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Rwanda: qui est Pascal Simbikangwa, accusé de complicité dans le génocide?

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« La justice, pas la vengeance ». C’est avec ces mots que le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) entend aujourd’hui rendre justice aux victimes et aux rescapés du génocide perpétré il y a vingt ans au Rwanda contre la communauté tutsie.

Le combat du collectif a notamment permis l’ouverture, mardi 4 février, du procès de Pascal Simbikangwa, ancien capitaine de l’armée rwandaise et ancien officier des renseignements, proche du président hutu Juvénal Habyarimana, dont l’assassinat le 6 avril 1994 avait été l’élément déclencheur du massacre de centaines de milliers de Tutsis et de Hutus modérés.

« Le tortionnaire » proche du président

Né en 1959 dans la région de Gisenyi, dans le nord-ouest du Rwanda, Pascal Simbikangwa, surnommé « le tortionnaire », était un ancien membre des renseignements généraux du régime du président Habyarimana, au pouvoir de 1973 à 1994. Fervent partisan de l’idéologie extrémiste du « Hutu Power », il est aujourd’hui suspecté d’avoir contribué à la préparation du génocide des Tutsis en 1994.

Après avoir intégré la garde présidentielle en 1982, Pascal Simbikangwa entre au renseignement militaire des forces armées rwandaises en 1987, un an après avoir subi un accident de voiture qui le laisse paraplégique et l’oblige à se déplacer en chaise roulante. En 1992, il est affecté au Bureau de synthèses et des données en tant que directeur adjoint. Avant le génocide de 1994, on lui prête la responsabilité de l’assassinat de plusieurs opposants au président hutu.

Un fournisseur d’armes et d’encouragement aux génocidaires

Il aurait également fait partie de l’Akazu (qui signifie littéralement « petite maison » ou « maisonnée »), une organisation parallèle secrète exerçant un pouvoir étroit autour du président et de son clan, et dont les membres auraient participé à l’organisation du génocide.

Au début des années 90, l’ancien capitaine aurait également contribué à la création de la Radio Télévision Libre des Mille Collines (RTLMC), qui diffusait une violente propagande de haine contre les Tutsis entre 1993 et 1994, et qui a été l’un des instruments de la planification et de l’exécution du génocide.

Pendant le génocide, qui en trois mois a entraîné la mort de plus de 800 000 personnes selon les chiffres de l’ONU, des barrages étaient mis en place à Kigali, la capitale rwandaise, afin d’identifier et de massacrer les Tutsis. Pascal Simbikangwa est soupçonné d’avoir fourni des armes, des instructions et un encouragement moral aux gardiens de ces barrages et aux miliciens, aboutissant au meurtre de milliers de Tutsis.

Nom d’emprunt

Après avoir un temps perdu sa trace, c’est au début des années 2000 que l’ancien capitaine rwandais réapparaît à Mayotte, dans les fichiers de la police, sous un nom d’emprunt : David Safari Senyamuhura. Il est notamment soupçonné d’être à la tête d’un trafic de faux papiers.

Interpellé en 2006 puis relâché à cause d’un manque de preuves, il est arrêté une seconde fois en 2008 : c’est là que les autorités font le lien avec sa véritable identité. Il faisait alors l’objet d’un mandat d’arrêt Interpol pour avoir fait partie des « escadrons de la mort » pendant le génocide de 1994.

Ouverture du procès

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), mis en place en novembre 1994 et qui s’était déjà penché sur son cas, a confié l’enquête au Tribunal de grande instance de Paris. Après avoir été maintenu en détention provisoire à Mayotte, Pascal Simbikangwa a été transféré en 2009 à La Réunion avant d’être envoyé dans la prison de Fresnes, à Paris, où il est maintenu en détention provisoire depuis mars 2011.

Suite à la plainte déposée en février 2009 par le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA), le procès de Pascal Simbikangwa s’ouvre du 4 février au 28 mars 2014 devant la Cour d’assises de Paris.

Il est le premier ressortissant rwandais accusé de complicité dans le génocide et de crimes contre l’humanité à comparaître devant la Justice française.

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