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Crise de popularité : quelles sont les options de François Hollande ?

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Le baromètre de février de TNS Sofres indique que la cote de confiance de François Hollande chute à 19%. Le président de la République perd trois points de confiance, tandis que la proportion de ceux qui ne lui font pas confiance augmente de deux points pour culminer à 78%. Vingt et un mois après leur élection, Jacques Chirac était à 35% de cote de confiance (1997), et Nicolas Sarkozy à 37% (2009), rappelle TNS Sofres. Le retrait de la loi famille, pourtant jugée nécessaire par la droite comme par la gauche, ne va rien arranger à l’affaire.

Comment expliquer ces hésitations et ce manque d’autorité à la tête de l’Etat ?  Eléments de réponses avec le journaliste et écrivain André Bercoff. Entretien.

JOL Press : Retrait de la loi famille au lendemain de la Manif pour tous, rétropédalage gouvernemental, comment qualifier l’action de l’exécutif depuis quelques jours ?

André Bercoff : On a l’impression que toutes les boussoles se sont affolées et que le gouvernement a perdu les mots, les sens et le sens des mots. Ce qui est tout à fait étonnant, c’est que François Hollande ait cédé à la rue, on a l’impression de revivre, à petite échelle, les événements du CPE avec Dominique de Villepin. On voit là un signe de faiblesse d’un gouvernement qui cède à la pression de la rue et qui, en même temps, brouille les pistes en affirmant être disposé à « examiner sans tarder » certains aspects du projet de loi famille qu’il vient d’écarter du calendrier parlementaire.

Du coup, un grand nombre de socialistes sont en colère parce qu’à moins de deux mois des municipales l’action gouvernementale fait désordre, c’est le moins qu’on puisse dire. Ce n’est même plus de la cacophonie à ce stade. Tous les couacs auxquels nous avons assisté depuis le début du quinquennat entre Arnaud Montebourg et Jean-Marc Ayrault, entre Manuel Valls et Christiane Taubira ou Cécile Duflot, ajoutés à cette affaire, révèlent une impuissance à gouverner qui est très préoccupante.

JOL Press : Faut-il pour autant parler d’amateurisme ?

André Bercoff : Tout se passe comme si François Hollande était encore Premier secrétaire du PS. Rue de Solferino, il alternait entre les courants et parvenait à faire la synthèse entre les différentes sensibilités. Sauf qu’il n’est plus à la tête du PS mais à la tête de l’Etat et c’est beaucoup plus compliqué. François Hollande a-t-il atteint son niveau d’incompétence, selon le sacro-saint principe de Peter ? On peut se poser la question.

JOL Press : Quelles sont les conséquences de ces hésitations pour la suite de son quinquennat, au-delà de sa chute de popularité ?

André Bercoff : C’est bien tout le problème. La Constitution va lui permettre de tenir jusqu’en 2017 mais va-t-il redresser la barre ? Dans cette course contre la montre entre une gauche déboussolée, une droite qui ne sait pas non plus où elle est, la contestation va-t-elle s’exprimer dans la rue ou dans les urnes ?

Je me permets de rappeler une phrase écrite par François Hollande en 2006, dans Devoirs de vérité, aux éditions Stock : « Je préconise un exercice de vérification démocratique au milieu de la législature. (…) Si d’aventure, à l’occasion de cette vérification, une crise profonde se produisait, ou des élections législatives intervenaient, contredisant l’élection présidentielle, nous en tirerions toutes les conséquences en quittant la présidence » Avec du recul, cet extrait est intéressant car le chef de l’Etat explique ce qu’il faudrait faire si une crise grave devait arriver.

Sans jouer les voyantes, il est évident que la situation est extrêmement floue. Je ne vois pas bien où est la solution étant donné que les institutions protègent le président de la République qui est la clé de voute du pouvoir. Comme on dit « Qui votera, verra… »

JOL Press : Cette situation peut-elle malgré tout perdurer ?

André Bercoff : La situation peut en effet rester floue mais personne ne le souhaite vu l’état de l’économie. Je crois que l’erreur majeure a été de penser, par cynisme ou par simple calcul, que mettre en avant les problèmes sociétaux serait une manière de montrer qu’on est dans l’action à l’heure où la situation économique était au point mort. François Hollande a pensé qu’il était facile de faire passer un certain nombre de réformes demandées soit par des minorités, soit par des communautés. Or c’était un mauvais calcul, même si personne ne pouvait prévoir une si importante mobilisation des Français sur ces sujets. Au lieu de se concentrer sur le chômage, la dette, la sécurité et l’emploi, le gouvernement a donné l’impression de se précipiter sur le sociétal.

Quand on voit les chiffres du chômage, quand on entend le général Soubelet, le numéro 3 de la gendarmerie, dire que « 65 % de ceux qui, dans les Bouches-du-Rhône,  se sont rendus coupables d’un certain nombre d’exactions » sont relâchés, on se dit que le gouvernement s’est trompé de priorités.

Propos recueillis par Marine Tertrais pour JOL Press

André Bercoff est écrivain, journaliste et homme de télévision. Depuis son livre, L’Autre France, en 1975, il est l’auteur d’une trentaine de romans et d’essais, dont Qui choisir (2012 – First éditions), Moi, Président… (2013 – First éditions) ou Je suis venu te dire que je m’en vais (novembre 2013 – Éditions Michalon).

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