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Affaire du Sofitel: le livre qui contient les confidences exclusives de DSK

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La vie chaotique de DSK a été jalonnée d’épreuves : une enfance à Agadir interrompue par un séisme, un père brillant mais dépressif, des défaites électorales, une démission sous pression de la justice lorsqu’il était ministre des Finances, trois divorces… (Crédit : Shutterstock)

Depuis l’affaire du Sofitel, la lumière la plus crue a été braquée sur la vie privée de DSK. Qui est vraiment cet homme qui n’a cessé de côtoyer le précipice ? 

Extrait de « Le roman vrai de DSK », de Michel Taubmann (Archipoche – janvier 2014)

Dimanche 16 octobre 2011. Place des Vosges, à Paris. Rendez-vous chez le couple Strauss-Kahn pour un ultime entretien avant de conclure La Contre-enquête[1]. Il est 17 heures. Le deuxième tour de la primaire socialiste est un succès. On s’attend à deux millions et demi de votants. La fête s’annonce belle ce soir pour François Hollande. Elle aurait pu être celle de Dominique Strauss-Kahn. Ce 16 octobre, il est allé voter à Sarcelles, dans cette banlieue populaire aux multiples communautés, dont il fut maire, puis député, pendant quinze ans.

À Sarcelles, « Dominique » est aimé, on le salue, on le serre dans les bras. Il est un enfant du pays. « Tiens, v’là l’patron », lance un élu quand il pénètre dans le bureau de vote. Anne Sinclair, elle, est allée voter dans le XVIe arrondissement où elle était domiciliée auparavant. Certains en ont conclu que le couple était au bord de la séparation. Ils connaissent sans doute de fortes tensions. Mais ce 16 octobre 2011, dans leur salon de la place des Vosges, ils paraissent très proches. On le voit aux gestes, aux regards, à la complicité. Un couple, uni par mille liens. Et désormais, par une souffrance partagée. Un supplice sans fin.

À défaut du triomphe politique promis, ce 16 octobre, ils auraient pu au moins savourer ensemble la victoire judiciaire obtenue trois jours auparavant : le classement sans suite de la plainte pour tentative de viol déposée par Tristane Banon. Mais ce succès a aussitôt été gâché par le communiqué du procureur de la République de Paris, qualifiant de possible agression sexuelle la tentative d’embrasser la jeune journaliste en 2003. « Les montagnes russes, on a l’habitude, soupire Anne Sinclair. Après chaque bonne nouvelle survient une catastrophe. »

Ce 16 octobre vient d’éclater ce que des journaux ont appelé la « troisième affaire DSK », dite « du Carlton de Lille ». On parle de proxénétisme aggravé, d’abus de biens sociaux, de femmes transformées en « colis », expédiées de l’autre côté de l’Atlantique. Assis dans son fauteuil, Dominique Strauss-Kahn paraît très affecté :

— C’est une accusation terrible. Dans la presse, on associe mon nom à la prostitution. C’est insupportable. J’ai participé à des soirées libertines, c’est vrai. Mais, d’habitude, les participantes à ces soirées ne sont pas des prostituées. Libertinage et prostitution ne vont pas ensemble.

— Avec vos responsabilités, n’auriez-vous pas dû quand même vous poser la question ?

— Oui, on peut le dire maintenant. J’ai toujours fait confiance aux gens dans ma vie personnelle comme en politique. Il est arrivé que des amis m’invitent à des soirées, ils me présentaient les filles comme leurs copines. Quand quelqu’un vous présente sa copine, vous ne lui demandez pas si c’est une prostituée. Et quand on vous invite à une soirée, vous ne demandez pas à voir la facture, pour vérifier si c’est votre ami ou son entreprise qui paie.

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Le téléphone sonne. Dominique Strauss-Kahn s’interrompt. Il répond à son avocat. Ils mettent au point un communiqué : « Dominique Strauss-Kahn veut être entendu comme témoin dans les plus brefs délais, afin de s’expliquer et de mettre un terme aux insinuations malveillantes. » « Je n’ai jamais rien fait d’illégal, insiste Dominique Strauss-Kahn. La prostitution, le proxénétisme, je les ai en horreur. Ce n’est pas moi cela. Vous vous rendez compte des dégâts causés sur ma femme, sur nos enfants ? On étale sur la place publique mon intimité, alors que je n’ai même pas été entendu comme témoin. »

Anne Sinclair partage l’indignation de son mari face à cette nouvelle affaire. Toujours solidaire. Que pense-t-elle de ses frasques passées ? « C’est notre problème. Je m’en expliquerai le jour de mon choix. Dans un livre peut-être. Je dirai ce que j’ai vécu et j’expliquerai aussi ma conception du couple. Je répondrai à certaines féministes qui m’ont jugée sans savoir. »

Ce soir-là, Anne Sinclair, en jean et en pull, paraît étonnamment jeune. Elle a beaucoup minci. Dominique Strauss-Kahn, lui aussi, a minci, mais la barbe qu’il laisse pousser depuis quelques jours ne le rajeunit pas. Je continue à les interroger, afin de reconstituer leur emploi du temps de ce fatidique 14 mai.

Nous épluchons les relevés téléphoniques d’Anne Sinclair. Je lui pose encore d’autres questions, excité à l’idée de trouver la vérité. C’est mon job. C’est leur drame. Anne Sinclair reste aimable et disponible. Mais elle paraît très fatiguée. Très lasse. Ses yeux sont humides.

Il est près de 20 heures, DSK appuie sur la télécommande. Sans surprise, François Hollande sera le candidat des socialistes à la présidentielle. Je scrute le visage de DSK. Self-control. Comme souvent, il ne laisse paraître aucune émotion. Juste un petit sourire un peu mélancolique. « Belle victoire ! », soupire-t-il.

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Michel Taubmann, journaliste, a dirigé le bureau parisien de l’information d’Arte. Il est aujourd’hui rédacteur en chef de la chaîne de télévision internationale i24News. Auteur de plusieurs livres d’investigation, il venait de publier une biographie de DSK lorsqu’a éclaté l’affaire sur laquelle, depuis 2011, il n’a cessé d’enquêter.

 


[1] M. Taubmann, Affaires DSK, la contre-enquête

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