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En Espagne, être étudiant après 30 ans est de plus en plus courant

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En Espagne, les étudiants âgés de plus de 30 ans sont de plus en plus présents sur les bancs des universités. C’est ce que révèle le quotidien El Pais dans un article publié le 23 février dernier:  sur les 1.450.036 étudiants inscrits en 2012-2013, 17,6% ont plus de 30 ans, soit 255.206 étudiants selon les chiffres du ministère de l’Education. 

Pour comprendre ce phénomène qui ne concerne pas seulement l’Espagne, mais d’autres pays européens, le sociologue espagnol Antonio Ariño, qui a dirigé l’étude « Université sans classes, Conditions de vie des étudiants universitaires en Espagne » répond aux questions de JOL Press.

JOL Press: La présence des étudiants trentenaires s’est-elle accentuée avec la crise économique ? 
 

Antonio Ariño: C’est un phénomène qui se produit depuis des années. La légère augmentation des étudiants de plus de 25 ans à l’université s’est accélérée depuis le début de la crise.

JOL Press: Quel est le profil de ces étudiants ?
 

Antonio Ariño: Le profil dominant est sans aucun doute celui des étudiants issus de foyers aux ressources économiques moyennes voire faibles. Mais parmi ces étudiants « mûrs » figurent aussi des étudiants déjà titulaires d’un diplôme et qui s’inscrivent dans une autre filière, et ceux qui veulent intégrer le nouveau processus de Bologne, mis en place en 1999 et qui vise à faire converger les différents systèmes d’enseignement supérieur. 

Il faut distinguer deux tendances: une tendance de fond observée dans plusieurs pays européens où la durée des études est plus longue, liée à l’évolution démographique et au marché du travail, qui doit être comprise avec la transformation du rôle de l’université dans la société. L’autre tendance est clairement liée à la crise et à la recherche de meilleures opportunités de formation. 

JOL Press: Est-ce une spécificité espagnole, ou bien ce phénomène se produit-il aussi dans d’autres pays européens ?
 

Antonio Ariño: Au contraire, on peut dire que ce phénomène a commencé plus tôt dans d’autres pays européens. Comme dans la plupart des cas, cette tendance s’est affirmée plus tard en Espagne, et a été accélérée par la crise économique. 

JOL Press: Quel est l’impact de cette tendance sur le mode de vie des étudiants de plus de 30 ans ?
 

Antonio Ariño: Puisque le système de bourses d’études en Espagne est très déficient, les étudiants ne peuvent évidemment pas mener une vie indépendante, sauf s’ils trouvent une profession bien rémunérée. En outre, l’Université espagnole n’a toujours pas répondu de manière adéquate à la question des parcours à temps partiel. Les étudiants se trouvent souvent dans l’obligation de suivre des cours à distance : il s’agit d’un défi important pour l’avenir.

JOL Press: Dans ce contexte de crise économique, les étudiants peuvent-t-ils vraiment espérer trouver plus facilement un emploi s’ils sont plus diplômés?
 

Antonio Ariño:  D’après les statistiques, il y a une relation claire entre les offres d’emploi et le niveau d’éducation. Mais les études ne sont pas une garantie d’accès à l’emploi: ils fournissent la clé pour entrer dans les « salles d’attente » d’emplois qualifiés.

JOL Press: En France, une étude – « Généation quoi » – vient d’être menée sur la désillusion des jeunes aujourd’hui. Pensez-vous que la jeunesse espagnole est davantage touchée par ce phénomène de « génération perdue » ?
 

Antonio AriñoLa situation en Espagne est beaucoup plus grave qu’en France, parce que le taux de chômage des jeunes est beaucoup plus élevé et jusqu’à présent, les politiques de l’emploi des jeunes ont brillé par leur absence. L’horizon pour les jeunes générations en Espagne est très sombre. 

Propos recueillis par Louise Michel D. pour JOL Press

 

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