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Ukraine: la tentation de l’extrême droite

11.03.2014 par La Rédaction

Dmytro Yarosh, leader du groupe ukrainien d’extrême droite Praviy Sektor (Secteur droit), a déclaré samedi 8 mars qu’il serait candidat à l’élection présidentielle anticipée en mai prochain. Alors que son mouvement et d’autres groupuscules d’extrême droite avaient investi les rangs de la mobilisation anti-gouvernement à Kiev ces trois derniers mois, cette candidature doit-elle faire craindre un retour de l’extrême droite à la tête du pays ? Décryptage avec Éric Aunoble, chargé de cours à l’Université de Genève et spécialiste des dynamiques révolutionnaires dans l’Ukraine soviétique.

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JOL Press : Que représente aujourd’hui Praviy Sektor dans le paysage politique ukrainien ?
 

Éric Aunoble : « Secteur droit » fait partie d’une mouvance d’extrême droite qui a une longue histoire en Ukraine. Dmytro Yarosh lui-même a fait partie, au moment de la perestroïka [réformes économiques et sociales menées par Gorbatchev en URSS entre 1985 et 1991, ndlr], d’un mouvement nationaliste qui s’appelait « Roukh ». Ce fut la première organisation intervenant dans la cadre de la perestroïka pour faire reconnaître l’identité ukrainienne et promouvoir l’indépendance.

Dmytro Yarosh est ensuite devenu dans les années 90 le dirigeant d’une organisation qui s’appelle « Le Trident », reprenant ainsi le symbole national ukrainien. Cette organisation a un caractère paramilitaire affirmé et sa presse s’appelle « Le Bandériste », du nom de Stepan Bandera, le leader nationaliste qui pendant la 2nde guerre mondiale a été à l’origine de l’armée insurrectionnelle ukrainienne, composée d’anciens supplétifs ukrainiens de la police nazie. Tout récemment, il a donc créé Praviy Sektor, qui a joué un rôle visiblement important sur la place de l’Indépendance, à Kiev, notamment dans l’organisation de groupes d’autodéfense contre les exactions de la police du président déchu Viktor Ianoukovitch.

JOL Press : Quelles sont leurs revendications ?
 

Éric Aunoble : Le slogan repris pendant toutes les manifestations, qui est d’ailleurs devenu le slogan général du mouvement, était « Gloire à l’Ukraine, gloire aux héros ». Ils soutiennent l’idée selon laquelle la nation ukrainienne doit être au-dessus de tout. Cette théorie vient d’un certain Dmytro Dontsov, qui a été le grand théoricien du nationalisme extrémiste en Ukraine dans les années 1920-30. Selon eux, les militants nationalistes doivent s’attacher à un seul but : la construction d’un État ukrainien fort à l’intérieur comme à l’extérieur, et tous ceux qui s’opposent à cette idée sont considérés comme des ennemis.

JOL Press : Quelles sont les positions de Praviy Sektor vis-à-vis de l’Union européenne ?

Éric Aunoble : Les militants de cette organisation considèrent que leur principal ennemi, c’est la Russie. Dès lors, chercher l’appui de l’UE est parfaitement logique. Cela n’en fait pas pour autant des partisans des valeurs du Traité de Rome… Praviy Sektor pourrait par ailleurs très bien s’entendre avec les membres d’Aube dorée [le parti néonazi grec, ndlr] avec qui il pourrait partager la vision d’un projet européen commun.

JOL Press : Dmytro Yarosh a pourtant déclaré qu’ils étaient « contre la xénophobie et contre l’antisémitisme », arguant que leurs militants étaient « de toutes nationalités »…
 

Éric Aunoble : Depuis le début de la mobilisation place Maïdan, ces nationalistes d’extrême droite ont été les plus résolus, non seulement sur le plan de la lutte physique contre les forces de Ianoukovitch mais aussi sur le plan de la lutte politique. Il semble que ces mouvements, y compris les plus extrémistes, ont ainsi bénéficié, non pas d’une adhésion idéologique de la part des contestataires, mais d’une adhésion sur leur attitude « jusqu’au-boutiste ». Cela n’est pas nouveau : depuis deux ans, le parti d’extrême droite Svoboda, qui fait partie de l’opposition parlementaire, a joué d’une popularité certaine dans l’intelligentsia de Kiev, y compris chez certains juifs.

