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Marathon des vœux pour François Hollande: une indispensable autorité

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Ce mardi 7 janvier, François Hollande adressera ses vœux aux corps constitués, c’est-à-dire les grandes administrations de l’État, les institutions publiques et les plus hautes magistratures du pays puis aux autorités religieuses. Si selon un sondage BVA pour Le Parisien publié ce dimanche, son principal problème viendrait de son manque de « présidentialité », le chef de l’Etat devrait profiter de ces trois semaines de vœux qui l’attendent pour affirmer son autorité. Point d’orgue de ce marathon : la conférence de presse prévue le 14 janvier, à l’occasion des vœux à la presse.

JOL Press : François Hollande va poursuivre en janvier son marathon des vœux. A quoi faut-il s’attendre ?

Christian Delporte : Les vœux présidentiels sont avant tout un exercice très formel mais ceux-là s’inscrivent dans un contexte particulier à quelques mois de la campagne électorale des municipales et des européennes. Ce marathon des vœux est une séquence politique qu’il ne faut pas négliger où le chef de l’Etat se met en avant et où le Premier ministre s’efface. Le président a donc trois semaines pour s’imposer et pour parler d’avenir.

Les vœux présidentiels existent depuis le général de Gaulle. Est-ce qu’il y a des vœux qu’on a retenus plus que d’autres ? A la vérité, non. Certes, on se souvient peut-être des premières interventions de mandats mais, dans la mesure où la parole présidentielle est formatée, sur le fond, on ne retient pas grand-chose.

JOL Press : Qu’attend-on de ce type d’exercice ?

Christian Delporte : Sur la forme, on attend de l’autorité ; le chef de l’Etat doit montrer qu’il tient le cap. Et François Hollande l’a bien compris lors de ses vœux aux Français : il n’a pas prononcé le nom de son Premier ministre, s’est mis en avant et a confirmé ses engagements. Il a dessiné ce que seront ses propositions dans les jours qui viennent, il a mis en appétit, il a su donner du grain à moudre aux médias, il a suscité l’intérêt autour de propositions comme le « pacte de responsabilité » pour les qui allégerait les contraintes des entreprises afin de « gagner » la « bataille » de l’emploi.

Il est fort à parier qu’il va poursuivre la séquence des vœux et la conférence de presse sur le même ton. La démarche et la stratégie c’est d’attirer l’attention et ensuite de développer ces annonces.

JOL Press : François Hollande semble maîtriser l’exercice de la conférence de presse, cependant sa popularité est au plus bas et les élections approchent. A quoi faut-il donc s’attendre le 14 janvier prochain ?

Christian Delporte : On attend plusieurs choses : une re-présidentialisation, une détermination affirmée mais aussi un cap fixé sur la question de l’emploi et des impôts ainsi que des propositions concrètes. François Hollande doit montrer qu’il agit, qu’il n’est pas passif et marquer la rupture avec 2013. L’année 2013 a été très mauvaise, il doit donc redonner de l’espoir pour 2014. Il doit aussi affirmer son autorité vis-à-vis des ministres, se comporter comme un général qui remet ses troupes en ordre.

JOL Press : S’il fallait lui donner un conseil en communication, quel serait-il ?

Christian Delporte : Quand tout va bien, on trouve que la communication du président est formidable et quand la situation est mauvaise on dit que la communication de l’Elysée l’est aussi. Si le taux de chômage n’était pas si élevé, si la croissance atteignait les 4%, on n’aurait rien à redire à la communication de François Hollande. Le président a, en effet, besoin de gagner en popularité mais cela prend beaucoup de temps. Sa communication doit être un mélange très subtil entre la proximité et l’autorité d’un chef d’Etat. C’est difficile à faire mais c’est ce qu’attendent les Français.

Selon un sondage BVA pour Le Parisien, paru ce dimanche, 56% des Français jugent le président « sympathique » mais seuls 31% ont un jugement positif sur sa « compétence »… S’il ne prouver sa compétence que par des résultats, il peut monter aux Français qu’il sait où il va et qu’il maîtrise la situation.

JOL Press : Dans ce contexte l’annonce d’un remaniement serait-elle judicieuse ?

Christian Delporte : On ne fait pas de remaniement à quelques semaines d’élections  qui ne s’annoncent pas sous les meilleurs auspices. Remplacer un ministre ou deux ne changerait rien, si changement il doit y avoir c’est le Premier ministre qui doit être remplacé. Mais ce genre de remaniement ne se fera pas au mois de janvier mais plutôt au mois de juin, après les élections. Quand on change de gouvernement, on montre aux Français qu’on souhaite tourner une page. Les municipales mais plus encore les européennes ne s’annonçant pas des plus favorables pour la majorité, François Hollande n’a aucun intérêt à griller cette cartouche.

Il ne faut pas oublier que le quinquennat a bouleversé les règles de la Ve République. Désormais la responsabilité entière du mandat repose sur le président donc il est obligé de se mettre en avant.

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

Christian Delporte est professeur d’histoire contemporaine à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Spécialiste de l’histoire des médias et de la communication politique, il est l’auteur de nombreux ouvrages, parmi lesquels La France dans les yeux (Flammarion, 2007) et Une histoire de la langue de bois (Flammarion, 2009).

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