Site icon La Revue Internationale

La RSE levier de performance durable: utopie ou réalité?

Le rapport Brovelli*, remis au 1er ministre publié  en juin 2013, s’intitulait « Responsabilité et performance des organisations ». Le Medef, en 2012, publiait le guide « Cap vers la RSE », sous-titré « Faire de la responsabilité sociétale de l’entreprise un levier de performance ; la CGPME titrait en 2011 son guide « La responsabilité sociétale des entreprises, une opportunité pour les PME ». Alors ? Vœu pieux, panurgisme, mode, louable intention, simple coïncidence … ou réalité partagée ? 
 
Nous pourrions également citer le  CJD,  qui a traduit et décliné le concept de développement durable en performance globale. Le Réseau des Entrepreneurs d’Avenir a, quant à lui, partagé et promu l’idée qu’il était possible de concilier performance économique, équité sociale et préservation de l’environnement, créant ainsi de la de la valeur partagée pour tout l’écosystème de l’entreprise. Des études récentes, dont celle publiée par Tennaxia en novembre 2013, convergent vers cette direction d’une RSE étroitement intégrée dans la stratégie des entreprises, dans leurs process, dans la fabrication de leurs produits ou la délivrance de leurs services, sans oublier le management des femmes et des hommes de l’entreprise. 
 

De nombreuses études révélatrices

 
Ainsi, Bearing Point en février 2013 publiait une étude intitulée «  Vers la performance durable », réalisée auprès de grandes entreprises. 
Cette étude montrait qu’historiquement, les démarches dites de développement durable s’étaient dans un premier temps concentrées sur la prévention des risques pour 85% des entreprises, même score sur la préservation de leur image et enfin, 70% sur la réduction des coûts. 
 
L’étude montrait également, une nette montée en puissance de l’innovation qui recueillait pas moins de 65% des suffrages, notamment dans la distribution, les biens de consommation et les industries B2B. Tous ces secteurs cherchent au final à fournir des services plus économes en ressources.  A noter qu’à l’avenir, les entreprises interrogées ont déclaré envisager de continuer à innover grâce au développement durable – pour près de 85% d’entre elles – et de renforcer les relations avec leurs parties prenantes ; ce dernier point étant comme nous l’avons déjà vu dans de précédents articles une pratique fondamentale de la RSE selon l’ISO 26000 et un principe clé pour la GRI G4.  Quant aux établissements financiers interrogés, 100% voient dans le développement durable un puissant levier pour renforcer leur culture d’entreprise et leur « marque employeur ».
 
Plus récemment, le 20 novembre 2013, Tennaxia a publié une étude sur la RSE et les pratiques de reporting RSE, réalisée auprès d’entreprises cotées (CAC Mid and Small) et non cotées, impactées par la publication du décret d’application de l’article 225 de la loi dite Grenelle 2 sur la publication des informations extra-financières. Que retenir de cette étude ? 
 
Pour plus de 70% du panel, le Grenelle de l’environnement a été un facteur déclenchant de la mise en œuvre d’une démarche RSE, ce qui revient à dire que ces démarches sont somme toute assez récente et par là même une marge de progression importante vers leur intégration dans le modèle de l’entreprise. Ce que corrobore  les  27% des Directions du développement durable qui ont intégré le Comité de direction et les 37% reportent désormais directement à leur Direction générale ; la prise en compte des enjeux du développement durable s’inscrit progressivement dans organes de décision des entreprises. 
 
Pour 60% des entreprises interrogées, l’évolution de leur stratégie est la raison de la mise en œuvre de leur RSE, pour 50% d’entre elles, la volonté d’être en conformité avec la loi et pour 45%, la volonté d’augmenter leur compétitivité. 
 

Prix et trophées font flores

 
A titre d’exemple on peut citer la 7ème édition des Trophées du Développement Durable du réseau GRANDDE, le 28 novembre dernier (GRANDDE,  réseau des entreprises normandes pour un devenir durable qui regroupe 150 membres).  Qu’y récompense-t-on ? Des initiatives et des bonnes pratiques d’entreprises qui se sont engagées dans des démarches responsables et qui sont réellement performantes. Pour une grande majorité d’entre elles, la RSE n’est pas un artifice cosmétique ou un ripolinage vert. Elle est le plus souvent véritablement intégrée à leur modèle d’affaire.
 
On voit aussi de nouvelles initiatives comme la création de l’Institut de l’Economie Circulaire qui réunit politiques et entreprises de toutes tailles. A ce sujet, la  sénatrice Chantal Jouanno et le député François-Michel Lambert ont indiqué le 15 novembre dernier qu’ils voulaient une loi qui permettrait de développer l’économie circulaire. On pourrait à l’envie citer beaucoup d’autres exemples…peut être trop diront certains. Pas si sûr ! 
 
