Site icon La Revue Internationale

Le «come back» politique: tout un art

a.jpga.jpg

[image:1,l]

Il ne se passe plus une semaine sans que la presse envisage le retour d’une personnalité politique mise à l’écart du pouvoir, ce qui donne des idées même à ceux dont les sondages ne mesurent plus la cote de popularité. (Crédit : Shutterstock.com)

Voici, de Napoléon à Sarkozy, en passant par de Gaulle, Mitteranrand, Balkany, Juppé, Rocard, Aubry et quelques autres, un tableau de ces personnalités qui, alors qu’elles semblaient « finies », reviennent sur le devant de la scène. Du départ honteux en solitaire au retour glorieux du « rassembleur », le come-back en politique présente autant d’étapes stratégiques à ne pas manquer que de pièges à éviter.

Ce livre, manuel indispensable à toute traversée du désert, en dresse un inventaire des plus éclairants et se révélera tout aussi précieux à ceux qui piaffent de retrouver l’arène qu’à ceux, mi-amusés, mi-inquiets, qui souhaitent en décrypter les lois.

Extraits de Come back ! : ou L’art de revenir en politique de Christian Delporte (Flammarion 2014)

Il ne se passe plus une semaine sans que la presse envisage le retour d’une personnalité politique mise à l’écart du pouvoir, ce qui donne des idées même à ceux dont les sondages ne mesurent plus la cote de popularité. Interrogé le 1er juillet 2013 par Melty.fr, Philippe Douste-Blazy, ministre des Affaires étrangères jusqu’en 2007, devenu conseiller spécial auprès du Secrétaire général des Nations unies, avouait : « Je n’exclus pas de revenir un jour. »

On y verra sans doute le signe d’une époque, marquée par le désarroi du citoyen qui ne sait plus à quel saint se vouer, nourrie d’une trouble nostalgie du temps passé, où tout allait mieux avant, frappée par l’inquiétude collective d’un lendemain plus sombre que la veille. En période de crise, on a tendance soit à succomber aux sirènes de la démagogie, soit à se tourner vers les hommes et les femmes d’expérience et à remettre son sort entre leurs mains. On y décèlera aussi l’appétit des médias à regarder la politique au prisme des histoires individuelles, à pénétrer l’intimité des hommes publics, à décrypter les sentiments qui les ani- ment, à saisir leurs plus fortes émotions, à comprendre leur action à l’aune de leur psychologie.

[image:2,s]

Et quel plus beau récit que celui de la mort vaincue, de la remontée des enfers, de la renaissance à la vie, de la revanche qui, parfois, prend les couleurs de la vengeance ? Mais ne soyons pas dupes. La belle histoire de la résurrection politique ne pourrait être écrite sans le consentement actif de son principal acteur. À l’âge où la politique ne se conçoit pas sans maîtrise de la communication, où ceux qui l’animent n’ignorent plus rien du système médiatique et s’entourent de conseillers experts dans l’art de modeler une image et de faire passer un mes- sage, le récit du retour est bâti à l’initiative des intéressés eux-mêmes.

Bien sûr, ils ne l’avoueront pas, bien sûr, ils nieront les propos qu’on leur prête sur leur ambition de revenir dans le jeu politique. Mais ce sont eux qui, au tra- vers de leurs confidences ou celles de leurs amis, entre- tiennent le feuilleton de l’inévitable comeback.

Martine, Ségolène, Nicolas… La chronique du retour réunit ses stars. Leur popularité dans les sondages, souligné par le désamour des Français pour le président de la Répu- blique et son gouvernement, alimentent le suspense. On ne pose même plus la question du possible, mais celle du moment. « Quand reviendra-t-elle ? » s’interroge en une Le Journal du dimanche, le 16 septembre 2012, à propos de Martine Aubry que le lecteur découvre tout sourire, descen- dant du train qui la conduit de Lille à Paris (à moins que cela ne soit le contraire).

Créant la surprise en 2008 en devenant la Première secrétaire du PS, battue en 2012 par François Hollande à la primaire socialiste, la voici hissée au rang de « recours » d’une gauche au pouvoir en proie aux pires difficultés. Le chef de l’État sera-t-il sauvé en nom- mant sa vieille ennemie à Matignon ? La suite au prochain épisode. En attendant, la presse observe à la loupe les décla- rations et scrute les moindres gestes de Ségolène Royal qui croit toujours à son destin national et ne s’en cache guère. 

—————

Christian Delporte est professeur d’histoire contemporaine à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Spécialiste de l’histoire des médias et de la communication politique, il a publié, entre autres, une Histoire de la langue de bois (désormais en Champs-Flammarion).

Quitter la version mobile