Emprisonnée depuis 2011, l’ancienne Première ministre ukrainienne et leader de la révolution orange en 2004 a été libérée samedi 22 février 2014. Celle qui s’est toujours fermement opposée au président Viktor Ianoukovitch, désormais destitué, entame son grand retour sur la scène politique et médiatique. Elle ne fait pourtant pas l’unanimité auprès des Ukrainiens, qui pour certains considèrent que la « dame aux tresses » appartient au passé.
Un visage de madone slave, auréolé d’une couronne de tresses blondes. On donnerait à Ioulia Timochenko le bon Dieu sans confession. L’opposante ukrainienne est pourtant loin de faire l’unanimité.
La princesse du gaz
Née le 27 novembre 1960 dans la ville industrielle de Dniepropetrovsk, à l’est de l’Ukraine, Ioulia Timochenko obtient en 1984 son diplôme en économie et cybernétique de l’université d’État de l’Oblast. Elle entame sa carrière professionnelle à l’Usine Lénine de construction mécanique, avant de fonder, en 1991, la Compagnie ukrainienne du gaz.
C’est là qu’elle fait la connaissance de Pavel Lazarenko, gouverneur de la région, avec qui elle se lie d’amitié. En 1995, devenu Premier ministre, l’homme politique propulse sa jeune protégée à la tête de la compagnie privée SEU (Systèmes Energiques Unis d’Ukraine). Très vite, les contrats pleuvent. Les pots de vin aussi. Ioulia Timochenko devient l’une des premières fortunes du pays.
En 1999, Pavel Lazarenko, reconnu coupable d’escroquerie et de blanchiment d’argent, est arrêté. Ioulia, elle, n’est pas inquiétée. Elle a senti le vent tourner. Et a su s’éloigner de lui à temps… pour se rapprocher de Leonid Koutchma, le président de la République. <!–jolstore–>
L’entrée en politique
En décembre de la même année, Ioulia Timochenko entre en politique. Élue députée de la région de Kirovohrad, elle se voit proposer, par le nouveau Premier ministre, Viktor Iouchtchenko, le poste de vice-Premier ministre et le portefeuille de l’Énergie.
Au gouvernement, la « princesse du gaz », comme on la surnomme, parvient à restructurer le secteur de l’énergie et à éponger la dette ukrainienne contractée auprès de la Russie. Son succès lui donne des ailes. Et Ioulia Timochenko ne tarde pas à critiquer ouvertement les autres membres du gouvernement.
Le désaveu
Las de la voir interférer dans ses affaires, le président Leonid Koutchma la prend en grippe, et finit par la limoger en janvier 2001. Ioulia Timochenko, poursuivie pour falsification de documents et contrebande, est alors incarcérée.
Quand elle sort de prison un mois plus tard, Ioulia Timochenko est victime d’un accident de voiture. La belle, qui en sort miraculeusement indemne, crie à l’attentat et parvient à fédérer l’opposition.
Symbole de la révolution orange de 2004, Ioulia Timochenko devient, après l’investiture du candidat Iouchtchenko à la présidence de la République, Premier ministre. Limogée en 2005, elle reprend ses fonctions en 2007, avant de se présenter, en 2010, à l’élection présidentielle.
Battue par Viktor Ianoukovitch, Ioulia Timochenko voit alors son gouvernement renversé par le nouveau président de la République.
La libération
Reconnue coupable d’abus de pouvoir, l’ancienne icône glamour est condamnée, en octobre 2011, à une peine de 7 ans de prison.
Fini les robes moulantes et les talons aiguilles. Ioulia Timochenko s’affiche en tenue sobre, des petites lunettes vissées sur le nez. Malade, elle a compris qu’elle n’allait plus pouvoir jouer de sa féminité. Désormais, c’est l’image d’une femme combattive qu’elle veut renvoyer.
Libérée de prison le 22 février 2014 après trois mois d’émeutes à Kiev contre le gouvernement de Ianoukovitch, Ioulia Timochenko est apparue en fauteuil roulant, à cause de ses problèmes de santé, sur la place Maïdan, symbole de la contestation. Devant plus de 50 000 personnes, elle a prononcé un discours rendant hommage aux « héros de l’Ukraine ».
Mais les zones d’ombres qui subsistent sur son parcours et son incapacité à sortir le pays de la corruption lorsqu’elle fut au pouvoir laissent sceptiques certains Ukrainiens quant à son avenir politique.