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Les conséquences de la levée du secret bancaire du Luxembourg

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Le Luxembourg, dont 30 % du PIB dépend du secteur financier et de la discrétion des banques, a accepté après plus de onze années de résistance de lever son secret bancaire, dans le cadre d’un accord, des chefs d’Etats européens, qui vise à mettre en œuvre l’échange automatique d’informations sur les sommes investies par un ressortissant européen dans un autre pays de l’Union que le sien. Mais qu’est-ce qui a pu convaincre le grand-duché et l’Autriche, qui résistait elle aussi, d’accepter cet accord ?

Les résistances du grand-duché

Depuis 2008, la directive européenne sur la fiscalité de l’épargne, qui pose le principe de l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales, attendait la signature de l’ensemble des pays membres de l’Union européenne, car les décisions en matière de fiscalité requièrent l’unanimité des 28. Mais l’Autriche et le Luxembourg résistaient aux pressions de leurs voisins européens et refusaient d’abandonner le secret bancaire.

Jusqu’alors, le secret bancaire était un tabou au Luxembourg que peu de gouvernements n’avaient osé briser. Vienne et Luxembourg refusaient de signer le texte, considérant l’égalité de traitement avec la Suisse, le Liechtenstein, Monaco, Andorre et Saint-Marin, comme un préalable à leur propre accord. Treizième place financière mondiale et deuxième centre international de fonds d’investissement après les États-Unis, le Luxembourg cherchait malgré tout à se défaire de l’image de paradis fiscal peu regardant sur la provenance des capitaux et de destination idéale pour les fraudeurs fiscaux.

Les conditions de l’accord

« Cela fait longtemps que le Luxembourg avance vers une place bancaire transparente. Nous avons aujourd’hui confirmé que nous voulons aller dans cette direction », a affirmé le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, jeudi 20 mars. « Nous voulions des garanties et nous les avons eues », a-t-il ajouté. Xavier Bettel a, en effet, obtenu de la Commission européenne qu’elle presse la Suisse, Andorre, Monaco, San Marin et le Liechtenstein de s’aligner d’ici à la fin de l’année, sur les pays de l’Union européenne. « Nous avons obtenu la garantie que la négociation avec ces pays ne sera pas une simple discussion autour d’un café et d’une assiette de biscuits », a précisé le Premier ministre luxembourgeois.

Herman Van Rompuy s’est félicité de la signature de cet accord : « C’est un pas indispensable pour permettre aux États-membres de mettre un frein à la fraude et à l’évasion fiscale », a-t-il déclaré. L’évasion fiscale représenterait un manque à gagner de 1000 milliards d’euros par an pour l’Europe, selon le président du Conseil européen. L’enjeu était donc de taille.

Dans la lignée d’une norme de l’OCDE

Les pays membres du G20 avaient d’ores et déjà approuvé une norme d’échange automatique de données fiscales conçue par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), et que plus de 42 pays s’étaient engagés à appliquer, dont le Luxembourg. Cette levée du secret bancaire était donc attendue de la part du grand-duché. S’inspirant de la loi américaine FATCA (Foreign account tax compliance act), qui a marqué un tournant dans la lutte contre l’évasion fiscale dans le monde, cette norme, qui devrait entrer en vigueur fin 2015, est compatible avec les règles européennes.

« Nous travaillons très étroitement avec la Commission européenne pour s’assurer de la compatibilité » de cette norme avec les initiatives européenne, avait assuré Pascal Saint-Amans, responsable des questions fiscales de l’OCDE, en février dernier. « Avec la mondialisation du système financier mondial, il est de plus en plus facile pour les contribuables d’effectuer, de conserver et de gérer des placements en dehors de leur pays de résidence », rappelait alors Angel Gurria, Secrétaire général de l’OCDE. « Cette nouvelle norme sur l’échange automatique de renseignements va intensifier la coopération fiscale internationale ». Avec cette ensemble de nouvelles directives, la fraude fiscale va devenir de plus en plus complexe…

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