Site icon La Revue Internationale

France-Ukraine: le coût économique d’une élimination des Bleus

[image:1,l]

JOL Press : A-t-on raison de s’inquiéter pour les finances de la fédération française de football en cas d’élimination de l’équipe de France ?

Nathalie Henaff : Aujourd’hui, si l’on essaie de déterminer quel pourrait être l’impact financier pour la fédération, il faut regarder dans un premier temps son budget actuel, qui se situe aux alentours de 200 millions d’euros. Ensuite, il faut savoir que si la France se fait éliminer, on peut estimer qu’il y aura un impact direct, mais aussi indirect.

Lorsque l’on a étudié la question, on a essayé de regarder les différents éléments qui construisent le budget de la FFF. Dans un premier temps, la non participation à la coupe du monde priverait la fédération de la somme que la Fifa verse directement à tous les participants, environ huit millions d’euros, somme qui peut s’accroître en cas de bonnes performances. Cela aurait donc un impact direct pour les comptes de la FFF, même s’il faut tenir compte du fait, qu’une partie de cette somme serait redistribuée en primes, notamment aux joueurs. On évalue la perte nette entre 4 et 5 millions d’euros, d’après les déclarations qui ont été faites par le président de l’institution.

Ensuite, viennent les recettes de sponsoring. Les contrats sont garantis jusqu’en 2014 mais le système de « bonus /malus » viendrait impacter le budget de la fédération, avec une estimation, encore une fois, d’après des déclarations de certains responsables de la fédération, d’un montant compris entre 1,5 et 2,5 millions d’euros par rapport aux recettes de sponsoring qui existent déjà. Donc pour obtenir la perte pour la FFF, il faut ajouter aux huit millions qui ne seraient pas versés par la Fifa, entre 1,5 et 2,5 millions d’euros pour le volet sponsoring.

Il s’agit des pertes directement estimables en cas de non qualification mais il y a aussi l’impact financier futur plus incertain. Dans un sens on pourrait penser qu’avec des résultats mauvais et une image de l’équipe de France dégradée, la fédération ne pourra pas dans les prochaines années vendre les partenariats dans de bonnes conditions. On pourrait envisager une baisse du ticket d’entrée lors de la vente de contrats de sponsoring. Mais il faut prendre en compte le contexte, avec l’euro 2016 qui sera organisé en France. Même s’il y a élimination, la fédération n’aura pas de difficulté à résigner les contrats de sponsoring, pour la période 2014/2018. Avec l’euro en France, les partenaires ont tout intérêt à être présents auprès de la fédération pendant la période.

JOL Press : C’est finalement l’euro 2016, auquel la France participera en tant que pays organisateur, qui sauverait la FFF en cas d’élimination ?  
 

Nathalie Henaff : Si on ne regarde pas la perspective de l’euro 2016, les mauvais résultats pourraient en effet laisser présager une baisse du ticket d’entrée. Mais avec un euro qui va se dérouler en France, en plein pendant la période de sponsoring 2014 / 2018, on voit mal comment la fédération pourrait rencontrer des difficultés à trouver des sponsors. Les partenaires ont intérêt à rester auprès de la fédération et de l’équipe de France.

JOL Press : La baisse des ventes de produits dérivés, qui est susceptible de se produire en cas d’élimination, peut-elle également avoir un impact ?
 

Nathalie Henaff : Par rapport au merchandising, il n’y a pas de perte nette pour la fédération, mais plutôt un manque à gagner, ce qui est assez différent. Aujourd’hui, la fédération prévoit ses volumes de ventes en fonction de ce qui a été fait ces dernières années, donc on ne peut pas vraiment parler de perte.

Il y a également une autre ressource qui pourrait être pénalisante en cas d’absence à la coupe du monde au Brésil : les droits TV. Mais sur ce point, pour la période 2014 / 2018, l’UEFA garantit les droits TV à hauteur de 4,3 millions d’euros par match.

Donc au final, cela représenterait au maximum entre 6 et 7 millions d’euros de perte nette pour la fédération, soit environ 4% de son budget, ce qui n’est pas négligeable mais tout même assez faible et donc peu pénalisant.

JOL Press : Qu’en est-il du manque à gagner pour les chaines de télévision retransmettant les matchs ou pour la presse spécialisée ?
 

Nathalie Henaff : La presse spécialisée serait effectivement pénalisée par une élimination. Si l’on prend le journal sportif l’Equipe par exemple, on sait que les ventes les plus importantes ont été réalisées suite à des résultats de l’équipe de France, notamment en 1998, avec la victoire en coupe du monde. L’écart entre la diffusion quotidienne et celle qui fait suite à un événement dans lequel la France est présente est extrêmement conséquent.

Pour les moins initiés au football, le fait que la France ne soit pas présente fait perdre énormément d’intérêt à la compétition, ce qui pénalisera bien sûr également les chaines de télévision, comme TF1, qui a acheté les droits. Il va être beaucoup plus difficile d’intéresser les gens.

JOL Press : Les bars et restaurants habitués à retransmettre les événements sportifs, et les fournisseurs d’équipements télévisuels pourraient-ils être pénalisés ?
 

Nathalie Henaff : Je ne pense pas que l’on puisse, dans ce cas, parler d’impact financier. Bien sûr certains établissements ne pourront pas bénéficier de la coupe du monde comme c’est le cas lorsque la France est présente mais il faut savoir que même pour le pays organisateur, sur ce point, l’impact financier reste très faible Donc pour un pays simplement participant, l’effet coupe du monde est vraiment dérisoire économiquement, même s’il y a un léger manque à gagner pour certains secteurs.

Au niveau des téléviseurs par exemple, s’il est vrai qu’il y a eu une vague d’achats lors des mondiaux 2006 et 2010, il faut se rappeler que c’était parce que les écrans plats étaient en plein boom. Aujourd’hui, beaucoup de foyers sont équipés d’écrans plats donc je ne pense que la participation à la coupe du monde pourrait engendrer une augmentation massive des ventes.

Propos recueillis par Rémy Brisson pour JOL Press

 

Quitter la version mobile