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Espagne: un projet de loi controversé pour pénaliser les manifestations

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Discutée lors du Conseil des ministres, vendredi 22 novembre 2013, la « loi citoyenne de sécurité » provoque un tollé en Espagne.  Ce projet de loi prévoit des amendes allant jusqu’à 30 000 euros pour les « infractions graves » comme les menaces ou insultes envers un policier, ou encore de « disposer d’éléments qui empêchent la libre circulation des véhicules et des personnes », rapporte Courrier International.

Des amendes allant jusqu’à 600 000 euros

Le texte prévoit aussi des amendes pouvant s’élever jusqu’à 600 000 euros pour « la captation ou la diffusion d’images attentant à l’honneur, l’image ou la sécurité de membres des forces de l’ordre »  ou pour avoir manifesté « sans préavis devant des institutions de l’Etat comme le Congrès, le Sénat ou les hauts tribunaux ». Porter une capuche pourrait également être considéré comme une infraction, tout comme la pratique des « escraches », lorsque des mouvements ou associations se rendent le lieu de travail ou le domicile des personnes qu’ils veulent dénoncer publiquement.

Ce mode d’action a été largement utilisé par les membres de la Plateforme des victimes de crédits hypothécaires (PAH) pour contester les expulsions locatives et exhorter des politiques du Parti populaire à la révision de la loi sur les crédits immobiliers.

Colère de l’opposition et des associations

Dans un pays, où les tensions sociales sont déjà très exacerbées, ce projet de loi a suscité une nouvelle onde de choc parmi l’opposition et au sein des collectifs issus du mouvement des Indignés en Espagne, qui ont qualifié ce projet de réforme de mesure  «autoritaire».

Pour protester contre le texte, les Espagnols sont appelés à descendre dans la rue, le 23 novembre prochain, dans le cadre d’une manifestation qui partira de la gare Atocha, à Madrid.

Au ministère de l’Intérieur, on justifie ce texte en pointant la disparition de certaines infractions du Code pénal: « Les comportements considérés comme des fautes et qui devaient être des sanctions pénales sont désormais incorporés au sein d’une loi administrative » a déclaré le secrétaire d’Etat espagnol à la Sécurité, Francisco Martinez, qui précise ne pas vouloir « punir plus, sinon mieux », rapporte le site eldiario.es.

Une « disposition liberticide » pour RSF

Pour le numéro deux du ministère de l’Intérieur, cette loi ne portera pas atteinte à la liberté de la presse. L’ONG Reporter Sans Frontières, qui qualifie ce texte de « disposition liberticide », n’est pas de cet avis et somme les parlementaires de revenir sur « cette disposition inconstitutionnelle ». 

« Dans quelle démocratie digne de ce nom les opérations de police ne peuvent-elles plus être couvertes par la presse lorsqu’elles ont lieu dans l’espace public ? » s’interroge l’ONG dans un communiqué publié jeudi 21 novembre.

« Ce projet de loi risque de faire des manifestations de rue des zones interdites aux journalistes. Sous le coup de poursuites judiciaires et d’amendes exorbitantes, susceptibles d’être distribuées à l’envie tant la notion ‘d’atteinte à l’image ou à l’honneur d’un policier’ est imprécise, comment les journalistes pourront-ils couvrir efficacement non seulement les manifestations, mais l’ensemble des événements impliquant la police ? » poursuit l’organisation.

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