La réalité de notre économie et les préoccupations forcément court termistes des chefs d’entreprise en cette période de crise, montrent qu’en matière de RSE, il faut continuer à travailler chaque jour à en démontrer la pertinence et cent fois sur le métier remettre son ouvrage de persuasion. 
 

RSE = performance ?

 
Il est certain que nombre d’experts et de chercheurs n’ont toujours pas réussi à démontrer la corrélation entre RSE et performance. A ceux là nous pourrions opposer qu’un constat troublant s’impose : les entreprises qui figurent dans les classements internationaux de la performance globale (ex. : le Global 100) développent une forte pertinence et implication RSE. Si l’on en revient aux entreprises françaises qui reçoivent prix et trophées liés au développement durable ou à la RSE, on constate également que se sont ces mêmes entreprises qui se distinguent souvent par leur dynamisme, leur innovation et leur bonne santé. Est-ce un hasard ?  
 
Quant à  Michaël Porter, le célèbre professeur de stratégie d’entreprise à l’Université d’Harvard, nous avions déjà noté dans un précédent article qu’il avait infléchi sa vision stratégique de l’entreprise et l’avait démontré, en publiant un ouvrage dédié à la Création de valeur partagée. Si les experts ne sont pas tous d’accord entre eux, poussera-t-on le scepticisme jusqu’à affirmer que Porter suit une mode en surfant sur une vague lui permettant de facturer au prix fort ses conférences partout dans le monde ? On peut se poser la question, mais cela n’aurait aucun sens. Se fondant sur de nombreux cas concrets, pour Porter, RSE et développement durable génèrent du business. Point. Mais ici comme en matière médicale, on trouvera pour longtemps encore des experts qui démontreront tout et son contraire. 
 

La RSE levier de performance durable, un concept qui monte, qui monte…

 
Le 27 novembre dernier avait lieu à Paris le lancement du nouveau référentiel de Reporting extra-financier GRI(1) G4, devant plus de 150 responsables de développement durable et de RSE, en partenariat avec le Global Compact (850 entreprises françaises adhérentes en 2013 contre 710 en 2012, pour 7700 entreprises adhérentes dans le monde), en partenariat avec TF1 et Tennaxia. Notons simplement que le lancement en France de la version 3 en 2006 s’était tenu dans un quasi anonymat. Le constat s’impose de lui-même ! 
 
A la fin de l’année 2014, pas moins de 2.500 entreprises françaises auront à publier un rapport extra-financier ; parmi celles-ci quelques 1.200 de plus de 500 salariés affichant un CA supérieur à 100 millions d’euros. En 2014, on attend le vote de la Directive européenne ; elle concernera 18.000 entreprises européennes de plus de 500 salariés pour un CA de 40 millions d’euros ou plus. 
 
Le 5 décembre 2013, l’IIRC(2) publiait ses lignes directrices pour un rapport intégré. Cette publication ne doit pas être perçue et vécue comme une punition ou une énième exigence réglementaire. Elle nous apparaît comme étant en réalité une formidable opportunité pour les entreprises de démontrer  leur dynamisme, de valoriser leur capital immatériel et finalement de prouver leur performance globale et durable auprès de leur écosystème et dans un seul et même document.  Est-ce un hasard si le 19 décembre 2013, Capitalcom en partenariat avec Euronext, l’ESSEC et IIRC intitulait leur conférence « Du reporting financier et extra-financier au rapport intégré ; une dynamique vers la Performance Responsable » ? 
 
Les initiatives se font de plus en plus nombreuses pour intégrer la RSE dans le modèle des entreprises, dans leur stratégie. Ainsi certaines entreprises ont fixé un cap ambitieux appuyé par une forte communication à l’instar de Marks & Spencer et son Plan A (parce qu’il ne peut exister désormais de plan B). D’autres  ont déjà indexé une partie de la rémunération des managers sur la performance RSE de l’entreprise, ou ont l’intention de le faire. D’autres ont assorti leurs enjeux RSE de KPI’s (52% des entreprises selon l’étude Tennaxia), une démarche particulièrement révélatrice de la volonté d’agir en mesurant les efforts engagés. Et on pourrait citer encore à l’envie la montée en puissance des achats responsables, de l’économie circulaire, de projets d’écologie industrielles…
 
Alors,  RSE levier de performance durable : utopie ou réalité ? A vous de juger…à vous de jouer et à nous… de vous aider à transformer l’essai.
 
Bertrand Desmier – Directeur Conseil RSE chez Tennaxia  – www.tennaxia.com
1. GRI : Global Reporting Initiative – 2. IIRC : International Integrated Reporting Council
 
Quitter la version mobile