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Centrafrique: les chemins de l’exode des musulmans

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Lorsqu’ils sont arrivés en Centrafrique, les soldats français engagés dans l’opération Sangaris ont découvert un pays détruit par des années d’instabilité politique mais également rongé par la haine et le besoin de vengeance.

Les musulmans, cible de la vengeance des chrétiens

Après des mois de terreur semée par les rebelles de la Séléka, les chrétiens, regroupés dans des milices d’auto-défense, qu’on a ensuite appelées les anti-balaka, étaient déterminés à venger tous les morts de leurs familles en s’attaquant aux musulmans, à tous les musulmans.

Dans les quartiers de Bangui, les affrontements entre groupes de confessions chrétienne et musulmane ont commencé, multipliant chaque jour le nombre de victimes. Dans les rues, les témoignages recueillis sont divergents. Alors que les anti-balaka affirment n’agir que pour se défendre des attaques incessantes des anciens rebelles de la Séléka, les musulmans affirment pour leur part n’agir que pour leur propre sécurité.

Pour Moussa Hassaba Rassoul, un ancien officier de la Séléka dont les propos ont été recueillis par Le Monde, il ne s’agit que d’auto-défense. « Il ne faut pas mélanger politique et religion. Nous ne sommes pas des islamistes. Ici, nous protégeons les chrétiens, nous restons pour défendre nos biens. Nous sommes prêts à faire la paix comme la guerre ».

La France est accusée de favoritisme

Au milieu de ce marasme ethnico-religieux, les forces françaises ont été chargées de désarmer les anciens rebelles de la Séléka et de calmer les milices d’auto-défense. Une tâche difficile qui a valu aux Français d’être accusés de favoritisme en faveur des chrétiens.

« ‘Sangaris’, quand on se fait attaquer, ils disent tant pis, ils aident les anti-balaka et les pillards. Samedi, ils sont allés fouiller la maison d’un de mes neveux. Les Français n’ont rien trouvé, après ils sont partis et les badauds l’ont tué. Le président Hollande amène le génocide en RCA », estime ainsi Moussa Hassaba Rassoul dans Le Monde.

Les quartiers se vident

Face à cette situation que certains ont qualifiée de proche du génocide, les musulmans choisissent alors la fuite. Dans un pays peuplé à 80% de chrétiens et où les musulmans représentent 10% de la population, ces derniers préfèrent fuir la violence et leur statut de minorité.

Les quartiers de la capitale, Bangui, se vident alors de toute présence musulmane et dans les rues, les camions chargés de toutes les affaires de cette population se préparent à fuir la guerre.

« Au kilomètre 5, le grand quartier musulman et centre névralgique du commerce dans la capitale, bon nombre de maisons sont désertes », décrit Le Monde. « Il n’y a quasiment plus une femme, plus un enfant. Le rond-point où trône la statue du sous-lieutenant Koudoukou, un compagnon de la Libération, a été badigeonné d’inscriptions ‘Non à la France. Hollande criminel’ » raconte encore le quotidien.

En route vers le Tchad

Le Tchad a joué un rôle non négligeable dans cette opération. Considérés comme des alliés de l’ancienne Séléka, les Tchadiens sont vite devenus la cible de la vengeance des Centrafricains.

Les soldats du Tchad, venus en masse renforcer les rangs de l’ONU, n’ont pas pu opérer longtemps sur le terrain et ont été rapatriés chez eux. Désormais, ce sont les expatriés tchadiens qui ont pris le chemin de l’exode.

« N’Djamena a envoyé des centaines de soldats pour escorter leur remontée vers la frontière », explique Le Monde. « Jeudi 16 janvier, un convoi d’une centaine de véhicules particuliers, de camions-bennes, de fourgonnettes, chargés d’hommes, entassés au milieu des valises, des meubles, des matelas et des bidons, a quitté Bangui protégé par des soldats tchadiens », explique encore le quotidien.

Tous, ou au moins la majorité d’entre eux, se retrouveront au Tchad pour entamer une seconde vie. Ces nombreux émigrés, souvent pris en charge par l’Office international des migrations, ont pour beaucoup la conviction qu’ils ne reviendront plus en Centrafrique.

« Je suis née ici en 1963. Ma mère est née ici en 1943. C’est mon pays, mais les Centrafricains sont devenus comme des bêtes sauvages. Je ne peux pas vous mentir, si je trouve un autre pays, je ne vais jamais revenir », témoigne ainsi Hadja Saboura, dans des propos retranscris par Le Monde.

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