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Travailleurs détachés: la directive doit être réformée

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Les 28 ministres du Travail de l’UE se réunissent ce lundi 9 décembre pour discuter du statut des travailleurs détachés. Michel Sapin a tenu à afficher la fermeté de sa position : « A un mauvais compromis, je préfère l’absence de compromis ». La France se situe en effet en première ligne des pays demandant une réforme de la directive des travailleurs détachés, accusés de concurrencer l’emploi national.

Qu’est-ce qu’un travailleur détaché ?

La Commission européenne donne la définition suivante du statut de travailleur détaché : « Un travailleur est considéré comme « détaché » s’il travaille dans un État membre de l’UE parce que son employeur l’envoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans cet État membre. Par exemple, un prestataire de services peut remporter un contrat dans un autre pays et décider d’envoyer ses employés exécuter ce contrat sur place. Cette prestation de services transnationale donne lieu à une catégorie distincte: les « travailleurs détachés », envoyés pour travailler dans un autre État membre que celui dans lequel ils exercent habituellement leurs fonctions. Cette catégorie ne comprend pas les travailleurs migrants qui se rendent dans un autre État membre pour y chercher un emploi et qui y travaillent. ».

L’institution précise : « Si un État membre prévoit des conditions d’emploi minimales, ces dernières doivent également s’appliquer aux travailleurs détachés dans cet État ». En d’autres termes, un travailleur détaché ne peut percevoir une rémunération inférieure au salaire minimum en vigueur dans le pays où il travaille (s’il existe un salaire minimum). Un travailleur détaché en France ne pourra donc être rémunéré en dessous du SMIC.

Le « problème » des cotisations sociales

Dans ces conditions, si le salaire minimum s’applique aux travailleurs détachés, pourquoi accuse-t-on ce système d’instaurer un « dumping social » entre les Etats ?

Le problème vient du fait que les cotisations sociales s’appliquant sont celles du pays d’origine du travailleur détaché. Dans les pays où les charges sociales sont élevées, comme la France, la différence de coût pour l’employeur peut être extrêmement importante.

Certains abus sont à dénoter. Le ministre du Travail français, Michel Sapin, déplorait en ce sens il y a quelques jours que « le contournement de ces règles s’accroît en France », du fait notamment, de « montages frauduleux de plus en plus sophistiqués ». Au regard de la différence de coût pour l’employeur, il semble bel et bien légitime de parler de dumping social.

Un statut qui concernerait 1,5 million de personnes au sein de l’Union européenne

Un rapport du Sénat publié en avril dernier permet de se rendre compte de l’ampleur du phénomène en France : « Depuis 2006, le nombre de travailleurs détachés en France, faisant à cet effet l’objet d’une déclaration en bonne et due forme, a été multiplié par 4, passant de 37 924 salariés à 144 411 en 2011 ». Au regard de ces chiffres, il est évident pour les rédacteurs du rapport, qu’il existe « un incontestable effet élargissement de l’Union européenne ». D’après le ministère du Travail, la France a accueilli 169 613 travailleurs détachés en 2012, un chiffre qui devrait augmenter de 23% cette année. A signaler, en plus, qu’il s’agit ici uniquement des travailleurs détachés déclarés. 

Selon le rapport du Sénat, la France est le deuxième pays d’accueil après l’Allemagne, ce qui explique la force de la polémique dans l’hexagone. Il est également précisé que si les déclarations de détachement de travailleurs proviennent encore majoritairement de pays ayant adhéré à l’Union européenne avant 2004, la part des « nouveaux Etats membres » ne cesse de s’accroître. Ainsi, la Pologne et la Roumanie représentent, avec le Portugal, les trois pays « envoyant » le plus de travailleurs détachés en France. 

Pour traiter efficacement de ces problématiques, il est indispensable que l’Europe établisse un véritable pacte social, ce qui n’est pas la direction vers laquelle semble s’orienter les dirigeants européens…

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