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François Hollande en Centrafrique: n’est-ce pas trop tôt?

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Le président français se rendra en République centrafricaine, mardi 10 décembre au soir, à son retour d’Afrique du Sud où il assistait à la cérémonie d’hommage à Nelson Mandela. Une visite surprise, et plutôt exceptionnelle dans la mesure où la totalité des soldats français n’a été déployée que deux jours auparavant.

Une visite surprise et plutôt inatendue

La mort de deux soldats français, appartenant au 8ème régiment de parachutistes d’infanterie de marine, dans la nuit de lundi 9 à mardi 10 décembre, n’est sûrement pas étrangère à cette décision du chef d’Etat français qui fera donc une escale quelques heures à peine au cœur du conflit centrafricain.

Quelques heures sous les tirs qui résonnent à Bangui, alors que l’opération Sangaris vient à peine de débuter. Ne serait-ce pas un peu prématuré ?

Certes, l’image est chargée de symbole et l’avion présidentiel ne pouvait sans doute faire autrement que de survoler la République centrafricaine pour se rendre de Johannesburg à Paris. Néanmoins, cette visite est-elle vraiment utile ? L’heure est-elle vraiment aux cérémonies d’accueil d’un président sur un théâtre d’opération, alors même que les combats font rage dans la capitale et que la France doit mener à bien une mission qui se doit d’être aussi « courte » qu’« efficace » selon les termes employés par François Hollande deux jours auparavant.

Mission « courte » et « efficace »

Depuis l’arrivée des derniers convois, les soldats français sont 1 600 en Centrafrique. Déployés pour « désarmer toutes les milices et groupes armés qui terrorisent les populations » et « se déployer le plus rapidement possible et partout où il y a des risques pour la population », les Français sont épaulés par une force constituée de 2 500 soldats venus de différents pays africains.

Une mission « rapide » et « efficace », mais depuis deux jours, les nombreuses images qui nous parviennent de ce conflit ne sont pas révélatrices d’un conflit en passe d’être résolu. Bien au contraire, les soldats français – et la mort des deux militaires mardi 9 décembre en témoigne – le conflit centrafricain ne sera certainement pas résolu dans les six mois à venir, malgré les bonnes paroles entendues ces derniers jours.

La République centrafricaine est dans une situation de chaos indéfinissable. Une situation qui a poussé certains dignitaires de l’ONU à qualifier de « génocide » les affrontements qui opposent deux catégories de la population.

Un enlisement prévisible

Depuis cinq jours, les affrontements à Bangui auraient fait plus de 465 morts, selon les chiffres de la Croix Rouge présente sur place. Un bilan macabre qui témoigne de la violence de ce conflit et de la difficulté de la mission confiée aux militaires français.

S’il est une autre indication que nous transmettent les images en provenance de Bangui depuis ces derniers jours, ce sont celles d’une population profondément divisée. Dans un premier camp, les anciens membres de la rébellion de la Séléka. Certains d’entre eux sont retournés incognito dans la vie civile et ce sont eux que les Français cherchent, eux qui possèdent aujourd’hui des armes.

De l’autre côté, les civils. Ceux que l’on pourrait grossièrement qualifier de « chrétiens » face à une Séléka majoritairement composée de musulmans. Si, depuis ces derniers mois, ce conflit s’est rapidement transformé en conflit confessionnel, ces images transmettent une volonté de vengeance de la population qui laisse déjà présager d’un enlisement du conflit.

Lorsqu’il s’était rendu au Mali, il y a quelques mois, François Hollande avait été accueilli en chef de guerre déjà victorieux, n’hésitant pas à dire de ce moment qu’il était le plus important de sa carrière politique. Il n’en sera certainement pas de même à Bangui ce soir.

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