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«La commercialisation du vaccin contre le cancer du col de l’utérus était prématurée»

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JOL Press : Une plainte vient d’être déposée contre le vaccin Gardasil luttant contre le cancer du col de l’utérus vendredi dernier. Pourtant depuis 5 ans, ce vaccin cristallise critiques et controverses, notamment sur ses effets secondaires. Comment expliquez-vous ce délai si long pour qu’enfin le débat se déplace sur le terrain judiciaire ?
 

Sauveur Boukris : Lors de la commercialisation du Gardasil en 2007, des contestations se sont en effet élevées, la jugeant notamment trop prématurée. Ces réticences étaient justifiées puisque que le vaccin, encore aujourd’hui, ne traite pas tous les cas de cancer du col de l’utérus. En faisant du Gardasil la solution miracle face à un problème de santé publique, les laboratoires, les autorités sanitaires, et les responsables politiques ont fait des « sur-promesses ».

Néanmoins, je souhaite prévenir contre les conclusions trop hâtives qui généraliseraient une situation, qui est, pour le moment, je le rappelle, unique. Les vaccins ont entrainé la disparition de nombreuses maladies. Contre la vaccination systématique, je conseille néanmoins aux personnes qui souffrent d’antécédents familiaux, d’aller se faire vacciner. Maintenant, si le lien entre le vaccin et la sclérose en plaques – dont souffre la plaignante – devait être avéré, nous en tirerons les conclusions nécessaires.<!–jolstore–>

JOL Press : Après le scandale des pilules de troisième génération, vient celui du vaccin Gardasil. Comment expliquez-vous que de tels produits, aux conséquences graves pour la santé, se retrouvent en vente sur le marché, malgré les barrages des autorités sanitaires que constituent « normalement » les autorités sanitaires nationales et européennes ?
 

Sauveur Boukris : Le principal problème vient du fait que les autorités sanitaires accréditant les médicaments sur le marché, ne se fondent que sur les expérimentations proposées par les laboratoires. Il n’y a aucun contre-pouvoir indépendant capable de confronter ses propres résultats à ceux des industriels.

Par ailleurs le marché mondial du vaccin représente des intérêts colossaux pour les laboratoires, et en particulier pour Sanofi Pasteur. L’industriel exerce un lobbying puissant auprès des autorités sanitaires afin de réduire les délais avant la commercialisation de ses produits. Ainsi elles n’ont pas toujours le recul nécessaire pour prendre des décisions à la fois éclairées et adaptées.  

JOL Press : Qu’est-ce qui explique qu’un vaccin ou qu’un médicament soit autorisé sur le marché, par l’Agence européenne du médicament, après seulement neuf mois de concertation, compte tenu du très faible recul dont disposait les fabricants de médicaments en 2006/2007 ? 

Sauveur Boukris : En moyenne, il faut sept/huit ans pour qu’un médicament soit commercialisé, à partir du dépôt de brevet. Après avoir été étudié  par les autorités sanitaires, le gouvernement établit son taux de remboursement. Durant cette procédure très longue, les investissements faits au moment de la fabrication du médicament ne sont pas encore rentabilisés. Pour amortir rapidement les coûts de production, les laboratoires cherchent à commercialiser leurs produits le plus rapidement possible.

En espèce, comme il s’agissait d’un vaccin présenté comme anticancer du col de l’utérus, traité comme un problème de santé publique de premier plan, l’Agence européenne du médicament ainsi que les autorités françaises se sont empressés de le mettre en vente, sans prendre suffisamment de recul.

JOL Press : Selon vous, qu’est-ce qui permettrait de rendre plus transparentes les relations laboratoires/autorités sanitaires ?
 

Sauveur Boukris : Deux choses permettraient aux autorités sanitaires d’être plus hermétiques au lobbying exercé par les industriels. Premièrement, il faudrait qu’elles disposent d’un propre budget, de façon à ce qu’elles puissent mener leurs propres études sur les médicaments, pour ensuite les confronter aux résultats présentés par les laboratoires.

Deuxièmement, cela doit passer par un centre de recherche et d’expérimentation, totalement indépendant des laboratoires. Cela mettrait fin à la situation hallucinante où, un même expert est à la fois consulté par les autorités sanitaires et par les industriels. Ces conflits d’intérêt potentiel doivent cesser. 

Propos recueillis par Carole Sauvage pour JOL Press

Dr. Sauveur Boukris, Médicaments génériques, la grande arnaque aux Editions du Moment, et, La fabrique des malades aux Editions du Cherche-Midi.

 

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