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Mohamed Bouazizi, l’immolation qui a provoqué l’étincelle

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Dans un geste désespéré contre la confiscation de ses outils de travail par un policier, le jeune Mohamed Bouazizi, vendeur ambulant de fruits et de légumes à Sidi Bouzid, une ville située à 250 kilomètres de Tunis, s’immole par le feu devant le siège du gouvernorat de la ville, le 17 décembre 2010. Transporté à l’hôpital, il meurt de ses blessures quelques jours plus tard, le 4 janvier 2011.

Considéré comme un martyr par de nombreux Tunisiens, son geste sert d’exemple et déclenche une série d’immolations en Tunisie. En trois ans, plus de 180 cas auraient été recensés dans le pays par le ministère de l’Intérieur.

Tâche d’huile

Celui qui préférait « mourir plutôt que de vivre dans la misère » provoque malgré lui une vague de manifestations de soutien, qui évoluent rapidement vers une contestation générale contre le pouvoir en place et la politique menée d’une main de fer par le président Zine el-Abidine Ben Ali et son « clan ».

Dans les rangs des milliers de manifestants qui descendent pendant un mois dans les rues de toute la Tunisie, un seul mot d’ordre : « Dégage ! ». Le 14 janvier 2011, Ben Ali, qui tenait depuis vingt-trois ans les rênes du pays, finit par entendre le message et fuit la Tunisie pour se réfugier à Djeddah, en Arabie saoudite.

La mobilisation tunisienne, très active sur les réseaux sociaux, se répand comme une traînée de poudre dans les pays arabes voisins. Égypte, Libye… Les têtes tombent, entraînant dans leur chute plus de trente années de régimes autoritaires.

Misère et chômage à Sidi Bouzid

Dans la ville de Sidi Bouzid, qui commémore aujourd’hui le troisième anniversaire de la mort de Mohamed Bouazizi, rien ne semble avoir changé.

Interrogé par le quotidien algérien El Watan, Attia Athmouni, premier porte-parole du comité de soutien du soulèvement des habitants de Sidi Bouzid – créé le soir de l’immolation – explique que ce jour-là, « nul n’avait en tête que Ben Ali allait partir quatre semaines plus tard ».

Mais il ajoute, désabusé : « nul n’avait en tête non plus, que trois ans après la chute de Ben Ali, Sidi Bouzid allait rester toujours aussi marginalisée et plongée dans la misère et le chômage ».

« Martyrs de la révolution »

Trois ans après la révolution tunisienne, baptisée par certains la « révolution de jasmin », le climat politique reste en effet extrêmement instable et tendu. Depuis décembre 2010, la Tunisie a connu quatre présidents de la République, six gouvernements, quatre Premiers ministres – le cinquième, Mehdi Jomaâ, vient d’être élu et doit former le septième gouvernement – et deux assassinats d’opposants politiques.

Chokri Belaïd, un des leaders de l’opposition, est assassiné devant chez lui le 6 février 2013. Cinq mois plus tard, le 25 juillet, le député Mohamed Brahmi, qui critiquait ouvertement le gouvernement dirigé par les islamistes d’Ennahdha, est tué par deux hommes, devant son domicile.

Alors que la Tunisie peine à trouver un point d’équilibre politique, ces deux assassinats ont plongé un peu plus le pays dans la crise. C’est d’ailleurs en hommage à ces deux opposants que se déroulent les célébrations du troisième anniversaire de la mort de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid, placées cette année sous le signe de la « fidélité à la mémoire du martyr Mohamed Brahmi, de tous les autres martyrs de la révolution et des victimes du terrorisme ».

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