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Comment le changement d’heure nuit-il à notre santé?

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La date du changement d’heure n’est pas aisée cette année, puisqu’elle ne tombe pas le même week-end que celui du lundi de Pâques, jour férié, qui aurait permis de se remettre de cette perturbation temporelle. Mais quels sont les effets exacts du changement d’heure sur notre santé ? Eléments de réponse avec Marc Schwob, psychiatre et chronobiologiste auteur du livre « Les rythmes du corps : Chronobiologie de l’alimentation, du sommeil, de la santé… » chez Odile Jacob

JOL Press : Est-ce que le changement d’heure nuit vraiment à notre santé ?
 

Marc Schwob Oui, le changement d’heure nuit réellement à la santé, surtout chez les enfants et les personnes âgées, notamment au niveau du sommeil et de la fatigue au cours des journées. C’est à dire que pendant trois ou quatre jours, il sera très difficile pour ces deux extrémités de la vie de s’adapter aux nouvelles heures.
 

JOL Press : Que préconiser pour faciliter le changement d’heure ?
 

Marc Schwob : Pour rendre le changement d’heure plus facile et moins désagréable en tant qu’adulte (il est un peu plus complexe de faciliter le processus pour un enfant), il faut essayer de se coucher une demie-heure plus tôt pendant les deux ou trois jours qui précèdent la date du changement d’heure afin de s’habituer au changement.

JOL Press : Est-ce qu’une vie sans changement d’heure serait, selon-vous, préférable ?
 

Marc Schwob : En réalité, cela dépend des personnes ; il y a des gens qui aiment un horaire en particulier et qui aimeraient effectivement que cela ne change pas. « Préférable » n’est pas le terme, mais en tout cas ça serait certainement plus agréable.

JOL Press : Est-ce que la suppression du changement d’heure pourrait permettre d’éviter des problèmes de santé aux personnes âgées et aux enfants ?
 

Marc Schwob : Oui, et cela coûterait moins cher que l’économie théorique d’énergie. Si on se base sur la consommation d’énergie d’une ville comme Bordeaux, la procédure du changement d’heure est largement battue en brèche par le coût médico-social engendré.

Par exemple le nombre de consultations pédiatriques ou de problèmes dans les services de gériatrie qui augmentent, ainsi que l’importante consommation de somnifères et de sirops pour dormir chez les enfants. On arriverait à une économie correcte si ce changement d’heure n’existait pas.

Par ailleurs, le lundi et les jours qui suivent le changement d’heure sont généralement des jours noirs pour les assureurs, notamment au niveau des accident de travail, des accidents de voiture, des blessures liées au sport chez les adolescent. Le problème de sommeil et de fatigue n’est en réalité que la partie immergée de l’iceberg ; le changement d’heure et la fatigue qu’il engendre peut induire des choses beaucoup plus graves, même si c’est de façon indirecte.
 

JOL Press : Est-ce que certaines mesures ont déjà été prises pour sensibiliser le gouvernement à ce problème ?
 

Marc Schwob : Il y a certains pays du Nord de l’Europe qui commencent en effet à se préoccuper de ce problème et s’interrogent pour savoir s’ils pourraient éviter le changement d’heure, quitte à se mettre en décalage par rapport aux autres pays européens.

Mais là où le changement d’heure joue beaucoup, c’est surtout au niveau des bourses et de l’économie ; certaines entreprises veulent garder le même décalage horaire selon le pays dans lequel elles se trouvent, mais ces problèmes devraient être surmontables si les gouvernement s’accordaient.
 

JOL Press : Si le changement d’heure n’existait plus en France, pensez-vous que les conséquences sur la santé seraient remarquables ?
 

Marc Schwob : C’est certain. Mais cela soulève une autre question : quelle est l’heure qu’il faudrait préférer, bien que le fait de gagner une heure soit plus facile à vivre, il faudrait probablement effectuer un sondage pour savoir si les gens préfèreraient l’heure d’été ou l’heure d’hiver. Mais ce qui est sûr, c’est que ce changement, qui s’effectue deux fois par an, est pénible pour notre santé.

 

JOL Press : Quelle est la différence entre le décalage horaire dû à un voyage et celui dû au changement d’heure ?
 

Marc Schwob:  Il n’y en a pas vraiment, mais un voyage est un acte volontaire, lorsqu’on voyage on ne subit pas, on agit, sauf pour les enfants pour qui dans les deux cas la situation sera identique et demandera un temps d’adaptation. Chez une personne consciente ce changement est désiré.
 

JOL Press : Est-ce que vous pensez que le changement d’heure d’hiver (c’est à dire le fait de gagner une heure) influe sur le moral des gens ?
 

Marc Schwob : Je crois que le changement d’heure agrave le problème du syndrome automnal dépressif qui est un syndrome reconnu et particulièrement flagrant dans les pays du Nord de l’Europe. C’est un syndrome qui survient une fois passée l’Equinoxe de l’Automne, le 21 septembre, quand les journées commencent à raccourcir et le taux de luminosité se réduit.

Quand le taux de luminosité se réduit, le taux de sérotonine, les molécules de l’humeur fabriquées par notre cerveau, est moins important. Si, en plus des syndromes dépressifs liés à l’autonme, on effectue un changement d’heure, cela aggrave le problème.

Certains de mes patients ont ainsi besoin de luminothérapie dès le passage à l’heure d’hiver, cherchant ainsi à reproduire la luminosité de l’heure d’été. Cela ne consiste pas à se placer devant une lampe une demie-heure pour se sentir mieux, c’est un travail qui ne se révèle efficace que grâce à une longue exposition, comme en été au soleil finalement.

Propos recueillis par Eloïse Oisel pour JOL Press

 

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