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Peut-on vraiment imaginer une Écosse indépendante?

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Un livre blanc pour présenter la marche à suivre jusqu’à l’indépendance

Dans le cadre de sa lutte pour l’indépendance du pays, le parti au pouvoir, le Scottish National Party (SNP), a présenté mardi 26 novembre, son livre blanc, dix mois avant le référendum sur la question, qui pourrait conduire à une sortie effective en mars 2016.

Il y est présenté, en presque 700 pages, la marche à suivre jusqu’à l’indépendance. Car si, en théorie, il est bien possible pour l’Ecosse de quitter le Royaume-Uni, dans les faits, le processus s’avère extrêmement complexe, du fait des compétences et ressources pour l’heure partagées. Edimbourg devra se mettre d’accord avec Londres, qui, de toute évidence, ne fera rien pour faciliter la tâche de son voisin.

Le livre blanc du Premier ministre, Alex Salmond, ne semble absolument pas avoir convaincu les sceptiques, le ministre écossait du gouvernement britannique Alistair Carmichael estimant même que l’ouvrage ne représentait qu’une « liste de vœux pieux ».

De nombreuses questions en suspens

L’hypothèse d’une sortie pose un premier problème relatif à l’appartenance à l’Union européenne. Le projet décrit par Alex Salmond ne prévoit pas l’établissement d’une frontière avec l’Angleterre, ce qui serait pourtant nécessaire. Dans la mesure où, l’exemption de l’application des accords de Schengen n’est valable que pour le Royaume-Uni, l’Ecosse n’en faisant plus partie, se devrait d’établir une frontière avec son voisin pour se conformer aux textes européens.

De plus, le Premier ministre indépendantiste estime qu’une sortie du Royaume-Uni n’engendrerait aucune rupture avec l’Union européenne, ce qui, en réalité, est loin d’être acquis. La Commission européenne a d’ores et déjà indiqué que l’Ecosse devrait postuler à l’Union européenne si l’indépendance était déclarée.

Viens ensuite la question de la monnaie. Alex Salmond n’entend pas adopter la monnaie unique, alors que les nouveaux entrants dans l’Union (L’Ecosse serait dans cette situation si elle postule et que sa candidature est acceptée) doivent s’engager à le faire. Il souhaiterait conserver la livre sterling comme monnaie, option inenvisageable pour Londres, qui se retrouverait de fait au centre d’une union monétaire avec un pays indépendant, ce qui pénaliserait la liberté d’action de la Banque d’Angleterre.

Economiquement, l’indépendance est loin d’être une bonne idée

L’aspect économique est certainement celui qui discrédite le plus le projet de sortie du Royaume-Uni. Contrairement à la conviction d’Alex Salmond selon laquelle le projet n’entrainera pas de hausse d’impôts, les rapports de plusieurs institutions financières et du ministère britannique des Finances prouvent le contraire.

Il est important de noter que l’Ecosse souffre toujours d’un déficit important, et qu’en cas d’indépendance, elle devrait reprendre une partie de la dette publique du Royaume-Uni. Il est bien sûr impossible de connaître précisément la répartition dans une telle éventualité, mais selon les analystes, la dette du pays pourrait se retrouver aux alentours de 85% du produit intérieur brut (PIB). L’Ecosse devrait donc appliquer une sévère cure d’austérité pour rentrer dans les clous du niveau de dette maximum imposé par le traité de Maastricht.

Le financement pourrait de plus devenir rapidement un casse tête, puisque le taux d’emprunt de l’Ecosse serait sensiblement supérieur à celui du Royaume-Uni, du fait du risque accru que représenteraient ses obligations d’Etat (taux risquant de dépasser très nettement les 3%). Rappelons également que la Royal Bank of Scotland, qui a été sauvée de la faillite par l’Etat britannique est toujours soutenue par Londres. Privée de cette aide financière, ses chances de se relever se réduiraient grandement.

Enfin, le sujet le plus sensible, en cas d’hypothétiques négociations, serait très probablement le partage des ressources pétrolières en Mer du Nord. D’après les experts, plus des trois quarts de la production d’hydrocarbures du Royaume-Uni sont réalisés dans les eaux territoriales écossaises. Il est difficile, dans ces conditions, d’imaginer Londres céder facilement cette manne pétrolière. Et même dans ce scénario très improbable, cela ne suffirait pas à assurer la prospérité d’Edimbourg. Les rendements des ces gisements sont en baisse constante, ce qui pousserait Édimbourg à devoir chercher de nouveaux relais de croissance.

Un divorce avec le Royaume-Uni n’aurait que très peu de chances de conduire à la création d’une nation « plus prospère » comme l’espère le Premier ministre.

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