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Congrès des maires: et si on parlait un peu plus d’égalité des territoires?

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Hausse des taux de retraites pour les agents, hausse de la TVA sur les services publics, les transports et les déchets, réforme des rythmes scolaires, les sujets sont nombreux que les élus souhaitent aborder à l’occasion du 96e Congrès des maires de France. Ce mardi 19 novembre, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, est attendu de pied ferme : « L’ambiance risque d’être un peu tendue », a lancé Jacques Pélissard, le président UMP de l’association des maires de France (AMF). Mais « ce ne serait pas la première fois qu’un chef du gouvernement est chahuté par les élus ».

Plus exposés à la crise que leurs confrères, les maires ruraux sont-ils confiants ou moroses ? Qu’attendent-ils du gouvernement ? Eléments de réponse avec Cédric Szabo, directeur de l’association des maires ruraux de France. Entretien.

JOL Press : Dans quel état d’esprit abordez-vous ce congrès ?

Cédric Szabo : Nous sommes dans un esprit combatif. En tant qu’association de défense des élus ruraux, on se doit de maintenir et de rester dans un esprit combatif à l’approche des municipales. Les enjeux restent entiers et les problématiques que nous défendons aujourd’hui seront toujours d’actualité dans quelques mois. Un grand nombre de sujets nous préoccupent actuellement, que ce soit la réforme territoriale, la réforme des rythmes scolaire, la question des finances, la question des services publics en milieu rural mais aussi la question du statut de l’élu. Et ce qui importe c’est que nous restions attentifs à défendre les intérêts des maires ruraux sur l’ensemble de ces sujets.

JOL Press : Quels sont les obstacles que rencontrent un maire, dans le contexte économique actuel ?

Cédric Szabo : Le premier obstacle est lié à la population. Les Français, en moyenne, vont de plus en plus mal et mécaniquement une grande partie d’entre eux vivent à la campagne. Le maire doit gérer de plus en plus de situations sociales délicates. La crise touche l’ensemble de la population et la responsabilité du maire d’une collectivité c’est d’assumer et de traiter la souffrance de ses concitoyens. Prenons l’exemple du chômage : être chômeur à la campagne, ce n’est pas la même chose qu’être chômeur en ville, les services sont plus difficiles d’accès et les offres d’emploi beaucoup moins importantes, avec la question de la mobilité derrière.

Le second obstacle est lié à l’impact de la crise sur la vie des collectivités. Aujourd’hui, beaucoup de maires reportent ou annulent des projets de développement de services et quelques fois même réduisent la voilure sur des services existants. Les banques ne prêtent plus, et c’est là une des conséquences très concrète de la crise, ou alors dans des conditions tellement plus difficiles que pour aller jusqu’au bout d’un projet, dans une commune rurale, il faut plus que du courage. Il faut de l’obstination et savoir être quelques fois un peu cabotin…

JOL Press : Quelles sont, selon les maires ruraux de France, les priorités aujourd’hui à défendre ?

Cédric Szabo : C’est difficile de hiérarchiser les priorités. La question des rythmes scolaires est centrale pour nous, c’est pourquoi nous demandons du temps et des moyens. Nous demandons au gouvernement qu’il permette aux communes de pouvoir mettre en œuvre, de manière bénéfique à l’ensemble des enfants, cette réforme. Les maires ruraux ne veulent pas d’une école au rabais et, pour ne pas avoir une école au rabais, il faut que la réforme des rythmes scolaires soit appliquée de manière intelligente.

Par ailleurs, la question des finances publiques est aussi au cœur de nos préoccupations. Les maires ruraux de France acceptent l’idée de participer à aux efforts en terme de réduction des dépenses publiques mais on ne peut pas demander à quelqu’un qui n’a pas d’argent de dépenser moins. Il arrive un stade à partir duquel il devient indécent de demander aux collectivités de faire des efforts quand certaines d’entre elles n’arrivent même pas à boucler leur budget et quand l’offre de services est très limitée. Les efforts doivent être partagés mais les 36 000 communes ne peuvent pas faire le même effort. Nous demandons donc que la baisse des dotations ne s’applique pas dans la même proportion car les communes rurales connaissent déjà des difficultés financières très importantes.

JOL Press : Pensez-vous que, sur ces questions précises, vous serez entendus ?

Cédric Szabo : Depuis le lancement de la réforme sur les rythmes scolaire l’AMRF a demandé des assouplissements des normes et le gouvernement nous a entendu. Il comprend bien que nous ne sommes pas contre idéologiquement mais que pratiquement cette réforme est très difficile à mettre en œuvre. Sur la question des moyens, nous allons continuer à mettre la pression en disant que l’Etat a décidé de mettre en place une réforme dont personne ne discute le bien fondé, mais qu’il est indispensable que l’Etat la finance intégralement.

JOL Press : Nous avons assisté, ces dernières semaines, à l’émergence de mouvements de colère contre la fiscalité mise en place par l’Etat. Les maires ruraux ont-ils constaté un réveil des mécontentements ces derniers mois ?

Cédric Szabo : Je n’ai aucune remontée là-dessus. Ce que nous disons depuis très longtemps, en revanche, c’est qu’il y a des gens en souffrance dans les territoires ruraux et pour lesquels il n’y a pas de réponses. Depuis une vingtaine d’années, les territoires ruraux ont été progressivement dépouillés des services publics alors même que ce sont des territoires habités. Les maires ruraux sont confrontés à une population à qui ils ne savent plus quoi dire après la fermeture du bureau de poste ou de Pôle emploi… Nous avions demandé un ministère de la ruralité, nous ne l’avons pas obtenu, nous avons n ministère de l’Egalité des Territoires, mais à quand une politique d’égalité des Territoires ? C’est la seule question que l’on pose…

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

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