effectifs dans les agences, moins de coûts, une tactique qui permet d’espérer de maintenir les marges trimestre après trimestre. 

Des usines à fabriquer de l’argent

Mais à moyen terme, la visibilité n’est toujours pas au rendez-vous. Pour preuve, les grandes banques viennent toutes de reculer de six mois la publication de leur plan stratégique à 5 ans. S’il y a quelques années il suffisait encore de pousser les feux sur la banque casino pour fabriquer des profits à gogo, l’exercice est devenu plus compliqué avec les nouvelles exigences de solvabilité, des risques d’illiquidité des bilans et surtout une inflation du coût de traitement des opérations de trading.
 
C’est pourquoi les banques françaises commencent d’ailleurs à aller chercher de la  productivité sur ces activités de marchés.  On l’ignore trop souvent,  mais elles sont devenues des véritables usines à fabriquer de l’argent à coup de bonus certes, mais aussi de R&D, et de mise en œuvre de programmes informatiques coûteux.
 
Pour dire les choses clairement,  des chercheurs-traders passent leur temps, à mettre au point des « martingales » à l’aide d’outils informatiques puissants. Ces algorithmes, supposés gagnants voient ensuite leur mise en œuvre complexe et leur programmation confiée à des équipes et des machines basées à l’étranger. Elles traitent les ordres à la chaine, réconcilient les opérations et produisent les états de contrôles. Un pilotage à distance de ces activités financières qui ressemble terriblement à ce qu’est l’utilisation des drones par le Pentagone. Les systèmes pilotés à distance recherchent en continue les anomalies de marché et foncent sur la première occasion venue de les transformer en profits.
 
Or, cette sous-traitance du développement des opérations de plus en plus capitalistique, qui s’effectue aujourd’hui dans des pays européens est en train de glisser vers l’Inde. A moyen terme,  c’est là un important réservoir de productivité, espèrent les établissements financiers.  Il  permettra d’abaisser les coûts des opérations de marché et d’accroître les marges de la banque Casino. 
 
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