Sur la question de l’antisémitisme, l’extrême droite nationaliste ukrainienne a toujours été extrêmement ambiguë – il y a toujours des débats sans fin sur le rôle des nationalistes ukrainiens pendant la seconde guerre mondiale. Les nationalistes mettent régulièrement en avant le fait que l’armée insurrectionnelle ukrainienne n’a jamais participé à la Shoah et que même des juifs étaient présents dans certaines unités de l’armée insurrectionnelle. Mais d’après des spécialistes de la question, si ces unités nationalistes n’ont pas participé à la Shoah, c’est parce que celle-ci avait déjà eu lieu quand l’armée insurrectionnelles ukrainienne a été montée. Quant à la présence de juifs dans les unités de l’armée insurrectionnelle, il semblerait qu’il s’agissait souvent de médecins emmenés de force et obligés de soigner les combattants.

L’antisémitisme peut être clairement exprimé chez certains théoriciens du nationalisme mais nié dans l’espace public. Par exemple, peu de temps après les élections de 2012, à un journaliste qui lui demandait ce qu’il pensait de l’actrice Mila Kunis [actrice d’origine ukrainienne installée aux États-Unis, ndlr] un des dirigeants du parti Svoboda avait répondu que ce n’était pas une Ukrainienne mais une « youtre » [injure raciste pour désigner un juif, ndlr]. Il s’était ensuite mollement défendu en disant qu’en ukrainien, il n’y avait qu’un seul mot pour dire « juif » et que c’est le mot, qui en langue russe ou dans certaines langues slaves, veut plutôt dire « youtre » ou « youpin » [autre insulte contre les juifs]. Alors que l’on peut parfaitement utiliser un autre mot en ukrainien.

JOL Press : Quelle place occupent aujourd’hui les différents partis d’extrême droite en Ukraine ?
 

Éric Aunoble : Le grand parti d’extrême droite, c’est Svoboda, qui a 38 élus au Parlement ukrainien (10% des voix aux dernières législatives). Ensuite, il y a une myriade de groupuscules. Ce qui est intéressant de noter, c’est qu’au sein du Conseil des ministres tel qu’il a été acclamé et soutenu par La Rada [la Parlement ukrainien, ndlr] après la chute de Ianoukovitch, 8 personnes occupant des postes au niveau ministériel sont liées à l’extrême droite.

Le vice-Premier ministre vient de Svoboda et c’est un ancien membre du Congrès nationaliste ukrainien ; la dirigeante du bureau anti-corruption, dans les années 90, était proche d’un autre mouvement nationaliste d’extrême droite qu’elle a quitté parce qu’elle le trouvait trop modéré ; le ministre de l’Écologie, et celui de l’Agriculture sont membres de Svoboda, le ministre de l’Éducation et recteur de la principale université de Kiev est un ancien membre du groupe « Le Trident » ; au Conseil national de sécurité se trouve un des fondateurs du parti social-national d’Ukraine (qui était le premier nom de Svoboda), et au poste de procureur général d’Ukraine on trouve aussi un membre de Svoboda. Cela fait près d’un tiers des postes à rang ministériel qui sont occupés par des gens qui ressortent de l’extrême droite.

Enfin, avec la mobilisation pro-russe en Crimée et en Ukraine de l’Est se développent des groupes d’extrême droite pro-russes qui ont exactement le même type de méthodes – seule la couleur du ruban qu’ils accrochent à leur treillis change. Sociologiquement, c’est le même phénomène des deux côtés et il faut bien comprendre que l’un se renforce grâce à l’autre : les forces pro-russes utilisent l’extrême droite ukrainienne pour justifier leur demande de protection de la part de la Russie et inversement, l’extrême droite ukrainienne va se faire apprécier de l’opinion intellectuelle libérale en disant que les vrais fascistes sont les pro-russes.

Propos recueillis par Anaïs Lefébure pour JOL Press

————————————————–

Eric Aunoble est chargé de cours à l’unité de russe de l’Université de Genève. Il a commencé ses recherches sur l’Ukraine soviétique dans les années 1990 en préparant une thèse de doctorat sur les communes comme forme d’utopies révolutionnaires. Il poursuit ses recherches autour de la dynamique des conflits liés à la période révolutionnaire, l’élaboration d’une culture soviétique et les rapports sociaux dans l’Ukraine des années 1920-1930.

La Rédaction


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