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Discours sur l’état de l’Union: si Barack Obama jouait sa présidence…

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Un second mandat, pour quoi faire ? Pour entrer dans l’Histoire par la grande porte ou pour en sortir par la petite… La réponse est un peu péremptoire mais une chose est certaine, le temps est compté pour Barack Obama. A l’automne prochain, lors des élections de mi-mandat, il lui faudra conserver une majorité au Sénat, une majorité sans laquelle son mandat s’achèverait, de fait, avant même que ne débute la course à sa succession.

Novembre 2014, c’est demain, 2016, après-demain et, aujourd’hui, à l’occasion du deuxième discours sur l’état de l’Union de son second mandat, après une année de perdue – ou presque -, Barack Obama a sans doute une dernière chance de reprendre la main, de rétablir un leadership largement contesté et de conserver une chance de mener à terme les réformes de profondeur si souvent promises.

Y parviendra-t-il ? Pour en juger, voici cinq éléments à suivre dans le discours sur l’état de l’Union 2014…

Barack Obama attaquera-t-il de front les républicains ?

Pas de doute que Barack Obama profitera de ce discours, à l’ouverture d’une année électorale déterminante, pour mettre en exergue les différences essentielles qui distinguent son parti, les démocrates, de leurs adversaires républicains.

La Maison Blanche doit absolument conserver une majorité au Sénat, lors des élections du 4 novembre prochain. A défaut, en vertu de la constitution américaine, l’administration Obama se verrait entrainée dans une « cohabitation » de fait qui la priverait de l’essentiel de ses capacités d’initiative et la contraindrait à « jouer en défense », ne pouvant que tenter de contrecarrer – ou retarder – les projets de réforme portés par la nouvelle majorité républicaine. Adieu, dans ces conditions, l’espoir d’enjoliver un bilan, jusque-là largement inabouti.

Barack Obama pourrait donc être tenté d’utiliser ce discours sur l’état de l’Union pour rappeler sa vision personnelle de l’avenir des États-Unis, et d’insister sur ce qui, fondamentalement, l’oppose à ses adversaires. A coup sûr, ce discours devrait combler nombre des membres démocrates du Congrès. Pourtant, cela ne saurait être suffisant…

Dans tous les cas, avant comme après les élections de mi-mandat, Barack Obama devra collaborer avec les républicains – certains d’entre eux -, s’il souhaite, dans les trois années à venir, mener à terme des réformes d’envergure, comme celles sur l’immigration ou le commerce…

Que le Président frappe trop fort sur les républicains, sans trop de discriminations, et il risquerait de s’aliéner les soutiens potentiels de quelques élus centristes prêts à franchir le Rubicon et à le soutenir ponctuellement. Qu’il soit trop mou et il porterait un mauvais coup à son propre camp…

En politique, tout est, souvent, question de juste mesure.  

Barack Obama tentera-t-il de « recycler » des promesses non tenues ?

Que de promesses n’ont pas été tenues depuis le discours de l’an dernier. Ainsi est née la thèse – largement partagée – d’une année pour rien. Barack Obama devra convaincre qu’il peut mettre un terme à cette spirale de l’échec préfigurant, après « une année pour rien », le jugement d’ « un mandat pour rien ».

De fait, parmi les projets annoncés et reportés, des réformes de taille, autant de marqueurs d’une présidence réussie, à défaut de demeurer historique, comme, par exemple, une législation sur le contrôle des armes à feu, une refonte du droit et de la politique d’immigration, une hausse du salaire minimum de 7,25 $ à 9 $…

Dès lors, certaines de ces réformes pourraient figurer à nouveau dans la version 2014 du discours sur l’état de l’Union. C’est à un dosage fin que doivent se livrer le Président et ses conseillers qui pourraient être aussi, plus largement, tenté de placer l’ensemble de l’année sous le thème de l’action, comme ils disaient l’an dernier qu’il n’y avait « pas de temps à perdre ». Le risque est toutefois réel de tomber dans l’incantation et d’en payer sans attendre le prix politique.

Au nom d’une certaine prudence, parce que des choix stratégiques s’imposent, il y a fort à parier que de tous les « recyclages » possibles, le moins probable concerne la législation sur le contrôle des armes, une question essentielle mais bien trop clivante…

Quelles suites pour l’ObamaCare ?

Ce devait être le symbole de toute sa présidence, au point même de porter son nom, la mise en œuvre de l’ObamaCare a tout du calvaire. En décembre dernier, la victoire du Président dans le bras de fer budgétaire avec les républicains n’a-t-elle pas été éclipsée par le rétropédalage de son administration, repoussant d’un an l’obligation faite aux Américains de souscrire une police d’assurance-maladie ? Et cela continue… La semaine dernière encore, le 24 janvier, la Cour suprême a estimé qu’une organisation religieuse ne pouvait être contrainte de souscrire une assurance incluant la contraception…

Barack Obama évoquera immanquablement sa réforme du système d’assurance-maladie dans son discours. Mais quelle place lui accordera-t-il ? Qu’il en parle insuffisamment et il sera accusé de rétropédaler une fois de plus, de ne pas assumer suffisamment – et jusqu’au bout – la réforme majeure de sa présidence.       

Quelles peuvent être les surprises ?

Les discours sur l’état de l’Union sont des exercices convenus, la longue énumération des objectifs – au sens large – qu’entend se fixer la Maison Blanche pour l’année à venir. L’essentiel est prévu d’avance, et de longue date, jusqu’à la couleur de la cravate présidentielle…

Pourtant, il y a souvent des surprises, comme, l’an dernier, lorsque, jusque dans les rangs démocrates, nul n’avait imaginé à l’appel à l’augmentation du salaire minimum…

Quelle place pour la politique étrangère… Une question subsidiaire ?

A Washington, la question paraitrait incongrue – et plus encore au fin fond de l’Arkansas ou du Minnesota. Malgré un prix Nobel de la paix prometteur, après moins d’un an de mandat, Barack Obama a largement délégué à ses deux Secrétaires d’État, Hillary Clinton d’abord, John Kerry désormais, la politique étrangère des États-Unis, au point qu’il peut paraître plus absent qu’aucun de ses prédécesseurs sur la scène internationale – ce qui n’est pas forcément vrai.

Barack Obama pourrait, d’ici à la fin de son mandat, s’intéresser à nouveau au vaste monde. Nul doute qu’une défaite aux élections de mi-mandat, à l’automne prochain, lui en laisserait le loisir, l’y contraindrait. Mais, d’ici là, hormis quelques rendez-vous de prestige, liés notamment aux commémorations des deux guerres mondiales et aux sommets réguliers tels le G8 ou le G20, l’année 2014 devrait être placée sous le signe des questions domestiques.

Changer l’Amérique, tenter de la changer, une dernière fois, durablement.  

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